34.
En entrant dans le cabinet de Draken, Lola n’avait pu s’empêcher de remarquer l’absence de Ben Mitchell. Bizarrement, elle ne sut s’en réjouir.
La gêne discrète d’Emily ne lui avait pas échappé non plus, preuve supplémentaire, s’il en fallait, qu’il s’était bien passé quelque chose entre elle et le psychiatre.
— Ton ami n’est pas là ? demanda-t-elle en s’efforçant de ne rien laisser paraître de son agacement.
— Non. Il n’a pas pu venir.
— Tu veux qu’on reporte ?
— Certainement pas. Le temps presse. Je me débrouille très bien sans lui.
Gallagher grimaça. Elle avait beau ne pas apprécier le neurophysiologiste, son absence l’inquiétait.
— Tu veux que je reste pour t’assister ? insista-t-elle.
Un sourire se dessina sur les lèvres du psychiatre.
— Non merci. Tu as peur de me laisser tout seul avec Emily ?
— Oui.
— Pour des raisons médicales, ou parce que tu as peur qu’on couche ensemble ? Si c’est le cas, je te rassure, c’est déjà fait.
Emily, qui n’avait encore rien dit depuis qu’elles étaient entrées dans le cabinet, se prit la tête dans les mains, partagée entre la honte et l’amusement.
— J’avais cru comprendre, répliqua Lola d’un air sec. Très professionnel, tout ça.
— Bah… Il paraît que ton ami Phillip Detroit, le beau cow-boy du 88e district, se tape l’une de ses collègues, et ça n’a l’air de déranger ni l’un ni l’autre.
Lola dévisagea Draken longuement, puis elle finit par rendre les armes. Elle esquissa une forme de sourire à son tour.
— T’es vraiment le plus gros trou-du-cul que la terre ait porté.
— Je t’aime aussi très fort, Lola. Maintenant, laisse-nous. On a du travail.
— Je reviens dans une heure. Et cette fois-ci, c’est moi qui ramène Emily.
— D’accord, maman.
Le détective sortit du cabinet.
Aussitôt la porte fermée, Emily s’approcha de Draken et l’embrassa.
L’homme passa une main dans ses cheveux et recula la tête, plantant ses yeux dans son regard.
— On bosse ou on baise ?
— On bosse ! répliqua la jeune femme sans se départir de son sourire.
— Bon, d’accord… Mais après on baise ?
Emily le repoussa gentiment.
— Lola a raison : tu es le plus grand trou-du-cul que la terre ait porté.
— Attends que je te présente mon père.
Ils entrèrent dans le second cabinet.
Ce jour-là, le rituel qui ouvrait la séance d’hypnose prit un sens très différent. Chacun des gestes du psychiatre était empreint d’une sensualité nouvelle. Certains semblaient des caresses. Sa façon délicate – et ferme à la fois – de lier les bras d’Emily, de glisser les électrodes sous son chemisier, de dégager les cheveux sur sa nuque pour y enfoncer l’aiguille…
Mais quand il alluma la caméra et retourna le sablier, Draken redevint aussitôt le thérapeute qu’il était. Concentré, attentif, méticuleux.
— Détends-toi. Détends-toi et laisse ta conscience s’ouvrir. Laisse-la te guider…
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