EXTRAIT D’UNE LETTRE D’UN CONSEILLER AUX AFFAIRES INDIENNES ADRESSÉE AU MINISTRE DE L’INDUSTRIE
Les Inuits et les Amérindiens sont encore habités par la patience des anciens. Les jeunes le sont déjà moins et il est à craindre que leurs enfants ne le soient plus du tout. Seront-ils terroristes ? Mystère ! Vous avez bien vu que ceux de Saint-Régis commencent à creuser des trous dans la route lorsqu’ils ne sont pas satisfaits. Je crois que nous tablons beaucoup trop sur la patience séculaire des trappeurs. Les jeunes ne sont plus guère trappeurs, et bien moins patients. Ils le seront encore moins quand on leur aura pris leurs territoires de trappe.
Dites-vous bien que lorsque vous aurez édifié des lignes à haute tension à travers leurs terres pour vendre du courant aux Américains, rien ne leur sera plus facile, pour revendiquer, que de faire sauter vos pylônes. Et vous savez que certains d’entre eux commencent à dire que vous voulez vendre leur pays aux États-Unis.
EXTRAIT D’UNE LETTRE D’UN MISSIONNAIRE JÉSUITE
Je vais parfois dans un village de sauvages où certains vieux accrochés à leurs croyances refusent absolument de se convertir. Et pourtant, parce qu’il est le chef du village et qu’il habite la plus vaste et la plus belle tente, lorsque la température m’interdit de célébrer ma messe en plein air, c’est le plus dur de tous qui m’offre l’hospitalité pour l’eucharistie. J’en suis chaque fois profondément bouleversé. Et il me semble, à chanter la gloire de notre Dieu en cet espace où on en adore d’autres, que quelque chose de très beau et de très chaud se passe. C’est un peu comme si je retrouvais ici la pureté de l’étable de Bethléem. Il me semble que Notre Seigneur qui veut bien se placer sous les espèces du pain doit se sentir à l’aise sous des écorces de bouleaux et des peaux de bêtes…