RENDEZ-VOUS AVEC LE DESTIN

Charlene Newcomb

9 ap. BY

Chronologie

Charlene Newcomb nous doit une ennéalogie de nouvelles, toutes parues dans le Star Wars Adventure Journal. Ces neuf nouvelles nous racontent l’histoire d’Alex Winger au fil des années.

Rendez-vous avec le Destin est la septième partie de cette série. Elle se déroule 9 ans après la bataille de Yavin et fait directement suite à Les Ombres des Ténèbres. Elle est parue dans le Star Wars Adventure Journal 6 en Mai 1995.

Sur Garos IV, Alex Winger a découvert des indices à propos d’une base de recherches secrète Impériale, et a appris qu’un de ses amis, le Docteur Carl Barzon, y est emprisonné. À cause de ses rêves récurrents, elle est convaincue qu’elle doit y aller seule…

Titre original : Rendezvous with Destiny

 

Les murs étaient d’un gris triste, dépourvus d’ornements. L’air confiné passait par un ancien système de ventilation. Cet endroit n’avait pas vu la lumière du jour depuis plus d’un millénaire.

Alex Winger posa ses coudes sur la table, prenant sa tête dans ses mains. Depuis combien de temps était-elle là ? Quatre heures ? Huit ?

Ses yeux bleus se posèrent sur le moniteur vidéo suspendu au plafond. Elle se demandait qui avait bien pu observer l’interrogation précédente et sa réaction à cet enfermement. Croiraient-ils son histoire ?

La porte s’ouvrit. Deux hommes, vêtus d’uniformes militaires de la Nouvelle République, entrèrent dans la pièce et s’assirent face à elle. Le lieutenant se remuait légèrement sur sa chaise – il était de toute évidence inexpérimenté. Le major arborait un visage inexpressif, et un regard fixe en direction d’Alex. Elle sentait qu’il restait sceptique quant à son histoire.

— Très bien, mademoiselle Winger, dit le major, prononçant soigneusement chaque mot. Dites m’en plus sur ce centre impérial de recherches secret.

Alex le regarda dans les yeux, essayant de masquer son impatience croissante. Elle expliqua calmement – probablement pour la quatrième fois – que l’un de ses amis, un chercheur du nom de Carl Barzon, avait été emmené de force dans la base secrète impériale. Et que du minerai, acheminé depuis son monde, Garos IV, était transporté ici. La localisation de la base restait obscure, protégée par le voile du secret impérial que ses compagnons de la résistance Garosienne n’étaient pas parvenus à pénétrer.

La voix du major était aussi froide que son regard.

— Et vous espérez nous faire croire que la fille d’un gouverneur impérial travaille secrètement pour la résistance de Garos IV ?

— C’est exact, dit-elle, tapant sur la table sous l’effet d’une frustration grandissante.

Soudain, elle entendit une voix familière l’appeler.

— Alex ?

Scrutant la pièce de droite à gauche, Alex se frotta les yeux. Des ordinateurs, des équipements de communications, et des écrans de toutes sortes faisaient clignoter un arc-en-ciel de couleurs dans la pièce faiblement éclairée. Tout ce qu’elle entendait, c’était le cliquetis des doigts sur les touches d’un clavier. Elle se trouvait dans le centre d’opérations de la résistance – sur Garos IV – à des années-lumière de cette salle d’interrogatoire de Coruscant qu’elle avait vue en rêve.

Son ami, un opérateur des communications répondant au nom de Wink Tasion, fronçait les sourcils alors qu’il transcrivait un message entrant. L’inquiétude sur son visage n’aurait pu être plus évidente. Mais il ne regardait pas son écran. Il regardait Alex.

— Est-ce que ça va ? lui demanda-t-il, interrompant sa transcription du message. On dirait que tu reviens de loin.

Alex soupira, esquissant un sourire à son égard.

— On peut dire ça, dit-elle, reposant son casque. Tu ne me croiras jamais, mais j’ai rêvé que j’étais interrogée par des agents des services de renseignements de la Nouvelle République !

Elle hocha la tête et afficha un grand sourire. Ils avaient du mal avec le concept d’une fille de gouverneur impérial travaillant pour les gentils.

Dans un gloussement, Wink se souvint de sa première rencontre avec la combattante de la liberté Alex Winger, dans ce même centre d’opérations. Il avait pointé son blaster sur elle jusqu’à ce que ses camarades le convainquent que la fille du gouverneur Tork Winger était effectivement un membre de la résistance de Garos. Ils en avaient souvent ri depuis.

— Vraiment ? dit-il en signe moquerie. Eh bien, tu dois admettre que ça a l’air un peu tiré par les cheveux.

Le sourire d’Alex disparut et elle posa un regard vide sur son écran.

— Comment arriverais-je à les convaincre que je dis la vérité ? demanda-t-elle, ignorant sa raillerie.

— Tu n’es pas seule dans ce cas, Alex, lui rappela-t-il.

Mais Alex ne semblait pas l’écouter.

— Nous n’avons simplement pas beaucoup de temps, dit-il calmement.

Une image lui revint à l’esprit – deux silhouettes, deux mains se rejoignant, le vent soufflant très fort, des mains qui se séparent, la chute… Non !

— Hein ? Qu’est-ce que tu veux dire ? demanda Wink.

Il vit le regard distant dans ses yeux.

Elle soupira, hochant la tête.

— C’est juste un sentiment que j’ai eu.

Wink se retourna vers son moniteur.

— Ton rêve est peut-être un signe, Alex. Regarde ce message que je viens de recevoir.

Alex se pencha vers lui pour lire l’écran. Ses sens frissonnèrent d’appréhension. L’un de leurs opérateurs au pub Chado leur rapportait une conversation intéressante sur un vaisseau qui devait transporter des équipements au spatioport.

— Hmm. Capitaine du Star Quest… Ce ne serait pas le cargo léger Suwantek posé dans la baie numéro trois ? demanda-t-elle à Wink.

— Celui-là même, lui dit-il.

Les marchands libres étaient de plus en plus présents au spatioport d’Ariana depuis la défaite du grand amiral Thrawn. Avec la flotte Impériale en désordre, ces marchands indépendants étaient engagés pour transporter des équipements supplémentaires au centre impérial de recherches. Alex et ses amis de la résistance furent pleins d’espoir en apprenant que l’existence de cette opération serait bientôt connue de la Nouvelle République – peut-être par le biais d’un contact, comme le capitaine de ce cargo léger.

— Je vais jeter un œil, dit Alex.

— J’en informerai Paca.

Alex hocha la tête, jetant un œil à son chrono qui affichait 0200 heures.

— Non, ne le dérange pas, répondit-elle. C’est probablement une autre fausse piste.

— OK, dit-il alors qu’elle se levait pour quitter la pièce. Hé, Alex ?

— Oui ? Elle le vit en train d’étudier son visage.

— Bonne chance, dit-il. Que la Force soit avec toi.

Alex se demandait si Wink savait qu’elle prévoyait de faire plus que simplement « jeter un œil » à l’équipage de ce vaisseau. Elle n’avait jamais parlé de ses visions de la montagne enneigée qui abritait cette base secrète impériale. Quelque chose, ou quelqu’un, l’encourageait à y aller. Elle devait y aller. C’était son destin.

Hochant la tête à l’attention de son camarade, Alex se dirigea vers les tunnels de la résistance. Elle avait un pressentiment quant à ce vaisseau cargo. Un pressentiment qui disait que ce n’était pas seulement un vaisseau de plus réquisitionné par l’Empire.

Des yeux roses et des antennes hauts perchées étudiaient les écrans sur une douzaine de panneaux différents dans l’habitacle du pilotage du Star Quest. Satisfait en apprenant qu’ils étaient arrivés à la bonne destination, le capitaine Tere Metallo tira le levier de l’hyperdrive et regarda les lignes stellaires se transformer en points lumineux distincts. Trois heures plus tôt, leur cargo avait quitté Garos IV chargé d’équipements en tout genre. Leurs ordres leur stipulant de se rendre à ces coordonnées, leurs instructions étaient simplement d’attendre l’arrivée du contact.

Saisissant son datapad, Metallo fit un rapide scan du virus qu’elle libérerait dans le réseau informatique impérial de Sarahwiee – sa petite contribution en tant que renforts des commandos de Paca. Elle esquissa un petit sourire, parcourant pensivement du doigt la cicatrice qui traversait son visage…

Gil Crosear, le camarade de Metallo, se glissa discrètement dans le cockpit. Metallo avait compris, il y a longtemps, que sa capacité étonnante à se déplacer furtivement était un talent que le jeune homme possédait par nature. Après quatre ans de travail avec Gil, il y avait des fois où elle ne pouvait même pas le repérer dans une foule.

Scannant le vide tout autour d’eux, Gil tapa d’impatience sur l’un des détecteurs longue portée du vaisseau.

— D’accord, où sont-ils ? demanda-t-il finalement.

Ses yeux sombres se déplaçaient rapidement entre les panneaux et les espaces entre les verrières.

Metallo se rassit sur son siège, faisant tournoyer doucement ses doigts maigres autour de sa natte argentée longue d’un mètre qui partait de sa tête. Sa « scantenne », telles que Gil appelait ses senseurs naturels, captèrent un pouls en accélération. La patience était une vertu que Gil ne maîtrisait toujours pas.

— Relax, Gilly, lui dit-elle gentiment. Ils vont venir.

Gil prit une profonde inspiration et écarta une mèche noire de son visage.

— À quelle distance se trouve l’autre équipe ? demanda-t-il.

— Un point trois heures.

— Alors, dit Gil, pointant du doigt le datapad dans la main de Metallo, tu penses que ce virus balayera tout ce que les bombes de Page n’auront pas vaporisé ?

Metallo hocha la tête.

— Sans aucun doute, répondit-il.

— C’est une mission de ravitaillement étrange, capitaine, dit Gil, tapotant soigneusement les touches d’un panneau afin de modifier ses détecteurs. Rester planté au milieu de nulle part, dit-il d’un air agacé.

Adressant un clin d’œil à son partenaire, les antennes de Metallo tressaillirent légèrement. Bien qu’elle tente de le cacher, Gil était bien plus énervé que lors de leurs précédentes missions.

— Selon les rapports du commandant, c’est la procédure standard, le rassura-t-il.

— Le commandant ? demanda une voix à l’arrière de l’habitacle de pilotage. Metallo et Gil se tournèrent au même moment. Deux blasters se pointèrent sur le jeune passager clandestin. Puis tout à coup, une alarme retentit dans le Star Quest.

— Ce sont eux que vous attendez ? demanda calmement Alex, pointant du doigt le croiseur impérial de classe Strike qui sortait d’hyperespace à environ 1 000 kilomètres d’eux.

— Bon sang, qui êtes-vous ? demanda Metallo, utilisant sa langue natale de Riileb.

— Je m’appelle Alex, leur dit-elle. Vous ne pensez pas que vous devriez répondre à ce signal ?

Gil avait les yeux écarquillés, son blaster pointé vers Alex, alors que Metallo éteignait l’alarme de proximité. Pressant un interrupteur sur le panneau de commande, elle prit la parole :

— Ici Tere Metallo, capitaine du Star Quest.

— Transmettez le signal de reconnaissance, Star Quest, répondit une voix autoritaire à l’autre bout du canal de communication.

— Transmission en cours, répliqua Metallo, fixant Alex du regard.

Son antenne vacilla imperceptiblement, évaluant la jeune femme qui regardait par-dessus l’épaule de Gil. Elle ne décela aucun signe de détresse. Juste un calme résolu. Et cela la surprit. Au lieu de s’inquiéter pour leur couverture, elle était bien plus préoccupée par ce nom… Alex. Elle ne l’avait utilisé que pour une femme. L’un de ses compagnons, Matt Turhaya, avait autrefois parlé d’une jeune fille qu’il avait perdue lors d’un raid impérial. Son nom était Alex.

— En attente de nouvelles coordonnées, Star Quest.

La voix sévère interrompit la réflexion de Metallo.

— Quand vous voulez, répondit-elle.

— Transmission en cours.

Metallo vérifia ses écrans alors que leur nouvelle destination était transmise à l’ordinateur de bord du vaisseau.

— Transmission reçue. Star Quest, terminé, répondit-elle.

Éteignant les communications, Metallo reporta toute son attention sur leur invitée surprise. Elle savait que cette femme était plus importante qu’elle n’en avait l’air.

— Que faites-vous à bord de mon vaisseau ?

— Je fais partie de la résistance de Garos IV, leur dit Alex.

Les sourcils de Gil se soulevèrent derrière ses dreadlocks noires. Il jeta un regard vers Metallo. Ses yeux étaient toujours rivés sur Alex.

— On a attendu quelqu’un comme vous pendant si longtemps, continua Alex.

— Attendu ? demanda Metallo.

— La Nouvelle République…

— Une minute ! Qui a parlé de la Nouvelle République ? Nous sommes payés pour transporter des équipements pour l’Empire, insista Gil, tout juste conscient d’après l’expression sur le visage d’Alex que toute subterfuge serait vain.

— L’Empire vous paiera peut-être, répondit Alex, mais j’ai surpris l’une de vos conversations, et je sais où va votre loyauté.

Metallo demeurait indifférente.

— Continue, dit-elle à Alex.

— Voyons voir... dit Alex. Le commandement a dit que c’était une procédure standard, l’autre équipe est devant, des bombes, des virus informatiques… On dirait que vous prévoyez de livrer plus que des équipements impériaux.

— Ça n’explique toujours pas pourquoi vous êtes là, dit Gil.

— L’un de mes collègues a été arrêté sur Garos. Ils le forcent à travailler dans un centre de recherches, dit Alex, regardant Metallo attentivement. Je vous en prie, capitaine, je veux simplement le sortir de là.

Metallo sonda Alex à l’aide de son antenne… pouls régulier, pression sanguine normale… La fille semblait dire la vérité. Se souvenant du briefing que les commandos avaient fait sur Garos IV, Metallo savait que des activités résistantes avaient été rapportées sur la planète.

— Vos supérieurs sont-ils au courant de cette petite escapade ?

Alex fuyait le regard de Metallo.

— Pas vraiment, répondit-elle.

Gil secoua la tête en signe d’incrédulité, et Metallo remarqua qu’il était plus détendu qu’avant.

— Tu veux dire que tu as décidé d’y aller seule ? demanda-t-il.

Alex observa Gil et Metallo tour à tour.

— J’ai le sentiment de devoir le faire, dit-elle. Je ne peux pas l’expliquer. Elle jeta un œil à travers la verrière. Il semble que le temps passe vite, dit-elle calmement.

Metallo observait la jeune femme, frappée par le ton dans la voix d’Alex et par son regard. Quelque chose chez elle lui rappelait l’expression que Luke Skywalker arborait pendant les briefings de mission. Il y avait quelque chose dans son regard à elle aussi… Cette sensation d’urgence, l’appréhension quant à l’idée de dévoiler un autre secret de l’Empire. Même après tout ce qu’il avait traversé ces dernières semaines, tout ce que Gil dit fut :

— On doit y aller.

— Tu as pris un gros risque, fillette, dit Metallo. Et si nous avions été des partisans de l’Empire ?

— Eh bien… Alex hésita, je suppose que je me serai présentée comme la fille d’un gouverneur impérial.

Les yeux roses de Metallo s’écarquillèrent.

— Mignonne, dit-elle. Vraiment mignonne.

— Pas une mauvaise idée, dit Gil en gloussant. Juste une jeune rebelle partant en balade, hein ?

— Ouais, dit Alex, poussant un soupir de soulagement, quelque chose comme ça.

— Alors… tu as un plan pour sauver ton ami ? lui demanda Metallo.

— Eh bien, j’ai quelques idées pour contourner la sécurité, leur dit Alex.

Gil gloussa à nouveau, un large sourire se dessinant sur son visage. Une chose est sûre, elle a du cran ! pensa-t-il.

Alex esquissa un sourire pour la première fois de la journée. Metallo fronça les sourcils, mais Gil avait raison. Son attitude forçait l’admiration. Elle posa les yeux sur l’ordinateur de bord. Ils devaient se mettre en route.

— Gil, vérifie ces coordonnées, dit-elle à son partenaire.

— J’ai l’impression que nous sommes sur la bonne route, capitaine, dit-il, vérifiant leur itinéraire.

— Nos cartes stellaires n’indiquent aucune planète dans le secteur. Mais, connaissant l’Empire, je parie qu’on va tomber sur un complexe de recherches secret.

Metallo hocha la tête, étant tout à fait d’accord.

Alex tapota gentiment l’épaule de Metallo.

— Capitaine ?

— Oui ?

— Je ne poserai aucun problème, lui dit Alex. Et je n’interférerai pas avec votre mission.

— C’est sûr, fillette, répondit Metallo. Allez, on y va. On a une mission à accomplir. Elle leva les yeux vers les étoiles. Et notre amie résistante de Garos va devoir répondre à quelques questions.

Seules trois planètes orbitaient autour de la naine blanche que l’Empire avait baptisé Bseto. Bseto I et Indikir n’abritaient aucune vie humaine. La ceinture d’astéroïde Lweilot faisait quatre-vingt dix millions de kilomètres de large, sur une orbite jadis occupée il y a un millénaire par les planètes avoisinantes. Puis il y avait Sarahwiee. C’était un monde entièrement couvert de neige. Des continents neigeux s’élevaient au-dessus des océans glaciaux – un endroit vraiment inhospitalier.

Mais même à plusieurs milliers de kilomètres de là, la présence de l’Empire était difficile à rater.

— Destroyer stellaire, dit Alex.

— Voilà notre croiseur de classe Strike posé dans le hangar, indiqua Gil alors que le Star Quest était scanné par les senseurs.

Quelques secondes passèrent avant qu’ils ne reçoivent l’autorisation d’approcher de la planète. Une fois les coordonnées entrées, le vaisseau plongea à travers la couche supérieure de l’atmosphère de Sarahwiee.

— Regardez-moi ça, dit Gil.

— Magnifique, murmura Metallo.

Les derniers rayons de soleil faisaient briller un glacier alors que le Star Quest effectuait sa descente. Des canyons de glace s’élevaient majestueusement dans le ciel. Ici et là, des morceaux de parois glaciales se détachaient, s’écrasant dans le lit d’une rivière miroitant la lueur de la lune.

Alex ne pouvait en détourner son regard, impressionnée par la vue imprenable. Puis elle s’agrippa davantage au siège du copilote. Elle vit la montagne – cette même montagne couverte de neige qu’elle avait vue dans ses visions…

— Alex, prend ma main ! L’homme aux cheveux bruns et aux yeux bleus hurlait afin de couvrir le son du vent hurlant. Il attrapa sa main…

Poussant un soupir, Alex ferma les yeux, préférant ne pas savoir comment cela finirait cette fois-ci. Pendant un bref moment, elle sentit une présence apaisante. Mais cette présence s’évanouit lorsqu’elle ouvrit à nouveau les yeux et surprit Metallo en train de la fixer. Alex eut un sourire, hochant la tête à l’attention du capitaine. Durant leur voyage qui avait duré deux jours, ils s’étaient entretenus sur des centaines de sujets. Mais elle ne lui avait jamais révélé ses visions.

— OK, capitaine, je l’emmène, dit Gil.

À travers de fins nuages, la garnison impériale apparaissait au sommet de la montagne. Avec la lune pour seul éclairage, son ombre baignait d’obscurité l’un des versants de la montagne, dissimulant des rochers couverts de neige ainsi qu’un commando de la Nouvelle République.

— OK, vous êtes prêts à faire la fête ? demanda Metallo alors que le Star Quest atterrissait délicatement dans l’une des baies de lancement creusée dans le flanc de montagne, à plusieurs centaines de mètres sous la garnison.

— Prête, dit Alex, en hochant la tête.

— Allons-y.

Alors qu’ils descendaient le long de la rampe d’embarquement, un esquif de transport émergea de l’ancien cargo Corellien stationné à côté du Star Quest. L’esquif s’enfonça dans la baie vers le monte-charge où un soldat impérial montait la garde, son blaster collé à sa poitrine. À l’autre bout de la baie, un cargo léger Kazellis était garé. Alex remarqua le bref échange entre Metallo et Gil, ainsi que l’expression sur le visage de Gil qui suggérait qu’il connaissait le vaisseau – le cargo de l’autre équipe, se dit-elle.

De lourdes portes protégées par un bouclier déflecteur se refermèrent derrière eux dans un bruit assourdissant. Tirant le col dans sa veste, Alex tenta d’éloigner le vent glacial qui balayait le hangar.

— Regardez là-haut, murmura Gil dans sa barbe.

Alex hocha la tête, jetant nonchalamment un œil dans la direction qu’il avait indiquée. Surplombant la baie entière, deux techniciens occupaient la salle de contrôle équipée de vitres en transparacier. Il est pourtant tard, se dit Alex.

De l’autre côté du cargo Kazellis, la porte d’un turbo-ascenseur s’ouvrit. Un officier impérial monta à bord d’un speeder à l’arrêt, faisant signe au pilote de démarrer. Longeant des rangées d’esquifs de transport, le speeder s’arrêta finalement à mi-chemin entre le Star Quest et le cargo Corellien.

Le conducteur du speeder observa Metallo, dont la taille et la silhouette dépassait celles de ses compagnons. Le passager qu’il transportait, un jeune lieutenant, attendit – non sans impatience – que Metallo et son équipage s’approchent. Mettant pied à terre, il jeta un œil à Metallo. Puis, avec toute l’autorité qui lui était confiée, il s’adressa à Gil.

— Capitaine Metallo ? demanda-t-il.

Gil esquissa un sourire et pointa son doigt en direction de Metallo. Son visage était impassible. De toute évidence, elle avait l’habitude que des officiers impériaux supposent que Gil était le capitaine du Star Quest. Mais Alex pouvait sentir qu’elle était plus amusée que vexée. Il semblait savourer la gêne du jeune homme.

— Lieutenant, dit Metallo en fronçant les sourcils à son attention, caressant lentement du pouce la cicatrice sur son visage, quel est le programme ?

L’officier hésita une seconde, regardant Metallo dans ses yeux roses et calculateurs.

— Je suis l’officier en chef Cdera, dit-il. Deux vaisseaux sont arrivés avant vous, capitaine. Le déchargement de votre vaisseau est prévu à 0300 heures.

— Excellent. Je suis sûr que vous vous débrouillerez très bien sans nous.

— C’est exact, capitaine, dit le lieutenant, esquissant un sourire sarcastique.

Il ne dissimulait même pas l’aversion qu’il ressentait à l’égard des capitaines de cargo impudents.

— Y a-t-il un lieu ici où mon équipage pourrait se relaxer ? demanda Metallo, scrutant la baie alors qu’un second esquif sortait du cargo Corellien.

— Votre équipage n’a accès qu’à ce niveau, capitaine. Il y a un bar, dit Cdera, pointant du doigt un couloir qui passait sous la seconde salle de contrôle. Peut-être vous et votre équipage y trouverez une occupation, dit-il, esquissant une grimace à l’égard d’Alex et de Gil en plein milieu de sa phrase.

— Je suis sûr que l’on trouvera quelque chose, lieutenant, répondit Metallo.

Cdera adressa un regard froid à Metallo, puis se tourna brusquement d’une façon militaire et remonta à bord du speeder. Il marmonna quelque chose au conducteur pendant que le speeder s’éloignait.

Metallo haussa les épaules. Elle venait d’assister à un spectacle intéressant, mais le lieutenant n’avait pas du tout été impressionné.

— Je suis impressionnée, capitaine, répondit Alex aux pensées de Metallo, bien que celle-ci ne les ait pas dites.

— Hein ? Comment est-ce que…

— Capitaine, l’interrompit Alex, il y a une station d’ordinateurs de l’autre côté du vaisseau.

— Deux techniciens chargeant le cargo Corellien dans la baie numéro deux, capitaine, remarqua Gil. Alex devrait pouvoir les utiliser pendant quelques minutes.

— Garde un œil sur ce soldat impérial, Gil. Fillette, dit Metallo à Alex, tu viens avec moi.

En une minute, Alex était parvenue à s’introduire dans la base de données des ordinateurs. Des fenêtres s’affichèrent à l’écran, révélant le plan de la garnison. Alex fit défiler des quantités d’informations pendant que Metallo l’observait.

— J’espère que tes amis connaissent l’existence des points de contrôle de ce complexe, lui dit Alex.

— Ne t’inquiète pas pour mes amis. Tu as trouvé le Docteur Barzon ? demanda Metallo.

— Niveau 18, salle 14E, répondit Alex, coupant le système.

— OK, dit Metallo, faisant le guet.

Son regard se posa sur Gil. Il était évident qu’elle prenait soin de lui, un peu comme une mère.

— Tout va bien se passer, capitaine, dit doucement Alex, sentant l’inquiétude de Metallo. Je surveillerai Gil.

Metallo se racla la gorge. Elle se retourna vers Alex, cachant ses émotions derrière un masque teinté de sévérité.

— Souviens-toi, fillette. Tu as trois heures pour revenir au vaisseau.

Alex étudia le visage de la femme. Son air sévère disparut, remplacé par un sentiment de confiance qui grandissait entre elles depuis qu’elles s’étaient rencontrées.

— Veille à ne déclencher aucune alarme, ajouta Metallo avec un sourire sournois. Alex esquissa un sourire.

— Promis, répondit-elle.

Metallo fit une pause, puis hocha la tête pour lui signifiait qu’elle avait confiance en elle.

— Bonne chance, Alex.

— Capitaine Metallo ?

— Oui ?

— Que la Force soit avec nous.

Metallo était assise, l’air impassible, épiant ses adversaires. C’était la meilleure main de Sabacc qu’elle obtenait depuis le début de la soirée. Heureusement pour elle, le technicien en fin de service et les deux Corelliens ignoraient les talents polygraphiques des Riilebs – ou ils l’auraient déjà accusé de tricherie !

La conversation qui animait la table voisine s’était intensifiée avec les heures, mais Metallo était concentrée sur son jeu. Personne n’aurai pu deviner qu’elle connaissait la jeune femme pilote qui racontait des histoires fantastiques à l’autre technicien.

Sirotant une gorgée de sa bière, Metallo scrutait les moindres faits et gestes du vieux corellien Sapra, certaine qu’il avait un bon jeu. Après que la dernière carte fut distribuée, son cœur sembla exploser. Vérifiant son propre jeu, elle dissimula un sourire. Un 11 lui offrirait les points dont elle avait besoin pour remporter la partie. Mieux encore, le commandeur lui donnerait un parfait 23.

Gil fit un clin d’œil discret à Metallo de l’autre côté de la pièce, et prit Alex par la main. Les dernières cartes furent distribuées aux joueurs. Les paris étaient faits, et le dealer pressa le hasardeur. Les valeurs des cartes se matérialisèrent. Metallo le tenait enfin ! Elle poussa un cri strident et toutes les têtes de la salle se tournèrent vers elle. Sapra jeta ses cartes hors de la table, alors que l’arbitre annonçait le total des points. Le timing n’aurait pu être mieux s’il avait été planifié de cette manière – ce qui était le cas. Personne n’avait remarqué le départ de deux jeunes gens.

De l’autre côté du couloir, après la porte qui menait à la salle de contrôle un étage au-dessus, Alex et Gil se glissèrent furtivement dans une salle de stockage. Alex localisa, dans un coin de la pièce, le panneau d’accès qu’elle avait vu en étudiant les schémas de la garnison.

En silence, ils rampèrent à travers le système de ventilation. Des voix distantes résonnaient par-dessus le bruit de la machinerie du tunnel artificiel. Le bruit se transforma en un vrombissement alors qu’ils passaient à proximité de la cage du turbo-ascenseur des niveaux supérieurs de la garnison.

— On a de la chance, chuchota Gil, pointant du doigt la cage d’ascenseur qui s’était arrêtée à moins d’un mètre juste en dessous d’eux. Prête ?

Alex hocha la tête, saisissant les mains de Gil. Gil la fit descendre sur la cage d’escalier puis sauta discrètement à son tour. De ses mains gantées, il posa une charge à retardement sur le sol de l’ascenseur – cette explosion coïnciderait avec une autre que l’équipe de Page créerait dans d’autres sections de la garnison.

Alex le regarda programmer l’explosion sur quarante-huit minutes. Prenant une profonde inspiration, elle tenta de se détendre. Quarante-sept minutes. Un frisson lui parcourut l’échine.

— Quelqu’un vient, dit-elle, bien que plusieurs secondes eurent le temps de s’écouler avant que Gil n’entende des bruits de pas.

La porte sous leurs pieds s’ouvrit, et deux passagers montèrent à bord. Le turbo-ascenseur commença à monter, coincé dans un tunnel de roche creusé dans la montagne. Les murs d’acier remplacèrent ceux de roche alors que la cage d’ascenseur arrivait au niveau de la garnison. Gil essayait de compter les étages qui défilaient. Mais à cette vitesse, ils devenaient difficiles à distinguer. Le turbo-ascenseur s’arrêta enfin.

Alors que la porte s’ouvrait en dessous d’eux, Alex sauta de la cage jusqu’à un conduit horizontal.

— Allez, murmura-t-elle à Gil.

Gil se retrouva suspendu au conduit par les mains alors que le turbo-ascenseur disparaissait sous ses pieds.

— Une aide ne serait pas de refus, lui dit-il à vois basse.

Alex tendit la main, et pendant un instant elle se souvint de la vision qu’elle avait eue… une main tendue vers elle pour la sauver, exactement comme elle le faisait pour aider Gil. Gil pouvait-il être l’homme de ses visions ? Gil, avec ses cheveux et ses yeux noirs, ne ressemblait en rien à l’homme de ses visions.

Mais si ce n’était pas Gil, alors qui était-ce ? Le trouverait-elle ici ? Une fois qu’elle eut hissé Gil à l’intérieur du conduit, ils reprirent leur parcours.

— Une idée de l’endroit où l’on est ? lui demanda-t-elle.

— On doit monter encore de quelques étages. Et je pense, fit Alex en indiquant un couloir de maintenance vertical, que j’ai trouvé un passage.

Vingt-cinq mètres plus haut, ils arrivèrent au niveau 18 en passant par une salle de maintenance. En silence, ils traversèrent le couloir en direction de la pièce où Barzon était retenu.

— Voilà, on y est, dit Gil.

Il n’y avait aucun code de sécurité sur le panneau d’accès de la porte – ce qui était inattendu, bien que sans surprise. Le climat rude des montagnes de Sarahwiee suffisait à dissuader quiconque penserait à s’échapper de cet endroit.

Alex pressa un interrupteur sur le panneau et la porte s’ouvrit. Prudemment, ils entrèrent à l’intérieur de la pièce sombre.

— Qui est là ? demanda un homme caché dans la pénombre.

La froideur dans sa voix correspondait parfaitement à la température de la petite pièce.

— Docteur Barzon ? demanda Alex doucement. C’est moi, Alex.

Une lumière s’alluma.

— Alex ? (Carl Barzon arborait déjà une barbe grisonnante). Comment diable es-tu arrivée là ? demanda-t-il en regardant Gil.

— On en discutera plus tard, lui dit-elle. Je vous présente Gil, un ami qui travaille pour la Nouvelle République.

— Nous n’avons pas beaucoup de temps, docteur, dit Gil. Nous devons sortir d’ici.

Barzon détourna le regard, essayant de dissimuler son air tourmenté.

— Je ne peux pas partir, dit-il. Ils tueront mon fils.

Dehors, le vent hurlait. La pièce semblait plus froide qu’avant. Alex prit les mains de Barzon. Le souvenir de ce jour fatal sur Garos IV envahit ses pensées.

— Cord est mort, docteur. Nous avons essayé de vous prévenir avant que vous ne soyez arrêté…

— Avant que je sois arrêté ? Qu’est-ce que tu veux dire ?

— Je… je suis désolée. J’étais au centre minier. J’ai saboté la plateforme d’atterrissage, lui dit Alex, luttant pour trouver un meilleur moyen de dire à son ami ce qui s’était passé. Je… elle fit une nouvelle pause, et des larmes emplirent ses yeux. Je les ai vus emmener Cord au turbo-ascenseur. Je ne savais pas qu’ils comptaient l’emmener à la plateforme…

Carl Barzon secoua la tête, et prit Alex dans ses bras.

— Oh, Alex ! hurla-t-il.

— J’aurais pu les arrêter, docteur…

Barzon la regarda dans les yeux. Il était conscient de l’angoisse qu’elle avait connue.

— Non, Alex, je ne pense pas. (Il sécha ses larmes doucement.) Je te connais bien, Alex Winger. Sauver Cord aurait compromis tout ce que toi et nos amis de la résistance avaient fait.

Elle hocha la tête. La liberté ne pouvait se conquérir sans sacrifice. Elle s’était dis ça des milliers de fois depuis la mort de Cord. Mais l’entendre de la bouche du père de Cord, son ami, lui offrit enfin la paix de l’esprit.

Gil ne dit pas un mot. Il n’en avait pas besoin. Le regard de Gil se posa d’abord sur Alex puis sur Barzon, et revint enfin sur Alex. Il lui adressait un regard accusateur.

— Tu aurais du nous le dire, Alex !

— Gil, tout ce que je vous ai dit est vrai. J’ai omis un petit détail, est-ce que c’est si grave ?

— Un petit détail ! Ce n’est pas un petit détail, Alex ! hurla-t-il. Il se retourna, tentant de maîtriser sa colère. Bon sang ! Je pensais que tu plaisantais lorsque tu disais que tu te serais présentée comme la fille d’un gouverneur impérial, grogna-t-il sur un ton sarcastique.

— Je suis désolé, Gil, dit-elle, sentant qu’il était plus blessé que furieux. J’aurai dû vous faire confiance.

— Ouais, tu aurais dû, répliqua-t-il. D’autres surprises ? Laisse tomber, s’interrompit-il avant qu’elle n’ait une chance de parler. Je ne veux pas le savoir. On doit sortir d’ici, dit-il à voix basse.

— Oui, dit Barzon. Je n’ai plus aucune raison de rester ici. En fait, Gil, j’ai des informations qui intéresseraient probablement vos amis. Mais je dois récupérer certains fichiers dans mon labo.

— Ce n’est peut-être pas une bonne idée, docteur, dit Gil. C’est trop dangereux et il nous reste peu de temps. (Il regarda Alex.) Tu as entendu ce que le capitaine Metallo a dit, Alex. On récupère le docteur et on retourne au vaisseau.

Alex observa tour à tour Gil et Barzon.

— Peut-on accéder aux fichiers d’ici ? demanda-t-elle au docteur.

— Non, ce sont mes notes privées. Des recherches que je n’ai pas osé entrer dans la base de données impériale, dit Barzon.

Gil hocha la tête.

— Alex, si on croise le commando dans le labo…

— C’est bon, Gil. (Quelque chose lui vint à l’esprit.) Je dois aller là-bas, dit-elle calmement. Ramène le Docteur Barzon au Star Quest.

Gil la regarda en silence, puis hocha finalement la tête en signe d’accord.

Quelques minutes plus tard, ils se séparèrent. Gil lui fit un signe du pouce avant de disparaître avec le Dr Barzon dans la salle de maintenance d’où ils étaient arrivés. Alex se retourna, traversant à nouveau le couloir jusqu’à turbo-ascenseur. Elle pressa le bouton d’appel et vérifia son chronomètre. Le temps jouait contre eux.

Bien avant que les portes du turbo-ascenseur ne s’ouvrent au niveau 23, Alex eut le pressentiment que quelqu’un l’attendait. Alors qu’elle sortait du turbo-ascenseur, elle vit un homme se tenir dans l’embrasure d’une porte à mi-chemin du couloir. La lumière venant du labo décrivait sa silhouette, son visage était dissimulé dans l’obscurité. Mais elle pouvait sentir qu’il semblait la reconnaître.

— J’ai senti ta présence, dit-il calmement, faisant un pas en avant.

Alex hocha la tête et s’avança vers lui, persuadée que c’était là l’homme qu’elle était destinée à rencontrer.

— Vous étiez dans mes visions, lui dit-elle.

Il esquissa un sourire.

— L’escalade de la montagne ?

Ainsi, il avait eu les mêmes visions.

— Oui, dit-elle, alors que l’un de ses camarades émergeait du labo.

— Nous en avons terminé, ici, Luke, dit l’homme. Le lieutenant Page vient d’émettre le signal depuis l’entrepôt. Lui et Lilla se dirigent vers la baie de lancement.

— Bien. Merci, Korren, dit Luke. Vous et les autres partez devant. On vous rejoindra, moi et Alex.

Luke ? Les yeux d’Alex s’écarquillèrent.

— Luke Skywalker ? demanda-t-elle.

Luke hocha la tête.

Alex n’avait jamais pu mettre un nom sur ce visage qu’elle avait vu dans ses visions. Elle n’avait pu connaître la nature des ses pouvoirs. Sa destinée était-elle liée à la sienne ?

— Il reste très peu de temps, Alex, dit-il.

Alex perçut la détresse dans sa voix. Elle sonda ses yeux bleus. Des yeux qui semblaient irradier de fatigue. Et au-delà de la fatigue, elle sentait quelque chose d’autre dans son esprit. Quelque chose semblait le hanter. Quelque chose, ou quelqu’un, qu’il devait affronter. L’obscurité s’intensifia, et Alex fit un pas en arrière, effrayée par les nuages noirs tourbillonnant qui menaçaient de l’engloutir.

Luke tendit sa main gantée vers elle.

— Souviens-toi, Alex, le Côté Obscur le Force se nourrit de nos peurs. Reste calme. Sois en paix, dit-il calmement. C’est la voie des Jedi.

Ses mots semblaient familiers. Elle les avait entendus dans ses visions. Ils faisaient partie d’elle-même.

— Je comprends, dit-elle, agrippant fermement sa main.

— Tu es puissante dans la Force, Alex…

Whoosh ! La porte du turbo-ascenseur s’ouvrit à l’autre bout du couloir. Deux soldats impériaux en sortirent, assignés à une routine de vérification des labos.

— … et le lieutenant a dit que… dit un soldat impérial avant de s’interrompre en surprenant Luke et Alex. Hé, que faites-vous ici ? hurla-t-il, pointant son blaster en direction des intrus.

Alex dégaina son blaster et pressa la gâchette, touchant l’un des soldats. Luke activa son sabre-laser alors que le second soldat impérial faisait pleuvoir des décharges de blaster dans tout le couloir. La lame verte du sabre-laser dévia chaque tir. Des étincelles ricochèrent de chaque mur, illuminant le couloir d’une espèce de feu d’artifice. Le soldat battit en retraite vers le turbo-ascenseur alors qu’Alex décochait un second tir. D’une seule pression, elle abattit le soldat, qui alla s’écraser contre le mur.

— Je ne pense pas qu’ils aient eu le temps d’appeler la sécurité, lui dit Luke pendant qu’il désactivait son sabre-laser. Mais nous ferions mieux de partir.

— Attendez ! Je dois récupérer les fichiers du Docteur Barzon, dit Alex.

Se précipitant vers le labo, elle croisa des tables recouvertes d’outils et de machines expérimentales pendant que Luke gardait un œil sur elle depuis le couloir.

Une demi-douzaine d’armoires longeait un mur. Mais, suivant les instructions du docteur, Alex ouvrit celle du fond. Tendant la main pour récupérer les dossiers, elle une à nouveau la vision de la montagne. Quoi qu’il puisse se passer – peu importe quelle version de sa vision se jouait ici même – elle savait que Carl Barzon était en sécurité avec Gil, à bord du Star Quest. Elle avait accompli sa mission.

— C’est bon, on peut y aller, cria-t-elle à Luke.

— Allez, c’est par là, dit-il, lui indiquant une cage d’escalier pas loin.

Quelques secondes plus tard, ils arrivaient aux remparts, surplombant un vide obscur. Bien plus bas sur le versant de montagne, les portes à écrans déflecteurs des deux baies de lancement étaient grandes ouvertes – les lumières les guideraient.

Le vent soufflait comme un animal sauvage à l’agonie. La neige tourbillonnante balayait leurs visages. Ils agirent en silence, enfilant les équipements de rappel que les commandos avaient laissés derrière eux. Sautant en arrière du sommet du mur, ils commencèrent leur descente jusqu’à la garnison.

À chaque mètre, Alex se servait de ses jambes pour se projeter légèrement loin du mur, la propulsant vers le bas. Elle sentait la présence apaisante de Luke à proximité alors qu’ils descendaient dans ce vide sombre. Arrivés à la base de la forteresse, ils firent une pause pour ajuster leurs câbles.

— Tout va bien ? demanda Luke, criant suffisamment fort pour couvrir le hurlement du vent.

— Aucun souci, répliqua Alex.

Tout à coup, un vent violent frappa Alex, qui fut projetée en arrière. Glissant le long de la montagne, elle perdit rapidement la trace de Luke. Elle alla s’écraser sur un rocher qui émergeait de la paroi rocheuse. Elle en eut le souffle coupé, mais cela n’arrêta pas sa chute. Une douleur insupportable traversa son corps. Comme une ombre menaçante, le souvenir de la vision emplit son esprit de peur.

Calme-toi. Elle entendit Luke lui parler à travers la Force. Tu dois rester calme.

Dans son esprit, Alex vit Luke. Elle pouvait voir son câble tanguer violemment sous la force du vent. Luke le toucha par la Force, et le câble s’envola jusque dans sa main tendue. Elle se tendit, interrompant abruptement la chute d’Alex. Secouée, elle lutta pour reprendre son souffle.

— Alex ?

Alex sentit le contact de Luke. Elle tenta de se détendre, de s’envelopper d’un voile de calme. Faisant appel aux dernières forces qui lui restaient, elle lutta pour rester concentrée jusqu’à ce que Luke arrive jusqu’à elle. Elle sentit une grande douleur envahir ses bras alors qu’elle glissait le long de la paroi glacée. Ses jambes étaient engourdies. Mais finalement, par-dessus le souffle du vent assourdissant, elle l’entendit hurler son nom.

— Alex, prend ma main ! Luke était juste au-dessus d’elle, perché sur une corniche rocheuse.

Il était penché en avant, tendant sa main le long de la paroi neigeuse.

Alex leva le bras. Soudain, la neige s’effondra sous ses pieds. Désormais suspendue au-dessus du gouffre, elle s’agrippa au câble de ses deux mains.

— Je n’y arrive pas ! hurla-t-elle à Luke.

— Tu peux le faire ! lui dit-il.

C’était presque comme s’il lui transmettait la force de lever le bras et d’attraper sa main. Elle sentait la Force l’entourer alors que Luke se penchait encore pour attraper sa main.

Il la hissa jusqu’à lui.

— Est-ce que ça va ? demanda-t-il.

Prenant une profonde inspiration, Alex chasse la douleur physique loin dans son esprit, et hocha la tête.

— Ouais, répondit-elle.

Luke étudia son visage un moment. De sa main, il essuya le sang qui coulait d’une coupure qu’Alex avait au front. C’était évident qu’elle n’était plus en état de continuer sa descente jusqu’à la baie de lancement où deux vaisseaux les attendaient.

— Passons par la baie de lancement supérieure, dit-il, pointant du doigt des éclairages situés trente mètres plus loin au bout de la corniche.

Alex leva les yeux vers la direction que Luke indiquait. Puis elle scruta la paroi obscure, tout juste capable de distinguer la silhouette de la forteresse située au sommet de la montagne. Elle n’avait pas réalisé sur quelle distance elle était tombée.

— J’ai dû prendre un raccourci, hein ?

Luke esquissa un sourire.

— Et quel raccourci !

— J’essaierai de ne pas m’éloigner cette fois, dit-elle en esquissant une grimace.

Ils traversèrent péniblement la corniche qui longeait le versant de montagne, jusqu’à ce qu’ils arrivent à la baie où une navette de classe Lambda était prête à décoller.

— Alex, je veux que tu te concentres, lui dit Luke. (Cela semblait être un endroit aussi bien que n’importe quel autre pour commencer une formation de Jedi.) Combien de présences sens-tu ?

Alex se concentra sur la baie, ignorant le froid et le vent hurlant. Elle ferma les yeux.

— Deux, dit-elle, penchant la tête d’un côté alors qu’elle sentait une ombre distante à la lisière de son esprit. Non, trois, reprit-elle.

— Très bien. D’accord, prépare-toi.

Alex hocha la tête, curieuse de savoir ce que Luke avait en tête. Soudain, un lourd fracas résonna dans la baie.

— Allons-y ! dit Luke.

Alors qu’ils couraient à travers la baie, Alex surprit deux techniciens confus courant vers une pile de caisses qui étaient tombées d’un esquif de transport, près du monte-charge de la navette. Le conducteur de l’esquif était à l’arrêt, les mains sur les hanches, observant le désordre.

La diversion avait fonctionné. Personne ne remarqua Luke et Alex monter à bord du turbo-ascenseur. Pendant qu’ils descendaient vers la baie de lancement, où leurs vaisseaux étaient stationnés, Alex fixait Luke, remarquant l’expression troublée dans son regard. Faisant appel à la Force, elle sentit la présence inamicale qu’ils s’apprêtaient à rencontrer.

Luke voulut saisir son sabre-laser. Alex l’interrompit, entrelaçant ses doigts autour des siens.

— Faites-moi confiance, lui dit-elle.

Passant son bras autour du cou de Luke, elle le poussa contre le mur et l’embrassa.

La porte du turbo-ascenseur s’ouvrit. Un jeune technicien se tenait là, bloquant le chemin jusqu’à la baie. Pendant quelques secondes, Alex parvint à oublier les risques qu’elle et Luke encouraient. Elle sentait qu’il appréciait le baiser impromptu autant qu’elle.

Esquissant un sourire, le technicien se racla la gorge.

— Vous descendez ici ? demanda-t-il, alors que Luke faisait un pas en arrière.

Alex rougit, et baissa les yeux. Luke observa le technicien, regarda par-dessus son épaule vers la baie de lancement, et hocha la tête. Hochant la tête de droite à gauche, le technicien regarda Luke et Alex s’éloigner main dans la main.

Alex aperçut Metallo près de la rampe d’embarquement du Star Quest. Le lieutenant Cdera, l’officier qui les avait accueillis quelques heures plus tôt, était là lui aussi, se disputant avec le capitaine. Cdera fit un geste en direction de la douzaine de soldats impériaux qui descendait le long de la rampe du cargo. Quelque chose disait à Alex que les ennuis n’étaient pas finis.

Mais au moins, son stratagème semblait avoir fonctionné. Le technicien monta à bord du turbo-ascenseur alors qu’Alex observait les soldats impériaux d’un air inquiet. Puis soudain, une vague de colère frappa son esprit. Elle sentit l’humeur du technicien se noircir. Cela le frappa comme un éclair – seul le personnel impérial avait un degré d’accréditation suffisant pour utiliser les turbo-ascenseurs qui serpentaient la garnison. Il bloqua la porte du turbo-ascenseur avant qu’elle ne se referme.

— Hé… attendez une minute ! hurla-t-il.

Alex se retourna, dégaina son blaster, et ouvrit le feu. Le technicien s’écroula sur le sol du turbo-ascenseur et la porte se referma doucement. Entendant le coup de feu, le lieutenant Cdera se retourna brusquement. Il dégaina son blaster en se mit en position d’attaque.

— Arrêtez-les ! ordonna-t-il, couvrant le bruit des moteurs du vaisseau.

Il n’eut pas le temps de commencer à tirer. Metallo le désarma.

Tout en haut, dans la salle de contrôle, l’un des techniciens se précipita vers l’alarme. Des tirs de blasters illuminèrent la salle, et deux autres impériaux tombèrent.

Les soldats impériaux ouvrirent le feu. Luke brandit son sabre-laser, déviant les tirs qui étaient destinés à Alex pendant qu’ils traversaient la baie en direction du vaisseau. Près de la rampe d’accès du Star Quest, Metallo neutralisait méthodiquement des soldats impériaux. Un tir noircit un panneau près de la tête de Metallo alors que Luke et Alex la rejoignaient. Un autre tir rebondit sur la lame de Luke. Aux commandes du vaisseau, Gil activa les canons lasers camouflés. Un tir de barrage pulvérisa les impériaux.

Plusieurs soldats impériaux, à la recherche d’un endroit où se mettre à couvert, se précipitèrent vers le cargo Kazellis. Positionnées près de la rampe d’accès du cargo, ils furent embusqués par les commandos rebelles.

En quelques secondes, la bataille était finie.

— Merci pour votre aide, Metallo, dit Luke alors qu’il fixait son sabre-laser à sa ceinture.

— J’aimerais rester et discuter de certaines choses, Luke, lui dit Metallo. Mais je suppose que nous allons avoir davantage de compagnie.

Luke semblait être ailleurs. Il leva les yeux et hocha la tête en direction d’une silhouette qui se tenait dans la salle de contrôle.

— Page a brouillé les communications. Et il a désactivé les turbo-ascenseurs. Il leur faudra quelques minutes pour découvrir ce qui se passe ici.

Metallo fit un signe à Luke pendant qu’elle courait à son vaisseau. Alex se tourna face à Luke. Elle comprenait enfin – les visions, les vues inhabituelles – toutes les pièces du puzzle s’étaient reformées. Luke Skywalker lui avait ouvert un tout nouvel horizon rempli de possibilités. Il ferait toujours partie de sa vie. Peu importaient les événements qui les mèneraient sur des mondes différents, ils faisaient partie de la Force, reliés par ses forces. Et peut-être, un jour, viendrait-elle à maîtriser la Force. Mais pour le moment, ils avaient tous les deux une mission à accomplir ailleurs.

— Je dois retourner sur Garos pour poursuivre le combat, dit-elle à Luke.

— Et tu ne seras plus seule, désormais, lui répondit Luke.

Alex jeta un œil au cockpit du Star Quest et hocha la tête. Son regard se posa sur Luke à nouveau, et elle tendit la main. Un sourire gêné se dessina sur son visage. Il prit sa main dans les siennes et la serra délicatement.

— Nous nous retrouverons, Alex, dit-il.

Il la regarda monter la rampe d’embarquement du cargo. Alex jeta un dernier regard derrière elle et le dit au revoir d’un signe de la main.

Le Star Quest s’éleva dans le ciel au moment où le soleil émergeait par-dessus les nuages à l’Est. Carl Barzon suivit Alex dans l’habitacle de pilotage, posant son bras sur les épaules de la jeune femme.

— Je n’aurais jamais pensé pour quitter cet endroit, dit-il. Merci, capitaine Metallo.

— Vous devriez remercier Alex, docteur, lui dit Metallo. Pour une fille de gouverneur impérial, elle est plutôt Rebelle.

Barzon adressa un sourire à Alex et l’embrassa délicatement sur la joue avant de retourner au compartiment passager.

— Gil t’a tout dit ? demanda Alex.

— Oui.

— Je…

— Il n’y a rien à dire, fillette, fit Metallo.

Alex hocha la tête alors que Gil entrait dans le cockpit, lui faisant un clin d’œil, et s’installait sur le siège du copilote.

Une explosion retentit derrière eux alors que le Star Quest quittait l’atmosphère de Sarahwiee pour plonger en espace profond.

— Gil, calcule l’itinéraire le plus rapide pour quitter cet endroit.

— Itinéraire défini, coordonnées entrées, capitaine.

— C’est parti, dit Metallo à haute voix, tirant la manette de l’hyperdrive.

Alex regarda à travers la verrière pendant que les étoiles s’allongeaient en des lignes infinies. Un sentiment de calme profond inonda l’esprit d’Alex. Par-delà les frontières sans fin de l’espace, elle sentit l’esprit de Luke toucher le sien une dernière fois.