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Kuirco le Collectionneur
Évidemment, le nain avait fort bien pu se perdre dans la foule qui, véritable fleuve humain, coulait incessamment entre les baraques.
Pourtant, Morane sentait que cette curieuse rencontre n’était pas à inscrire dans le train-train habituel des choses. Pourquoi ? Il était incapable de répondre clairement à cette question. Une impression fugace, diffuse, indéfinissable, due davantage au comportement du petit homme aux yeux protubérants qu’aux paroles sibyllines qu’il avait prononcées. Car, après tout, le nain avait peut-être, tout simplement, surpris quelques bribes de conversation entre les deux amis, et cela aurait pu suffire à donner l’impression qu’il en savait beaucoup plus long.
Cependant, tout en s’efforçant de trouver une explication rationnelle susceptible d’éclaircir ce mystère, Bob n’arrivait pas à chasser le sentiment de malaise qui s’était emparé de lui à l’apparition du nabot. Les bras ballants, l’attaché-case toujours accroché au bout des doigts, il regardait fixement sans le voir l’endroit où, quelques secondes plus tôt, se tenait celui qui disait s’appeler Krouic le Magicien.
Finalement, haussant les épaules, Morane fit demi-tour, grimpa en deux bonds l’escalier qui menait à l’intérieur de la baraque de lutteurs et pénétra là où, pour la plus grande joie du public, Jack-le-borgne et Mustapha-l’étrangleur s’envoyaient mutuellement au tapis dans un grand nuage de poussière aux relents de sueur aigre.
C’est exactement à ce moment que Morane commença à s’inquiéter réellement, tandis qu’un petit vent de panique se mettait à souffler sous son crâne. Bill n’était pas là. Il n’était pas dans la baraque des lutteurs, et Morane crut entendre à nouveau la voix du petit homme aux yeux protubérants, cette voix douce qui disait : « Votre ami, par exemple, où croyez-vous qu’il soit en ce moment ? »
« Allons bon, se dit Bob, magicien ou pas, on ne fait pas disparaître un gars de la taille de Bill simplement en le regardant de travers ! Et même s’il était deux fois plus petit, cela n’en serait pas plus facile pour autant ! Il y a une explication, bien sûr, un truc, quelque chose qui m’a certainement échappé. Mais quoi ? »
Par acquit de conscience, et avant de quitter la baraque de lutteurs, il fit le tour complet du ring, bousculant sans vergogne les spectateurs qui se pressaient le long des cordages, mais il n’aperçut pas la plus petite mèche de cheveux rouges qui aurait pu trahir la présence de Bill. Aussi se décida-t-il finalement à sortir.
Une fois dehors, il respira profondément, retrouvant avec plaisir l’air nocturne après l’atmosphère lourde de la baraque, mais sans cesser cependant de se torturer les méninges afin de trouver la clé de l’énigme. N’avait-il pas tort d’imaginer des solutions plus insensées les unes que les autres ? Et si Bill, de son côté, était en train de le chercher, lui aussi, en se demandant où il avait bien pu passer ?
N’empêche ! Bob n’arrivait pas à se défaire du sentiment d’appréhension qui le tenaillait. Ce Krouic, malgré tout, avait une allure étrange, et toute sa personne dégageait une impression… maléfique. Oui, c’était bien le terme qui convenait. Il émanait de ce petit homme à la voix douce quelque chose de ténébreux, de diabolique. Aurait-il été le gardien de l’enfer que Morane n’en eût pas été autrement surpris.
Allons ! Il se laissait aller à de dangereuses rêveries qui, de toute manière, ne pouvaient mener à grand-chose. Il fallait agir. Se débarrasser une bonne fois de ces songes qu’un nain, un petit homme parfaitement banal en apparence, avait provoqués. Ce Krouic, tout compte fait, était peut-être le plus charmant des hommes et Morane, lui, était en train de se rendre tout à fait ridicule à ses propres yeux en le chargeant de tous les péchés du monde.
Bill était quelque part et il suffisait de le retrouver. Toute cette histoire était parfaitement saugrenue, et il se conduisait comme un sot. Voilà ce qu’il fallait se dire ! Bill et lui avaient un avion à prendre dans, voyons, un peu moins de trois heures. Il allait se rendre à l’aéroport où, bien entendu, il retrouverait son ami, et ils riraient tous les deux de ces fantasmagories que l'imagination de Morane avait créées de toutes pièces. À moins que… Pourquoi pas, après tout ? Cela ne lui prendrait que quelques minutes. Il avait le temps de chercher la baraque où le nain était installé. Oh, juste pour se rendre compte ! Juste pour voir de ses propres yeux à quel point il s’était conduit comme un nigaud. Tout juste pour voir…
S’il n’avait pas, à l’instant, décidé de se débarrasser des idées bizarres qui lui passaient par la tête depuis un moment, exactement depuis qu’il avait rencontré le nain, il se serait peut-être étonné – ce qu’il ne manqua pas de faire par la suite –, de découvrir si aisément la baraque du petit homme aux yeux globuleux et à la voix douce. Car il la trouva tout de suite, presque sans la chercher, tout à fait comme si un guide invisible l’avait conduit jusque-là. Immédiatement et sans même se poser la question, il comprit qu’il était devant elle, et cela avant même de lire les mots qui se détachaient vaguement en lettres d’or terni sur la peinture écaillée d’un minable fronton de bois :
KROUIC LE MAGICIEN
À peine Morane fut-il devant la baraque, qui n’était en fait qu’un grossier cube de planches posé de guingois sur le sol et recouvert d’une peinture dont la couleur éteinte paraissait avoir l’âge du monde, qu’il se sentit envahi à nouveau, mais avec une puissance accrue, par ce sentiment de malaise, proche de l’angoisse à présent, qui l’avait frappé tout à l’heure.
Il était là, immobile, tendu, résistant à une force obscure qui semblait vouloir l’attirer vers l’antre du magicien. Les gens passaient près de lui en s’écartant, aussi indifférents que s’il n’avait été qu’un simple poteau de bois planté au milieu du chemin et qu’ils contournaient presque sans le voir. Bob eut l’impression très nette que pas une de ces personnes, pas une seule, ne jetait le moindre regard sur l’enseigne fanée de la misérable baraque, exactement comme si aucune d’elles ne la voyait, comme si elle n’existait pas pour elles.
Était-il possible qu’il fût le seul homme parmi cette foule à ressentir cette peur irraisonnée qui prenait de plus en plus rapidement possession de son esprit ? Était-il le seul à éprouver l’impression affreuse de piétiner au seuil même de l’épouvante ?…
Une voix arracha tout à coup Morane à ses pensées.
— Vous… vous aussi ? disait-elle.
Il se retourna lentement et regarda sans répondre la jeune femme pâle qui se tenait derrière lui et qui, exactement comme lui un instant auparavant, fixait le fronton de la baraque.
— Vous aussi, répéta-t-elle, vous… cherchez quelqu’un ?…
Désemparée, les lèvres tremblantes, en proie à une sombre agitation, elle paraissait à deux doigts de se jeter sur Morane, comme quelqu’un en train de se noyer et qui apercevrait subitement une bouée de sauvetage.
Ce fut tout naturellement que Bob prit la main de l’inconnue.
— Qui cherchez-vous ? demanda-t-il doucement.
— Mon frère… Nous étions… Nous avions l’intention de faire un tour sur les montagnes russes, et nous avons été abordés par…
— Par un nain ?
— Oui, c’est cela…
Elle laissa échapper un rire nerveux, puis :
— C’est ridicule, n’est-ce pas ? Il disait s’appeler Krouic… – Comme ça, ajouta-t-elle en désignant de la main le fronton de la baraque devant eux.
— Krouic le Magicien, murmura Bob.
— C’est ridicule, n’est-ce pas ? répéta-t-elle. Je… J’ai l’impression de faire un mauvais rêve… Et pourtant, je ne puis m’empêcher d’y croire… Avez-vous remarqué que personne… personne ne semble prêter attention à…
— Oui, répondit Morane qui avait compris ce qu’elle voulait dire, on dirait que nous sommes les seuls à voir cette baraque.
Pour la première fois depuis qu’elle lui était apparue, Morane regarda attentivement la jeune fille, baissant la tête, car elle était beaucoup plus petite que lui, et il l’examina longuement. Elle était très jolie, à peine maquillée, et le léger nuage de poudre qu’elle avait promené sur ses joues laissait apparaître la pâleur vaguement laiteuse de sa peau. Mais ce qui attira surtout l’attention de Morane, ce fut, dans l’ovale du visage encadré d’une lourde masse de cheveux noirs, les immenses yeux violets qui le fixaient avec intensité, pleins d’une anxiété presque palpable. Et, quoiqu’il fût lui-même loin d’être rassuré, il éprouva soudain le besoin impérieux de chasser la peur qui habitait le regard de la jeune fille.
— Ne vous en faites pas, dit-il. Nous allons le retrouver, votre frère.
— Le pensez-vous vraiment ?
— Bien sûr…
— Je vois bien que vous dites cela pour me rendre confiance, mais…
Elle sourit faiblement.
— Mais je vous en remercie, cependant… Et vous-même, qui cherchez-vous ?
— Un ami… J’étais avec un ami lorsque le nain nous a interpellés. Et puis, subitement, mon ami a disparu…
— Exactement, comme pour mon frère, dit-elle. Je ne sais même pas comment je suis arrivée jusqu’ici… Comme si…
— Je sais, dit simplement Bob.
Ils se turent un moment, debout l’un contre l’autre au milieu de la foule indifférente, et qui semblait continuer à ignorer obstinément la baraque du magicien. Puis Morane dit encore :
— Il n’y a qu’un moyen de tirer cela au clair.
— J’attendais cette phrase, fit la jeune fille. Je savais que vous alliez dire cela…
— Vous avez peur ?
— Oui… Très peur…
— Moi aussi, j’ai peur, dit Bob sans honte. Et puis après ?
Elle ne répondit pas tout de suite, le regarda, regarda dans la direction de la baraque, le regarda à nouveau.
— Bon, décida-t-elle d’une petite voix. Je sais qu’il n’y a rien d’autre à faire…
Il lui prit le bras et l’entraîna vers l’entrée de la baraque, et elle se laissa faire sans opposer la moindre résistance. Ils s’arrêtèrent un instant devant l’entrée, un trou sombre, presque noir, et la peur les serra un peu plus fort entre ses griffes. Puis, ils entrèrent, et la nuit les engloutit d’un seul coup. De l’ombre jaillit alors une voix douce.
— Ah ! dit-elle, vous voici tous les deux, Violette Rank et Robert Morane… Je vous attendais…
« Violette, se dit Bob. J’aurais pu le deviner. » Et, au moment où cette pensée lui traversait l’esprit, il vit le nain, devant eux, à quelques pas à peine, immobile, baigné d’une vague lueur verdâtre. Sans lâcher la main de la jeune fille, Morane ouvrit la bouche pour parler.
— Vous…, commença-t-il.
Il s’arrêta aussitôt. Ce n’était pas le nain. L’homme qui se tenait devant eux était au moins aussi grand que Morane, et pourtant, sa voix était bien celle du nabot qui avait interpellé les deux amis devant la baraque de lutteurs. C’étaient les mêmes yeux protubérants, globuleux, pareils à ceux d’une grenouille.
Morane respira profondément.
— Qui êtes-vous ? dit-il.
— Je suis Krouic, répondit l’homme de sa voix douce, ainsi que vous avez pu le lire au-dessus de l’entrée. Krouic le Magicien…
— Que signifie tout ceci ? dit Bob. Que voulez-vous, à la fin ? Où voulez-vous en venir ? Où sont le frère de Mlle Rank et mon ami ?
— Que de questions ! Et comme vous êtes impatient, commandant Morane !
Krouic se pencha légèrement en avant, tandis qu’un éclair passait dans ses yeux de batracien, et il ajouta :
Votre avion n’est pas encore parti… Vous ne devez pas vous inquiéter… Le spectacle auquel je vous ai convié va tout juste commencer…
Il souriait et, en même temps, la lumière verte qui l’enveloppait parut se propager, comme si un rhéostat en augmentait l’intensité. Très vite, Morane et Violette Rank baignèrent à leur tour dans cette lumière qui allait en s’intensifiant d’instant en instant. À tel point que, bientôt, ils durent fermer les yeux pour éviter d’être éblouis. Mais, à travers leurs paupières mêmes, l’étrange lueur s’imposait à eux, devenant plus intense encore, plus étincelante.
Morane posa son attaché-case à ses pieds et abandonna la main de sa compagne. Sans s’en rendre compte, ils portèrent tous deux en même temps leurs mains devant leurs yeux pour tenter de faire écran entre ceux-ci et l’infernale clarté qui les blessait, tandis que la voix du magicien se faisait insistante.
— Ne résistez pas, disait Krouic. Ne résistez pas. C’est tout à fait inutile… Laissez-vous aller… Comme ça… Doucement… Dans le fond de vous-mêmes, vous savez très bien que vous ne pouvez rien contre la puissance de Krouic le Magicien, n’est-ce pas ? Pourquoi résister ? À quoi bon ? Maintenant, vous êtes comme des enfants, sans force, sans volonté… Vous êtes tous deux en mon pouvoir…
De fait, Morane aurait-il voulu s’enfuir, quitter la baraque de cet enchanteur maudit, qu’il aurait été incapable d’esquisser le moindre geste, exactement comme si, tout à coup, il avait été paralysé, pétrifié sur place. Pour lui, subitement, comme pour Violette Rank, le monde n’était plus constitué que de deux éléments : le premier était cette épouvantable lumière verte qui paraissait imprégner jusqu’aux méandres de leurs cerveaux ; le second, la voix de Krouic, cette voix douce, doucereuse même, insistante, et qui disait :
— À présent, Kuirco va prendre soin de vous… Vous êtes entre les mains de Kuirco… Vous êtes entre les mains de Kuirco le Collectionneur…
Morane, eut l’impression que Krouic prononçait inlassablement cette dernière phrase. Puis il fronça les sourcils. Il lui semblait que, progressivement, la lumière diminuait d’intensité. Machinalement, depuis quelques secondes, il pressait moins fortement ses mains contre ses paupières. En même temps qu’il en prenait conscience, il réalisait que la voix de Krouic s’était tue.
Prudemment, avec d’infinies précautions, il ouvrit les yeux, laissa glisser les mains le long de son corps. Il pouvait voir, à présent ; il pouvait même bouger. Mais ce qu’il vit n’était guère rassurant. Autour de lui, ce n’était plus cette torturante luminescence verte et son aveuglante puissance, mais une luminosité glauque, floue, irréelle.
Il ferma les yeux quelques instants, serra fortement les paupières, les ouvrit à nouveau. Durant quelques secondes, il avait nourri le fol espoir que ses sens l’avaient abusé. Mais il dut se rendre à l’évidence : il était plongé dans une atmosphère verdâtre qui enveloppait tout, absolument tout autour de lui, et lui-même était inclus dans cette luminosité vaguement marine. Il s’en aperçut avec étonnement en voyant la peau de ses mains dont le hâle, probablement par un effet de cette extraordinaire lumière, avait pris une curieuse teinte olivâtre.
« Bon, se dit-il alors avec humour, si je rêve, c’est que je rêve ! » Et, en pensant cela, il réalisa que l’envahissante sensation d’impuissance qui s’était emparée de lui dès l’instant où il avait mis le pied dans la baraque du magicien, avait disparu. Il était parfaitement maître de lui, sauf peut-être un vague sentiment d’inquiétude, bien naturel après tout, face à ce monde inconnu dans lequel les charmes de Krouic l’avaient précipité. Mais, hormis cette pénible sensation, il s’était débarrassé de cette terreur qui n’avait pas cessé de l’habiter jusqu’au moment où il avait ouvert les yeux.
Subitement, il pensa à la jeune fille. Où était Violette ? Qu’était-elle devenue ? Il fit un pas en avant et heurta quelque chose du pied. L’attaché-case ! D’une certaine manière, la présence de la petite valise acheva de lui rendre son calme, son sang-froid, comme si le fait de trouver près de lui, avec lui, la marque d’un monde qu’il avait la sensation d’avoir quitté le ramenait soudainement à la réalité.
Alors, levant la tête, il aperçut Violette. Elle agitait la main, en face de lui. Il reconnut son visage pâle, légèrement déformé, et qui avait viré, lui, à la douceur liquide d’un vert d’eau. Il reconnut également son sourire tremblant et ses immenses yeux violets.
Voulant s’élancer dans la direction de la jeune fille, Morane reçut en pleine face un coup terrible qui faillit le faire tomber à la renverse.
À moitié assommé, il se massa le front en grimaçant de douleur, tandis que Violette le fixait d’un air navré en remuant lentement les bras de haut en bas, tout à fait comme si elle voulait l’inciter à la prudence.
Lentement cette fois, une main tendue devant lui, Bob s’avança d’un pas, de deux, de trois, et toucha une surface lisse et froide, cette même surface contre laquelle il avait buté quelques instants plus tôt. Incrédule tout d’abord, n’arrivant pas à en croire ses sens, et surtout ses doigts qu’il promenait doucement sur une surface lisse, quasi invisible, il comprit en fin de compte qu’une cloison transparente le séparait de Violette.
De l’autre côté de ce mur translucide – et maintenant, il comprenait également pourquoi la jeune fille lui apparaissait déformée –, Violette lui adressait des signes. En suivant ceux-ci, Bob leva les yeux et découvrit, au-dessus de lui, très haut, la froide blancheur d’un disque dont l’éclat blafard contrastait vivement avec les verts qui l’entouraient.
Pendant quelques secondes, il regarda fixement cette espèce de pleine lune, là-haut, s’efforçant de comprendre de quoi il s’agissait. En même temps, il refusait d’admettre la solution qui se présentait à son esprit, tant elle lui paraissait démente. Pouvait-il accepter une chose pareille ? Ou bien devait-il reconnaître qu’il était devenu fou ?
Mais non, la folie n’avait pas pu prendre possession de son esprit puisque, là, à quelques mètres de lui, semblait-il, Violette se trouvait exactement dans la même situation.
Appuyant franchement la main contre la surface lisse du verre, il fit quelques pas, cinq ou six, sans abandonner la froide paroi, et l’expérience vint confirmer ce dont il se doutait depuis quelques instants : le mur translucide se courbait vers la gauche et vers la droite.
Fébrilement, il prit le marqueur à pointe de feutre qu’il portait agrafé à sa poche intérieure et il se mit à tracer un trait épais sur la muraille transparente, à hauteur de son visage. Ensuite, la pointe de feutre glissant sur la paroi, il se mit en route vers la gauche, lentement, le regard fixé sur la marque noire.
Évidemment, tout se passa comme il s’y attendait. Mais de découvrir qu’il avait deviné juste, qu’il ne s’était pas trompé, ne le rendit pas plus optimiste pour autant, ni plus joyeux ! Il retrouva la marque après avoir parcouru une bonne quinzaine de pas, et sans qu’aucun angle ne vienne interrompre ou casser la continuité de la muraille de verre. Le feutre avait dessiné un cercle parfait.
Il fallait bien regarder les choses en face : il se trouvait dans une sorte d’énorme cylindre de verre. Et, tout à coup, il se souvint des paroles du magicien : « Vous êtes entre les mains de Kuirco le Collectionneur. » Était-il possible que… ?
Bob Morane regarda dans la direction de Violette. Elle ne l’avait pas quitté des yeux et, dès que leurs regards se rencontrèrent, la jeune femme hocha affirmativement la tête, comme si elle avait compris ce qu’il pensait et voulait lui signifier qu’elle avait découvert elle aussi la vérité.
Il ferma les yeux, étourdi. Devait-il éclater de rire, ou hurler d’horreur ? Fallait-il rester là, les yeux fermés, et attendre le réveil, comme s’il s’agissait seulement d’un affreux cauchemar ?
Ensuite, Bob se dit que, s’il rêvait, cela valait la peine de connaître la suite et que, par contre, s’il ne dormait pas, si tout ceci était réel, eh bien, autant valait regarder la réalité en face !
Car il avait compris que Violette et lui se trouvaient entre les mains de Kuirco le Collectionneur…
Kuirco, qui enfermait les « objets » de sa collection dans des bouteilles !