Lettre de Claire :
« 18 octobre 1946
Cher papa et chère maman,
Un avion doit partir d’ici quelque temps. Aussi, je m’empresse de vous écrire quelques lignes simplement pour vous dire que j’ai maintenant la certitude et que si tout va bien, je vous donnerai un petit-fils dans sept mois.
Maintenant que je sais, je suis presque folle de joie et ne pense plus à mon gros ventre futur.
Si c’est un garçon, il s’appellera François et j’espère, cher papa, que vous voudrez bien être son parrain.
Voilà, comme il faut que je me dépêche, je ne vous en dirai pas plus aujourd’hui, si ce n’est que Wia est aussi content que moi.
Je vous embrasse tous les deux de toutes mes forces.
À très bientôt. »
La chambre que Claire partage maintenant avec Wia ne s’appelle plus la chambre des cocottes mais « la chambre des jeunes mariés ». Des photos de leur voyage de noces glissées dans les coins du miroir ou épinglées sur le mur attendent un prochain encadrement. Aucun vêtement ne traîne plus sur les meubles, Wia est très ordonné. « Et il cire lui-même ses bottes tous les jours ! » répète souvent Claire avec admiration.
Dans deux semaines, elle doit se rendre à Paris pour des examens médicaux complémentaires, voir sa famille, se reposer. Si elle se sent chez elle à Berlin, sa famille lui manque souvent. Elle a besoin de retrouver son père et sa mère ; de savoir ce que font ses frères ; d’interroger sa sœur sur les aléas de la grossesse : Luce, déjà mère de deux petites filles, est à nouveau enceinte. Claire est certaine que, comme pour elle, ce sera un garçon. « Ils naîtront à deux mois de distance », calcule Claire. Et durant un long moment, elle rêve à ces deux cousins qui se retrouveront lors des vacances d’été à Malagar, qui grandiront ensemble et que la vie jamais ne séparera.