éloge de l’athéisme
On ferait volontiers l’éloge de ceux qui, ne croyant à rien, ni à Dieu, ni au diable, ni à un autre monde, n’ont pas d’autre choix que de préférer la vie à la mort. Ils l’aiment avec violence puisqu’ils n’ont rien d’autre à aimer. Et, sans que Dieu le leur ordonne, il leur arrive aussi d’aimer les autres hommes.
Pascal, dans ses Pensées, oppose le salut éternel à l’assouvissement de quelques caprices passagers. Mettant en balance un bien infini et des satisfactions d’un moment aussitôt oubliées, son pari repose sur l’intérêt qu’il y a à croire. Comme les autres croyants, les chrétiens espèrent jusque dans l’autre monde un bonheur ineffable. Et celui qui leur est promis après la mort et pour l’éternité dépasse de l’épaisseur d’un monde ceux de la vie d’ici-bas.
Parce qu’ils font le bien pour le bien, sans le moindre souci de rémunération posthume, comment ne pas voir que les incroyants, au contraire, sont capables mieux que personne de donner un exemple qui vaille d’être suivi ? « La seule tristesse, disait Léon Bloy qui devait être insupportable dans la vie de chaque jour mais qui était chrétien, la seule tristesse est de ne pas être un saint. » Ne croyant pas à Dieu, n’espérant aucune récompense, persuadés du néant dans lequel ils entreront à la fin de leur vie, les athées qui auront aimé leur prochain comme eux-mêmes et plus qu’eux-mêmes ont droit au titre de saint. Et seuls ils peuvent espérer être assis à jamais à la droite de ce Seigneur auquel ils ne croient pas.