53
Les deux Surinamiens écoutaient eux
aussi attentivement les bruits de la fusillade. Restait plus qu’un
seul tireur. Pour l’instant. Du neuf millimètres. Qui se faisait
arroser aux Magnums des deux autres. Et José qui a ses grenades…
C’était du tout cuit. L’un des deux dit à son compagnon coiffé
rasta :
— Va voir là-dedans et fais
gaffe, moi je vais aller aider !
Il attendit que l’homme pénètre dans
le tunnel végétal, puis lui-même sortit. Ils venaient de découvrir
ce sentier et ils avaient commencé à s’y engager quand ça avait
tiré dans tous les sens.
Le Surinamien souleva les feuilles
au-dessus de sa tête, le soleil de la petite place l’éblouit un peu
et il jeta un regard prudent en direction des cabanes. Ça
tiraillait encore un peu au Magnum, mais le type au neuf
millimètres avait dû se faire descendre, vu qu’on l’entendait plus.
Sur qui ils tiraient, ces cons-là ? Il vérifia le cran de
sûreté de sa mitraillette Uzi et s’avança lentement, le dos courbé,
en longeant de loin les maisons de bambou.
Sans savoir qu’Edouardo courait à sa
rencontre.
L’homme coiffé rasta s’engagea sur le
sentier ombreux, l’arme en avant. Ce fusil-mitrailleur américain,
bien que d’un modèle ancien, vous descendait toujours son bonhomme
à soixante mètres. C’est du moins ce qu’il se disait pour se
rassurer.
Un grand papillon bleu passa devant
lui. Drôle de coin… Les racines des arbres, on dirait des pieds
d’éléphant. Ça devrait être là que le fleuriste cache ses petites
fleurs, le malin… Un ancien village akha, ici, à tous les coups.
Portiques sacrés… J’aime pas ces trucs-là. Qu’est-ce qui brille au
milieu, on dirait des fils, on dirait… Merde ! L’enfant de
pu…
La double détonation qui secoua les
feuilles dans son dos fit se retourner l’homme à l’Uzi. Il vit un
nuage de fumée qui montait doucement au-dessus des arbres, à peu
près à l’endroit où il avait envoyé son compagnon. Il regarda de
nouveau devant lui. Un type à moustaches venait sans aucun doute de
sortir du sol. Il leva son Uzi. Edouardo lui tira deux balles dans
la tête, presque à bout portant.
Le Surinamien resta debout, l’air
pensif comme s’il venait de se souvenir de quelque chose
d’essentiel, vacilla et tomba lourdement dans les herbes. Edouardo
se pencha et lui arracha la courte mitraillette des
mains.
Sonotone et José avaient cessé de
tirer en entendant la double détonation rapprochée, suivie des deux
coups du neuf millimètres.
— C’est quoi, ça ? demanda
Sonotone.
— Des mines Claymore. C’est
marqué dessus, en général, répondit l’homme aux grenades. Je
reconnais leur joli bruit n’importe où. Quatre cents billes d’acier
dans une p’tite boîte, propulsées par du C4. Quelqu’un vient
peut-être d’en déguster huit cents dans le portrait… Et le type au
neuf millimètres, c’est pas lui qu’a marché sur une Claymore,
puisqu’il a tiré après.
Sonotone jura.
— Continue à arroser les deux
cons, je vais aller le cueillir, l’autre
rigolo.
Il sortit l’arme au poing, sauta en
bas du perron de bambou avec une surprenante agilité, puis il
disparut à la vue de José, qui lâcha vaguement un coup de feu en
direction de l’endroit où Sénéchal et Lucrèce étaient
terrés.
José soupira, remit avec lenteur son
arme dans son étui, puis sifflota un petit air guilleret en
estimant d’un coup d’œil la distance qui le séparait des types
là-bas, dans leur trou. Il prit lentement une grenade accrochée à
sa veste. Il plissa les yeux. Et réfléchit… En cavalant depuis le
fond de la baraque et en balançant ça depuis le perron, c’est
jouable. Puis je rentre me planquer vite fait. Ça va épater les
deux mecs d’en face, quand ils vont prendre mon p’tit ananas dans
la gueule…
Il recula lentement au fond de la
cabane en faisant craquer sous son poids le plancher de gros troncs
équarris, respira un bon coup et appuya ses larges épaules contre
le mur du fond. Il refit mentalement son parcours, réfléchit en
sifflotant encore. Enfin il dégoupilla la grenade, retira la
cuiller d’un coup sec et commença à
compter…
— Un…
Sénéchal était sorti à quatre pattes
de sous la maison sur pilotis. Il se redressa, regarda la porte, le
perron, estima lui aussi la distance et recula vivement, cherchant
un bon angle. Il cala la crosse du De Franchi sur son ventre puis
ouvrit le feu dans le trou noir de l’entrée de la cabane, faisant
gicler une nuée d’éclats de bambou. La détonation surprit José, qui
tenait la grenade ouverte à la main et venait de s’élancer.
Sénéchal tira coup sur coup, créant des grandes brèches dans le
bambou, faisant entrer la lumière du soleil dans la pièce obscure
et touchant José à la jambe à travers la cloison végétale. José
hurla de douleur en tombant au sol, perdit sa grenade et la
regarda, l’air stupide, rouler devant lui. Il eut le temps de se
souvenir d’une courte prière puis tout sauta, faisant jaillir vers
le ciel les palmes du toit et voler dans tous les sens des troncs
de bambous déchiquetés.
Sénéchal, en contrebas, avait perdu
son arme et roulait sur lui-même au milieu de la fumée et des
morceaux de la baraque qui retombaient de tous côtés en
rebondissant sur le sol. Enfin il s’immobilisa, secoua la tête et
s’aperçut qu’il avait été touché à l’avant-bras. Il saignait et sa
tête bourdonnait. Il entendait mal. Il se palpa la poitrine et
marmonna :
— Sifflait
faux…
Puis il
s’évanouit.
La cabane dévastée vacilla soudain sur
ses pilotis en craquant et en grinçant, amorça une lente chute vers
lui, puis se stabilisa, figée dans l’air, comme supportée par une
main invisible.
Lucrèce, toujours dans son trou,
entendait les rafales continues d’une arme automatique, là-bas,
vers l’orée de la forêt, pareilles au bruit d’une scie électrique.
Le bruit d’un Magnum répondait. L’arme automatique se tut
soudainement et la détonation sèche du neuf millimètres lui
succéda. Cinq coups d’affilée.
Puis encore
trois.
Puis plus
rien.
Edouardo avait jeté la petite
mitraillette au canon fumant loin de lui. Déjà vide, bordel !
Non mais quel con, j’aurais dû lui piquer ses chargeurs, à l’autre…
Wyatt Earp, lui, aurait prévu, à OK Corral… Qu’est-ce qui a fait
sauter la baraque, là-bas ? Putain le boucan ! J’ai
entendu le petit fusil du grand écolo, on dirait. L’est pas mort…
Et quoi d’autre ? Des grenades ? Où il est, l’autre
fumier à oreillette ? Plus de munitions pour le Beretta. Il
faut que je me tire de là vite fait. Merde, le voilà ! Il va
venir me buter, ce fumier…
Mais qu’est-ce qu’il
fait ?
Sonotone avait mis ses mains en
porte-voix. Il était à demi dissimulé par le tronc d’un gros arbre
dont l’écorce était déchirée par les impacts des balles de l’Uzi.
Il criait :
— Ohé, mon ami neuf
millimètres ! Je crois que tu n’as plus de munitions… Je me
trompe pas ?
Il rit très
fort.
— Tu veux pas me répondre ?
T’es pas très poli !
Il attendit un peu et
cria :
— Ohé, neuf millimètres, mon
ami ! Mon cher ami ! Je vais venir te dire bonjour et on
va jouer à un jeu… T’as un couteau ?
Il attendit de
nouveau.
— Tu veux toujours pas me
répondre ? C’est pas grave. Je vais pas te tirer dessus, c’est
promis ! Juré ! On va s’expliquer entre amis, neuf
millimètres. Je crois qu’on est plus que tous les deux, ici, tu
vois ? Ou peut-être pas, va savoir… La vie est hydraulique,
mec !
Il recula derrière l’arbre et sortit,
d’un petit fourreau métallique accroché à sa ceinture, une sorte de
long poinçon à manche de bois qu’il serra fermement. Il avait remis
son Magnum dans son étui. Plus qu’une balle. Largement suffisant.
On va jouer un peu avec le gars là-bas. Il cria
encore :
— Je sais que tu es là, neuf
millimètres, on va voir si tu sais te débrouiller sans
flingue.
Il avança et sortit de derrière
l’arbre. Puis, bras tendus, il fit passer son poinçon à toute
vitesse d’une main dans l’autre.
— Tu te demandes pourquoi je fais
ça, hein ? Pourquoi je veux m’amuser avec toi un peu avant de
te crever ? Je vais te dire…
Il éclata d’un grand rire sinistre qui
le secoua, la tête penchée en arrière.
— C’est parce que les occasions
de rigoler sont assez rares dans le
coin !
— C’est bien mon avis, dit Euloge
derrière lui.
Il lui tira une volée de plombs de
chasse dans les fesses.
Sonotone s’était écroulé en hurlant de
douleur. Euloge le coucha en joue.
— Bouge pas, mon gars, juste
après c’est de la chevrotine.
Edouardo sortit la tête de son trou et
cria :
— Merci, monsieur
Euloge !
Le pêcheur fit un petit geste du
pouce, mais ne changea pas d’un millimètre sa position académique
du tireur debout, l’œil rivé au viseur. Edouardo courut dans sa
direction. Il arriva, essoufflé, et se pencha vers l’homme au
sonotone, en prenant bien garde de ne pas se mettre dans l’axe du
fusil d’Euloge. Puis il sortit le Magnum de l’étui de ceinture du
type à terre qui geignait. Il vérifia le contenu du barillet et vit
le culot tout neuf du projectile dans l’une des chambres. Il se
releva, regarda autour de lui, revolver en main, comme s’il le
soupesait, lissa sa moustache et décocha un terrible coup de pied
dans la mâchoire de l’homme couché, qui hurla de plus
belle.
— Fumier ! On va s’expliquer
entre amis, hein ? Je vais pas te tirer dessus, hein ?
Menteur ! Combien vous étiez ? Y en a encore ? Ne
mens pas, ou je te bute tout de suite avec ton flingue !
Reculez, monsieur Euloge !
Il braqua le gros revolver noir sur la
tête de l’homme et leva le percuteur.
— T’as une chance sur six. Je
crois que t’es joueur, non ?
Les blessures de Sénéchal étaient
superficielles, mais un éclat de grenade était enfoncé sous la peau
de l’avant-bras.
Quelque chose l’avait coupé sur trois
centimètres juste sous l’œil gauche, sans pénétrer. Un morceau de
bambou aiguisé comme un mince couteau s’était également fiché dans
le revers de sa manche de chemise. Lucrèce, accompagné d’Edouardo
qui avait retrouvé le petit fusil SPAS De Franchi, était allé
chercher la trousse de premier secours dans la pirogue d’Euloge, et
lui appliquait un pansement sur le bras. Sénéchal, apparemment
sonné et couvert de poussière et de fibres de bambou, parlait fort
car il n’entendait pas normalement.
— Monsieur Edouardo, la prochaine
fois que vous nous emmènerez en promenade pour chercher des herbes
aromatiques, faites-nous penser à acheter des casques lourds.
Permettez-moi de vous faire remarquer que vous êtes un tantinet
dispendieux avec vos munitions.
Edouardo se renfrogna. Sénéchal
reprit :
— Monsieur Euloge, vous êtes un
guide exceptionnel, l’Office du tourisme a besoin de vous de toute
urgence. Ce village est ravissant, avec son portail
accueillant…
— Ferme-la, dit Lucrèce, il y a
eu trois hommes de tués ici, en vingt
minutes.
Sénéchal n’entendit pas le petit
chimiste, mais il n’insista pas. Il avait l’œil vague. Edouardo le
Magnifique grommela :
— Peut-être plus de trois… je
suis allé voir – très très prudemment – le sentier
planqué sous les feuilles. Un des mecs a sauté sur une mine,
peut-être deux mines. Moi, j’ai entendu deux boum, mais allez
savoir combien ils étaient là-dessous. Si ça se trouve, y en a un
autre qu’a été projeté dans le sous-bois… Le cinglé au sonotone
ment comme il respire, même avec son flingue sur la tête. Le mec
dans le sentier est raide mort, j’ai regardé depuis l’entrée du
chemin avec les jumelles, je n’ai pas osé m’approcher, c’est
peut-être miné partout… De toute façon, c’est foutu, on n’a pas
serré le petit bonhomme et ses plantes vertes. Si elles sont encore
au bout de ce sentier, ce qui m’étonnerait fort, ne comptez pas sur
moi pour aller les chercher. Il faudrait des hommes et des
machettes pour ouvrir un autre sentier.
Lucrèce, tout en terminant le
pansement de Sénéchal, demanda :
— Que vont devenir les dépouilles
de ces hommes ? Il faut les ramener…
Edouardo haussa les
épaules.
— J’en ai strictement rien à
foutre !
— Enfin, monsieur
Edouardo !
— Non, je déconnais, monsieur
Méjaville. Je vais faire venir l’armée et les gendarmes, ça va être
un joyeux bordel cet après-midi.
Le pêcheur hocha la
tête.
— Sinon les bêtes des bois vont
venir les bouffer, et s’il y a encore des mines, elles vont sauter
dessus.
Edouardo était
songeur.
— À moins que quelqu’un vienne
enlever les mines qui restent une fois qu’on sera partis. S’il en
reste.
Euloge ne souriait plus. Il dit
lentement :
— Mais pour leur grand malheur, à
ces morts-là, les esprits mauvais des Akhas vont venir prendre
leurs âmes. Tout ça pour des p’tites plantes, si j’ai bien compris
le but de notre promenade.
La pirogue aux flancs râpés, amarrée à
son ponton sous les grands feuillages, ne leur apprit rien. Il n’y
avait qu’une seule pagaie à l’intérieur. Le moteur hors-bord trapu
était d’un modèle ancien, sans aucune particularité
visible.
Ils écopèrent l’eau qui stagnait dans
le fond de l’embarcation mais n’y trouvèrent aucun indice,
seulement un œuf d’ibis tombé du nid, au-dessus de leur tête.
Sonotone, qui avait maintenant les mains liées devant lui, leur
affirma que la pirogue n’était pas la sienne, mais il refusa de
révéler l’emplacement de celle avec laquelle il était arrivé ici,
en compagnie de son équipe de flingueurs. En soignant ses blessures
faites au plomb de chasse par Euloge, Lucrèce l’avait fouillé
complètement et s’était aperçu que le fil du sonotone ne menait à
aucun appareil de communication. Ni d’ailleurs à quoi que ce soit,
puisqu’il se terminait par un écheveau de nœuds compliqués glissé
dans une poche de poitrine. À la question de Lucrèce, l’homme avait
répondu que ceux qui lui parlaient là-dedans n’avaient pas besoin
d’amplificateur ou autre système moderne de ce genre pour lui
chuchoter à l’oreille. Lucrèce avait demandé pourquoi. Il avait
ricané, fouillé avec deux doigts dans sa bouche ensanglantée, puis
avait craché une dent dans l’herbe devant
lui.
Les rameurs devaient redoubler
d’effort, leur pirogue remorquant celle du petit homme au chapeau
de paille dans laquelle on avait installé Sonotone, couvert de
pansements et ficelé sur le ventre car il était incapable de
s’asseoir. Il chantonnait, la tête tournée vers la berge qui
défilait lentement. Edouardo se retournait de temps à autre et lui
lançait des regards acérés. Lucrèce
demanda :
— Vous ne saviez pas qu’il y
avait un village là-dedans, monsieur Euloge ? C’est pourtant
tout près de chez vous.
Le pêcheur resta silencieux un moment,
puis dit :
— J’en avais entendu parler par
des vieux Indiens du coin. Personne ne va traîner dans ce genre
d’endroit. Même si j’avais su que ce village était là, planqué dans
les bois, je n’y aurais jamais mis les
pieds.
— Pourquoi ?
Euloge fit un geste
vague.
— Magie. Mauvaise magie. Les
esprits.
Edouardo commenta à voix
basse :
— Pas loin de Cayenne, il y a une
ancienne rhumerie, en pleine brousse. Elle date du milieu du
XIXe
siècle. On raconte qu’à l’abolition de l’esclavage, le
propriétaire, un type appelé Vidal de Lindenges, a exterminé d’une
façon ignoble tous ses esclaves, pour ne pas les libérer. La
légende veut que les esprits de ces pauvres gars rôdent autour de
la maison – une énorme usine, en fait – et qu’ils
cherchent à se venger de leurs souffrances passées, la nuit tombée.
Vous n’y emmènerez pas un Guyanais le soir.
Euloge hocha la
tête.
— C’est bien vrai ce que vous
dites, monsieur… Bon, on arrive aux rochers, on va pouvoir mettre
au moteur, ça vous reposera.
Sénéchal, qui n’avait pas saisi un mot
de la conversation et qui pagayait furieusement, déclara, en
parlant fort, que tout ça lui avait ouvert l’appétit et qu’il se
taperait bien une fricassée d’iguane au déjeuner, peut-être même
deux, ce qui rassura tout le monde sur son état de santé. Un bruit
de train roulant vers eux leur parvint, puis il disparut au
loin.
— Qu’est-ce que c’était ?
Vous avez des express dans la jungle ? demanda
Lucrèce.
Le pêcheur rit
franchement.
— C’est le père bon Dieu qui
roule ses barriques !
— Je ne comprends
pas.
— C’est la pluie, mon bon
monsieur. C’est la pluie sur les feuilles des arbres qui fait ce
bruit-là.
Le médecin qui avait examiné Sénéchal
déclara :
— Un tympan fêlé et une forte
commotion, mais un gaillard de ce gabarit…
On fit une radio de son avant-bras et
on procéda à l’extraction de la particule de plastique, qu’on
compara avec celles que la petite Indienne avait reçues dans la
poitrine et dans l’épaule. Toutes deux paraissaient provenir de la
même grenade, mais il était difficile d’être affirmatif. Ce qui
rendit Sénéchal songeur. Il s’endormit très tôt, épuisé, et à son
réveil ses migraines s’étaient envolées. L’après-midi, il alla en
ville, fit quelques emplettes, visita le fort de Cayenne, eut un
entretien avec un gradé, et enfin prit un taxi-brousse pour rendre
visite à Monsieur Euloge, dans sa cabane du bord de la rivière. Il
but du rhum avec lui sur le ponton où étaient amarrées les longues
pirogues des pêcheurs, et lui proposa une mission. Euloge
l’accepta. Ils examinèrent ensemble des cartes détaillées du réseau
hydrographique, et particulièrement celui de la rivière qui coulait
à leurs pieds. Euloge raconta à l’écoflic que les pirogues des
gendarmes et des militaires étaient parties la veille pour le
village akha, Edouardo en tête, et qu’ils devaient, à son avis,
tous camper là-bas, armés jusqu’aux dents. Ils étaient nombreux et
ils avaient emporté des sacs de plastique pour les corps des
flingueurs. Des chiens les accompagnaient.
— Peut-être des chiens dressés
pour éloigner les esprits mauvais, ajouta-t-il en souriant à
demi.
Sénéchal lui donna de l’argent et un
paquet. Puis ils contemplèrent le soir tomber sur le marais et
écoutèrent le charivari des perroquets et des singes sur l’autre
rive. L’enquêteur revint à l’hôtel à la nuit tombée pour y étudier
des cartes et faire un rapport à la FREDE.
Plus tard, il appela la métropole et
parla avec ses femmes.