CHAPITRE XVII
En l’année 20 de l’Ang’empire, j’étais technicien de l’HO, l’Holovision Officielle. Nous fûmes chargés de réaliser un reportage sur l’assaut donné contre le palais épiscopal de Vénicia par les forces impériales, composées de mercenaires de Pritiv, d’interliciers et de gardes pourpres. Nous pénétrâmes dans le palais en même temps que la deuxième vague d’attaque. Les premiers bataillons avaient déjà nettoyé de multiples poches de résistance, et d’innombrables cadavres d’Osgorites, horriblement mutilés, jonchaient les couloirs et les pièces des niveaux supérieurs. Nous essuyâmes plusieurs déflagrations de bombes à propagation lumineuse et nous ne dûmes de garder la vie sauve qu’aux réflexes des interliciers qui nous accompagnaient. Les passages étaient truffés de mines, de grenades à limaille et d’autres armes explosives plus ou moins sophistiquées qui firent des ravages parmi les forces d’assaut. La fumée était d’une telle densité que nos objectifs holo, ultra-sensibles pourtant, ne captèrent que très peu de détails (cela nous valut d’ailleurs de sérieuses remontrances de la part de notre responsable). Nous étions mus par l’espoir de débusquer le muffi Barrofill le Vingt-cinquième, le Marquinatole, l’homme que tous les Véniciens espéraient voir exposé sur une croix-de-feu en place centrale de Romantigua. Nous gagnâmes le sous-sol au bout d’une heure de progression désespérément lente. Les rumeurs les plus fantaisistes couraient sur le compte du muffi : d’aucuns prétendaient qu’il avait été frappé par une onde à haute densité, d’autres affirmaient qu’il s’était lui-même planté une dague dans le cœur, d’autres assuraient qu’il s’était réfugié dans un atelier de réparation de déremats, d’autres encore qu’il avait reçu le renfort des guerriers du silence. Le fracas des explosions et les râles des blessés ponctuaient notre marche. Les hommes mouraient par centaines, et en nous se propageait la haine du Marquinatole, de l’homme que nous considérions comme responsable de ce terrible massacre.
Terni Jauïonn,
Autobiographie d’un traqueur d’Histoire