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Ce premier hiver passé en compagnie de Kaulin et du petit Wythnir s’écoula paisiblement. Bierfût recevait à intervalles réguliers des courriers de Tobin et de Ki, ainsi que d’Iya, qui partageait désormais son temps entre ses voyages et des incursions plus fréquentes à Ero. Quelques remarques d’aspect anodin suggéraient à bon entendeur qu’elle avait découvert des alliés dans la capitale, tous magiciens qui se montreraient plus utiles en demeurant où ils se trouvaient qu’en venant rejoindre Arkoniel au fort.

L’existence à la Cour faisait le fond des lettres des garçons, mais dans celles qu’écrivait Tobin se lisaient en sombre filigrane inquiétude et mécontentement. Korin faisait de plus en plus la bringue, les humeurs du roi étaient des plus imprévisibles, et les aînés des Compagnons traitaient leurs cadets comme des moutards.

En revanche, Ki racontait gaiement leurs sorties ou évoquait l’intérêt que leur manifestaient diverses donzelles. Arkoniel soupçonna que ce dernier point devait être beaucoup moins au goût du petit prince; les filles, il n’en soufflait mot, sauf pour signaler que l’une d’entre elles, avec qui ils s’étaient liés d’amitié, avait disparu dans des circonstances demeurées mystérieuses. Il ne fournissait que de vagues détails, mais le magicien eut l’impression désagréable qu’il subodorait qu’elle avait été assassinée.

Tandis que ce nouvel hiver s’achevait à son tour, l’attention d’Arkoniel se concentra tout autant sur ses hôtes que sur ses travaux. Ces derniers ne suscitaient guère qu’indifférence de la part de Kaulin qui, les qualifiant de « magie d’intérieur », préférait, quelque temps qu’il fasse, aller courir les bois. À peine installé à demeure, il s’était d’ailleurs si fort révélé du genre grognon qu’Arkoniel était tout sauf fâché de l’abandonner à lui-même.

Ce qui n’allait pas sans l’abasourdir, en revanche, c’était la négligence dont son collègue faisait preuve à l’endroit de Wythnir. Sans lui marquer véritablement d’aversion, il décampait souvent sans l’emmener, laissant à Nari le soin de s’occuper de lui comme s’il s’agissait d’un mioche ordinaire en manque de nourrice.

Arkoniel en fit l’observation à cette dernière un matin où elle s’activait dans le cabinet de travail avec son chiffon à poussière.

 « Ce n’est pas un problème, répliqua-t-elle. Moi, je suis bien contente d’avoir de nouveau un gosse sous mon toit. Et Créateur sait que ce pauvre petit, ça ne lui fait pas de mal d’être un peu dorloté. Il est à peine sorti des langes et, magicien-né ou non, n’a jamais eu une seule âme qui se soucie de lui. »

Arkoniel perçut un rien d’âpreté dans l’intonation. Il repoussa son journal de bord à demi rédigé sur un côté du bureau, pivota sur son siège et, relevant un de ses genoux, l’enlaça de ses doigts. « Il me semble bien que Kaulin le néglige un peu, mais, à leur arrivée, je ne lui ai pas trouvé si mauvaise mine que ça.

— Il ne crevait pas de faim, ça, je te l’accorde, mais tu as pu constater de tes propres yeux comment son maître se comporte avec lui. C’est tout juste s’il lui accorde un mot gentil de-ci de-là, quand il se donne seulement la peine de lui adresser la parole. Mais aussi, qu’en attendre d’autre ? Il ne l’a pris en charge que pour acquitter une dette.

— Comment le sais-tu !

— Hé ! mais parce que Wythnir me l’a raconté », répondit-elle avec un petit sourire suffisant qu’Arkoniel surprit tandis qu’elle s’attaquait au nettoyage des fenêtres. « Et que j’ai soutiré quelques détails de plus à Kaulin l’autre jour. Le pauvre gosse avait été salement maltraité par son premier maître, un pochard, voire pis, d’après les recoupements que j’ai faits. Même avec Kaulin, qui s’en fiche manifestement comme d’une guigne, son sort ne pouvait que s’améliorer. Mais rien d’étonnant s’il a toujours des allures de petit fantôme. » Elle épousseta un bougeoir en un tournemain. « Moi, ça m’est bien égal de l’avoir dans mes jambes, évidemment. Il ne me dérange aucunement. N’empêche qu’il est un magicien-né, et que vu la façon dont il s’est attaché à toi, tu pourrais peut-être t’intéresser un peu plus à lui, non !

— Attaché à moi ? Il ne m’a même pas dit un mot depuis qu’il est ici ! »

Elle secoua la tête. « Tu veux dire que tu ne t’es pas aperçu qu’il traîne toujours après toi et qu’il passe son temps à guigner la porte de ton cabinet de travail ? - J’avoue que non. En fait, je croyais qu’il ne m’aimait pas. »

Ses expériences antérieures avec Tobin n’avaient guère contribué à le guérir de sa timidité avec les mioches silencieux. « Chaque fois que je lui parle, il se fourre un doigt dans la bouche et se met à contempler ses pieds. »

Nari fit claquer son chiffon vers lui puis gloussa. « Pouh, ça, tu n’as qu’à t’y faire ! Et puis tu as pris de ces petits airs tellement bizarres et grincheux depuis le départ des garçons ...

— Pas du tout !

— Oh que si ! Nous, Cuistote et moi, ça nous est égal, mais lui n’est qu’un mouflet, et les mouflets, m’est avis que j’en sais plus long sur eux que toi. Fais-lui la grâce d’un sourire. Montre-lui un truc ou deux, et je te parie un sester que ça le réchauffera tout de suite. »

 

À la surprise d’Arkoniel, Nari remporta la mise. Tout en demeurant timide et muet, l’enfant s’éclaira de façon notable quand le magicien prit le temps de l’amuser avec l’un de ses tours ou le pria de le seconder pour accomplir de menues tâches. Il était toujours maigrichon, mais la bonne chère de Cuistote avait déjà coloré ses joues pâlichonnes et rendu quelque lustre à sa tignasse brune hirsute. La conversation restait malaisée ; il ouvrait rarement la bouche, à moins de question directe, et encore ne répondait-il que par de vagues marmonnements.

Dans le cabinet de travail, toutefois, il suivait d’un œil vif, attentif et solennel chacun des gestes que faisait Arkoniel. Un jour, pour des raisons connues de lui seul, il offrit à celui-ci de lui montrer comment s’y prendre pour faire un charme porte-bonheur avec un bouquet de crins de cheval et de thym séché. Ce n’était pas là le genre de choses qu’étaient capables, à huit ans, de réaliser la plupart des gosses, même magiciens-nés. Et il eut beau le tramer avec une certaine gaucherie, le résultat ne s’en montra pas moins d’une solidité à toute épreuve. Les sincères éloges qu’en fit Arkoniel lui valurent le premier sourire qu’il eût jamais vu sur les lèvres du garçonnet.

Après ce menu succès, Wythnir commença véritablement à s’épanouir. Il semblait tout naturel de lui apprendre, et quelques leçons suffirent à révéler que Kaulin avait bien mieux rempli son rôle que ne le présumait Arkoniel jusque-là. En moins d’un an passé en sa compagnie, le petit s’était déjà initié à la plupart des sortilèges usuels et des charmes à feu, et il savait une étonnante quantité de choses sur les propriétés des plantes. Du coup, Arkoniel en vint à soupçonner que ce n’était ni l’ennui ni le désappointement qui dictaient la singulière désaffection de Kaulin pour l’enfant, mais bien au contraire le ressentiment causé par des dons trop flagrants.

La découverte de la vivacité de Wythnir le rendit lui-même plus circonspect quant à ce qu’il pouvait se permettre de lui laisser voir de ses propres études. Les éléments de sorcellerie que lui avait enseignés Lhel étaient encore frappés d’interdit chez les magiciens indépendants. Aussi, tout en associant l’enfant chaque matin à ses travaux, réserva-t-il strictement les après-midi pour ses recherches solitaires.

 

Depuis que Ranaï lui avait fait don de son esprit, il s’était aperçu que certains types d’opérations - celles destinées notamment aux conjurations et transmutations - présentaient plus de facilité que par le passé. Son esprit voyait plus nettement les motifs magiques, et il se rendit compte qu’il était présentement capable de maintenir son œil en état visionnaire pendant près d’une heure sans se fatiguer. Peut-être fut-ce grâce à la vieille magicienne tout autant qu’à Lhel, mais toujours est-il qu’il réussit enfin à obtenir son premier succès dans ce qu’il appelait désormais par-devers lui son « charme d’embrasure ».

Il y avait pour le moins renoncé dix fois depuis qu’il avait entrepris de le concevoir, mais il avait tôt ou tard fini par se retrouver face à la vieille boîte à sel, s’efforçant désespérément de contraindre une pierre ou un haricot à entrer s’y matérialiser.

Wythnir était en train de balayer le cabinet de travail, un matin pluvieux de la fin Klesin, quand sa curiosité fut attirée par les grommellements d’Arkoniel, qui tentait à nouveau l’épreuve, et il s’approcha pour voir.

 « Qu’est-ce que vous êtes en train d’essayer de faire ? » Encore à présent, il ne parlait qu’à voix très feutrée, comme le novice d’un temple. Arkoniel se demandait souvent si quelques jours en la compagnie de Ki ne suffiraient pas à y remédier.

Il brandit le haricot récalcitrant. « Je veux le faire pénétrer dans la boîte, mais sans ouvrir le couvercle. » Le petit réfléchit un moment. « Pourquoi ne pratiquez-vous pas un trou dans la boîte !

Eh bien, c’est que cela irait à l’encontre du but poursuivi, vois-tu. Je veux dire que je pourrais tout aussi bien soulever le ... » Il s’arrêta pile, fixa l’enfant puis la boîte. « Je te remercie, Wythnir. Tu veux bien me laisser seul quelque temps ? »

 

Arkoniel s’abîma en méditations le restant de l’après-midi et la nuit suivante, assis en tailleur à même le sol. Au point du jour, il rouvrit les yeux et se mit à rire. Le motif magique lui était finalement venu, si simple à mettre en œuvre et si évident qu’il semblait inimaginable d’avoir pu passer si longtemps à côté. En fait si enfantin qu’il n’avait fallu rien moins qu’un enfant, comment s’en étonner ? pour signaler la solution.

Retournant à sa table, il y préleva sa baguette de cristal et un haricot puis se mit à fredonner les incantations de pouvoir qui l’avaient visité au cours de la nuit, tout en tramant successivement dans l’air, du bout de sa baguette, les paraboles lumineuses destinées à évoquer tourbillon, embrasure, voyageur, repos. Or, alors qu’il n’osait trop y croire, le motif complexe ainsi réalisé ne se dissocia pas, et il sentit le chatouillement froid d’énergie familier ruisseler de son front vers ses mains. Le motif étincela puis se résolut en une espèce de petite tache ténébreuse qui, aussi luisante et dense d’aspect que du jais poli, se tenait en suspens devant lui. La touchant en esprit, Arkoniel découvrit qu’elle tournoyait. Le phénomène le stupéfia au point de lui faire perdre sa concentration, et la tache s’évanouit en produisant un bruit semblable à celui d’un bouchon de pichet qui saute.

 « Lumière divine ! » Après s’être ressaisi, il retraça les divers éléments du motif. Une fois celui-ci fixé en l’air, il le soumit à une épreuve plus poussée qui le révéla aussi malléable que de l’argile sur un tour de potier. Il suffisait en tout et pour tout d’une pensée pour l’agrandir aux dimensions d’un dessus de futaille ou le rétrécir à celles d’un œil d’oiseau-mouche.

Il était au surplus instable mais facile à manipuler et se prêta tour à tour à toutes sortes de variantes. Une simple pensée permettait d’en modifier la position, de le faire se mouvoir tout autour de la pièce et de l’axer à volonté de la verticale à l’horizontale.

Finalement, démangé par le plaisir qu’il s’en promettait, le jeune magicien se représenta mentalement la boîte sans seulement la regarder et laissa tomber un haricot dans le petit maelström. Le haricot s’y engloutit comme une pierre dans une mare mais sans retomber de l’autre côté, et puis le trou se résorba sur lui-même et disparut avec son plop accoutumé de vulgaire bouchon.

Arkoniel considéra l’air désormais vide puis, rejetant sa tête en arrière, lâcha un cri d’allégresse qui fusa témoigner de sa jubilation jusqu’au camp de Lhel.

Wythnir, qui n’était à l’évidence pas allé plus loin que le seuil de la porte, entra en trombe. « Qu’y a-t-il, Maître ? Vous vous êtes fait mal ? »

À sa stupéfaction, le magicien l’enleva dans ses bras et l’entraîna dans une danse échevelée tout autour du cabinet de travail. « Tu es un porteur de chance, mon petit, tu sais ça ? Illior te bénisse de m’avoir mis la clef dans la main ! »

Et son hilarité de redoubler devant le sourire abasourdi du mioche.

 

Durant les quelques semaines suivantes, Arkoniel s’arma d’une poignée de haricots pour soumettre son invention magique à diverses épreuves. Il réussit à faire pénétrer des haricots dans la boîte à sel à partir de l’autre bout de la pièce, puis du corridor et, finalement, non sans émoi, par-delà la porte close du cabinet de travail.

Il fit aussi par inadvertance une découverte cruciale. S’il relâchait son attention ou précipitait les choses, s’il ne visualisait pas soigneusement le but ou ne se concentrait pas exclusivement sur son dessein, le malheureux haricot se volatilisait purement et simplement. Il renouvela maintes fois le test et fut aussi incapable de récupérer aucun de ceux qui s’étaient perdus que de découvrir où ils avaient bien pu passer.

Sans doute se retrouvent-ils pris au piège dans quelque espace intermédiaire entre le motif magique et leur destination première, nota-t-il le soir même dans son journal de bord. Il était près de minuit, mais il était beaucoup trop exalté pour aller s’inquiéter de fantômes. Cela faisait des heures qu’on avait fourré Wythnir au lit, mais Arkoniel continuait à laisser brûler les lampes, tout sauf désireux de s’interrompre quand les choses avançaient si bien. Il était néanmoins plus éreinté qu’il ne consentait à l’admettre.

Il se résolut à essayer d’expédier dans la boîte quelque chose de moins léger que les haricots habituels. Un plomb de pêche laissé par Tobin ou par Ki lui parut faire exactement l’affaire. Mais sa fébrilité lui fit effleurer par mégarde le disque noir, et sa main perçut distinctement comme une saccade lorsque le trou se referma. Pendant un moment, il ne put rien faire d’autre que contempler d’un air ahuri le seul vestige subsistant de son petit doigt, un moignon d’où giclait le sang. Le reste avait disparu, tranché net comme d’un coup d’épée juste au-dessous de la deuxième phalange. Malgré les élancements douloureux qui commençaient à le tourmenter, il demeurait là, pétrifié par l’incrédulité, les yeux attachés sur l’hémorragie.

La douleur ne tarda cependant guère à lui rendre sa présence d’esprit. Entortillant la plaie dans un pan de sa tunique, il fonça vers la table et ouvrit la boîte à sel. Le plomb s’y trouvait, intact comme escompté, mais une invraisemblable bouillie souillait les parois du récipient. La chair broyée des phalanges éclaboussait tout d’une purée sanglante. Les os n’avaient pas en revanche subi le moindre dommage, l’ongle non plus, qui gisait à côté du plomb comme un coquillage délicat.

C’est alors seulement que le frappa l’énormité de la sottise qu’il venait de commettre. S’effondrant sur le tabouret, il appuya son front sur sa main gauche. Il avait beau savoir qu’il lui fallait appeler à l’aide avant de s’évanouir et de se vider par terre de tout son sang, il mit un bon moment avant de pouvoir se contraindre à esquisser un mouvement.

Lhel m’avait bien dit de ne jamais toucher aux charmes de fenêtre, songea-t-il, pendant que le submergeait une vague de nausée. Ce n’était pas pour rien qu’elle avait montré tant de répugnance à l’initier à ce genre d’opérations magiques.

 

Vu la netteté de la blessure, il fut assez facile d’arrêter l’hémorragie. En quelques points, Cuistote sutura le bout du moignon, l’enduisit de miel puis l’enveloppa dans une poupée de tissu bien propre.

Arkoniel se chargea personnellement du nettoyage de la boîte à sel et, tout en se gardant de rien révéler à Kaulin ou à Wythnir quant aux circonstances de sa mésaventure, redoubla de prudence pour tenir tout le monde à l’écart de ses tentatives ultérieures.

Loin de refroidir son zèle, cependant, l’accident l’aiguillonna. Il consacra les quelques jours suivants à expérimenter le charme avec toutes sortes d’objets: une chute de parchemin, une pomme, une agrafe de manteau, une souris morte attrapée dans une tapette des cuisines. Seule s’en tira intacte l’épingle de métal. Du parchemin ne demeuraient que des miettes, mais non brûlées. Le cadavre de la bestiole et le fruit connurent exactement le même sort que le petit doigt sectionné; la pulpe et les pépins, la chair et les os les plus délicats n’étaient plus que chair à pâté mais le crâne décharné de la souris se présentait entier.

Ayant de la sorte établi que seuls les objets très solides supportaient le transfert sans dommage, il se lança dès lors dans des expériences relatives au poids et découvrit que l’expédition à travers le cabinet de travail d’un serre-livres en pierre sculptée ne réclamait pas plus d’efforts que celle des haricots. Satisfait par ce résultat, il retourna à ces derniers pour entreprendre des essais sur la distance.

Nari et les autres le regardèrent d’un drôle d’air quand il se mit à parcourir comme un fou tous les recoins du fort. À Wythnir, posté près de la boîte, incombait la tâche d’annoncer à pleins poumons du haut de l’escalier la survenue des petits voyageurs.

Si loin qu’il se trouvât du but, si nombreux que fussent les portes et les murs qui l’en séparaient, le résultat était immuable, Arkoniel n’avait qu’à imaginer un trou dans le flanc de la boîte elle-même et à se concentrer soigneusement, les haricots se débrouillaient pour gagner leur domicile.

Il essaya dès lors de leur assigner d’autres destinations. Le premier réussit à se rendre du cabinet de travail sur l’étagère aux offrandes de l’autel domestique. De là, le magicien le dépêcha dans le baril à farine de Cuistote - succès en l’occurrence assez salissant... - puis commença à l’envoyer se balader dehors.

Kaulin ne s’en montra pas le moins du monde impressionné. « Vois pas à quoi ça pourrait bien servir », renifla-t-il, pendant que son collègue récupérait l’un de ses haricots sur le tronc d’un saule, au bord de la rivière.

Arkoniel méprisa la remarque. Il dressait déjà mentalement une liste des endroits qu’il était capable de se figurer avec suffisamment de netteté dans telle ou telle ville pour focaliser sa magie sur eux.

 « Le hic, bien sûr, est que l’on ne puisse envoyer des lettres sur parchemin, grommela-t-il tout haut. Mais il doit exister un truc pour tourner la difficulté.

— Il vous serait possible de les écrire sur des bouts de bois, suggéra Wythnir.

— Pourquoi pas, en effet ? fit Arkoniel d’un ton rêveur. Voilà une excellente idée, petit. »

Non sans les avoir toisés d’un regard dédaigneux, Kaulin s’en fut flâner à ses propres affaires.