TEMPÊTE DE FEU
Kevin J. Anderson
11 ap. BY
Kevin J. Anderson (préquelles et séquelles de Dune, La Saga des Sept Soleils,…) est, avec Timothy Zahn et quelques autres, l’un des fondateurs de l’Univers Étendu. Ses participations y ont été multiples puisqu’il s’est tour à tour frotté à l’écriture de romans (la trilogie de L’Académie Jedi, Le Sabre noir) et de nouvelles et à la scénarisation de comics (Légendes des Jedi, Léviathan,…). Il est également le co-auteur, avec sa femme, Rebecca Moesta, de la série de littérature jeunesse Les Jeunes Chevaliers Jedi, traduite chez Pocket Jeunesse et qui relate les années d’apprentissage de Jaina et Jacen Solo, juste avant l’arrivée fracassante des Yuuzhan Vong dans la galaxie.
La nouvelle qui nous intéresse ici date de novembre 1997, publiée dans le 15ème et dernier numéro du Star Wars Adventure Journal. Comme nous le révèle l’auteur dans une courte note d’introduction, cette histoire prend place en l’An 11 après la bataille de Yavin, entre les deux premiers tomes de la trilogie de L’Académie Jedi, La Quête des Jedi et Sombre Disciple. Il y décrit la première rencontre entre Luke Skywalker, Maître Jedi en devenir et l’historienne et chanteuse Jedi Tionne, qui se révélera comme l’un de ses apprentis les plus importants. Elle fait également référence, par le biais de la Station Exis, à la série de comics La Légendes des Jedi et à Kenobi’s Blade, sixième roman de la série Junior Jedi Knight de Rebecca Moesta, toujours inédit en français.
Mais pas de panique ! Inutile d’être un expert pour apprécier ce texte ; M. Anderson l’assure, l’histoire se suffit à elle-même et saura également régaler les autostoppeurs égarés sur les branches de plus en plus tortueuses de l’Univers Étendu.
Titre original : Firestorm
Note de l’auteur
Cette histoire prend place entre mes romans La Quête des Jedi et Sombre Disciple. Elle décrit la première rencontre entre Luke Skywalker et l’historienne et chanteuse Jedi Tionne, qui deviendra l’un de ses apprentis les plus importants. Le décor de la Station Exis la relie également à Tales of the Jedi, ma future série de comic chez Dark Horse, The Redemption of Ulic et le troisième roman jeunesse de Rebecca Moesta, Kenobi’s Blade. Naturellement, j’espère qu’elle se suffit également à elle-même.
Le monde d’Ossus fut le plus grand centre de l’Identité Jedi – une bibliothèque magnifique renfermant la connaissance de la Force et l’histoire de milliers de générations de défenseurs de l’Ancienne République. Rouleaux et plaques de données renfermaient légendes et chansons, triomphes et tragédies. Ossus regorgeait de fontaines et de statues, de magnifiques pavillons de tissu brodé, de colonnes cannelées en pierres laiteuses, de cours pavées d’une mosaïque de dalles de pierre et de tomettes, de carillons à vent fait de cristal et d’or…
Maintenant, cependant, ce n’était plus qu’un tombeau, une cicatrice gonflée et sombre, sa gloire effacée par une violence extrême.
Tionne descendait la rampe de son vaisseau, le Lore Seeker – une embarcation obsolète et biscornue, presque aussi âgée que les ruines elles-mêmes – et s’immobilisa comme elle absorbait toutes les bribes de mémoires autour d’elle. Ses yeux nacrés s’agrandirent, et ses cheveux argentés s’égaillèrent sous l’effet du vent chargé d’une odeur de mort. Elle laissa son imagination vagabonder au gré d’histoires que des fantômes auraient pu conter, de ballades épiques que les Jedi auraient pu chanter – si Ossus n’avait pas été incinérée lors de l’explosion de dix étoiles dans l’Amas de Cron il y a quatre mille ans, au plus fort de la guerre des Sith.
Au-dessus d’elle, les gaz incandescents de l’Amas de Cron emplissaient le ciel d’une tâche brillante, bûcher funéraire de la magnificence de l’ancien centre de documentation.
S’aventurant hors de son vaisseau, Tionne découvrit un magma vitreux et durci autour des restes des statues cyclopéennes et des piliers effondrés suite à la violente onde de choc qui avait frappé ce monde. Ses cheveux argentés voletèrent autour de son visage. Elle percevait, telles des ombres toujours accrochées à la brise, les répercussions de l’incinération.
Tandis qu’elle marchait, les pierres brisées et les décombres crissaient sous ses pieds menus. Le spectacle l’accabla et, face à l’ampleur de la perte, une larme perla au coin de ses yeux vifs-argents. Elle hésita, ne sachant par où commencer.
Quelques créatures vives ressemblant à des lézards se mirent à l’abri. Ossus n’était donc pas entièrement morte. De petites formes de vie parvenaient souvent à survivre, peu importait le degré de dévastation. Quatre millénaires s’étaient écoulés, et les taux de radiation étaient retombés juste en dessous des niveaux mortels, bien que Tionne puisse se sentir mal si son séjour s’éternisait. Elle ne pourrait certainement pas rester assez longtemps pour découvrir tous les secrets cachés dans les décombres.
Ses yeux brillants examinèrent les débris, puis elle s’avança vers deux piliers soutenant une voûte renforcée et richement décorée, survivante miraculeuse de l’holocauste. Elle se demanda combien de réponses perdues depuis longtemps pouvaient être enterrées ici ; combien d’autres informations sur l’histoire des Jedi pourrait-elle trouver sous ces pierres brisées. L’étude de tout ce qui concernait les grands Chevaliers Jedi servait de moteur à toute son existence, et Ossus était un énorme trésor.
L’Empire avait désapprouvé la quête des légendes Jedi, l’idolâtrie suscitée par les grands défenseurs de l’Ancienne République… le maintient de leur flamme vivante. Avant sa naissance, les Jedi avaient été assassinés, presque tous éliminés. Tionne avait vécu sur un monde impérial terne, Rindao, une station d’entraînement servant d’avant-poste à proximité de la bordure extérieure. Bien que les siens n’aient pas soutenu l’Empire, ils n’avaient pas vraiment résisté lorsque les troupes d’assaut étaient venus prendre le pouvoir, ainsi leur civilisation n’avait-elle pas été punie.
Au cours de son enfance inintéressante, Tionne avait cherché refuge dans les vieilles pierres. Sa vieille grand-mère possédait un antique instrument muni de cordes sur ses deux faces, et elle chantait les légendes des Jedi, les histoires héroïques de Nomi Sunrider, de sa fille Vima, et des autres champions de la Force qui avaient combattu et peut-être péri au cours de la Grande Guerre des Sith.
Mais une nuit le commandant Impérial avait découvert la vieille femme racontant ces histoires. Les troupes d’assaut l’avaient traînée sur la place pour l’exécuter avec leurs fusils blasters, l’abattant pour avoir insinué que les temps anciens avaient été plus héroïques que la gloire actuelle de l’Empire.
La jeune Tionne en avait été dévastée. Avant que les soldats ne puissent fouiller la maison de sa grand-mère, elle s’y était introduite par une fenêtre située à l’arrière du bâtiment pour emporter l’instrument de musique à corde, le seul souvenir qu’elle désirait.
Patiemment, alors que sa quête la poussait le long des routes spatiales, Tionne avait enseigné à ses doigts les mystères des cordes, développant sa voix grâce aux chansons secrètes jouées pour elle par la vieille femme. Maintenant, cependant, l’Empereur avait succombé, et son Ordre Nouveau s’était écroulé il y a plus de six ans de cela. L’Empire et ses drastiques restrictions s’en étant allé, Tionne s’était laissée aspirer par sa recherche de la connaissance et du savoir Jedi.
La Nouvelle République s’était installée sur Coruscant, et elle venait juste d’apprendre la merveilleuse nouvelle que Luke Skywalker – peut-être le dernier Chevalier Jedi – avait pris sur lui d’en entraîner de nouveaux, de former une nouvelle confrérie de protecteurs.
Se penchant vers les gravats roussis, Tionne écarta un morceau de dalles de pierres écroulé et découvrit dans l’ombre sous-jacente une petite statue à l’effigie de ce qui avait du être un Maître Jedi. Le personnage représentait un petit alien insignifiant pourvu d’une tête ronde allongée et de dents découvertes. Elle se demanda s’il pouvait s’agir du célèbre Maître Jedi et érudit Odan-Urr, qui avait combattu il y a bien longtemps de cela, lors de la Grande Guerre de l’Hyperespace contre l’Empire Sith originel, avant de servir un millier d’années comme gardien de la bibliothèque sur Ossus.
Le sourire aux lèvres et le cœur gonflé de fierté, Tionne tint délicatement la petite statue, examina ses couches extérieures carbonisées et vitreuses où la chaleur de l’explosion de l’étoile l’avait craquelée. Elle prit le personnage, étonnée d’être réellement en train de toucher un morceau de l’histoire Jedi.
Il ne faisait aucun doute que si elle consacrait le reste de sa vie à passer au peigne fin les débris d’Ossus, elle trouverait plus de traces, plus d’informations, plus de pièces essentielles de l’histoire. L’Empire avait déclaré Ossus interdite, craignant que d’autres chercheurs n’y découvrent une part trop importante du savoir des Jedi – mais maintenant, peut-être la Nouvelle République pourra-t-elle consacrer son temps à une réelle exploration, avec des équipes des scientifiques et d’historiens lancées à la redécouverte de l’âge d’or des Chevaliers Jedi.
Tionne se retourna vers son vaisseau cabossé et grinçant. Elle avait découvert la statue d’Odan-Urr ; cela suffirait pour le moment. Mais elle continuerait sa quête jusqu’à ce qu’elle sache tout ce qu’il y avait à savoir sur les Chevaliers Jedi.
Yavin 4 était une lune verte orbitant autour d’une gigantesque géante gazeuse pastelle – le site de l’une des plus grandes batailles de la galaxie, abri d’une ancienne base rebelle. Bientôt, elle deviendrait le centre de formation de nouveaux Jedi.
Tout en se frayant un passage à travers l’enchevêtrement de feuillage, Luke Skywalker pensa que l’extrême ténacité de la jungle primitive s’avèrerait un ennemi bien plus pugnace que l’Empire lui-même. Près du lui, R2-D2 suivait le chemin qu’il traçait, ses roues tractées progressant péniblement à travers les broussailles.
Enfin, Luke fit halte devant les ruines du Grand Temple Massassi, ses marches en pierre ravagées par le temps et les forces de la nature… autant que par le bombardement Impérial qui avait suivi la destruction de la première Étoile Noire. Si cette lune s’était révélée suffisamment efficace pour abriter la Princesse Leia et ses combattants de liberté, pensa-t-il, elle conviendrait comme lieu destiné à l’apprentissage Jedi.
Luke avait déjà découvert deux candidats dans sa quête de Jedi, et ils l’avaient accompagné ici, sur Yavin 4. Streen, le vieil ermite excentrique qui vivait sur Bespin, prospecteur de gaz scrutant les cieux à la recherche des précieuses remontées de gaz tibanna. Il possédait une affinité pour les vents, la capacité de percevoir quand un orage allait éclater. Luke l’avait testé et découvert un potentiel inexploité pour l’usage de la Force – Streen serait un candidat Jedi idéal, bien que le vieil homme ait été peu disposé à quitter sa vie paisible et tranquille. Après son arrivée sur la lune inhabitée et sauvage, il semblait plus heureux d’avoir pu retrouver sa solitude.
L’autre nouvel apprenti de Luke, Gantoris, possédait des cheveux noirs hirsutes et une barbe qui accentuait son regard ardent et son tempérament sinistre. Sa vie sur la colonie infernale d’Eol Sha, où une lune voisine provoquait marées effroyables, bouleversements sismiques et éruptions volcaniques, avait forgé sa personnalité. Par la faute d’échos issus de la Force qu’il ne maîtrisait pas, Gantoris avait fait l’expérience de cauchemars au sujet d’un homme puissant et sombre lui demandant de le mener le long d’une route conduisant à la destruction. Gantoris avait cru Luke parti prenante de sa prémonition et tenté de le tuer. Mais il avait survécu. Par la suite, Gantoris avait accompagné le Maître Jedi afin d’être formé à la Force.
Se débarrasser de la jungle envahissante et remettre en état les ruines décrépies du temple paraissaient insurmontable. Luke sourit à cette pensée. Yoda serait probablement parvenu à tout faire seul. Avec ses deux apprentis durs à la tâche, ils pourraient faire tout aussi bien.
Les trois hommes commencèrent l’harassante tâche consistant à arracher les repousses des mauvaises herbes. Luke activa son sabre laser et commença à tailler les broussailles tandis que Gantoris et Streen dégageaient les pierres tombées au sol et balayant au loin la saleté. R2 apportait son aide là où il le pouvait, s’attaquant aux lianes fibreuses de sa minuscule scie tranchante.
— Un travail prestigieux pour un Chevalier de Jedi, murmura Gantoris en jetant sur le côté un tas de pierres poussiéreuses. J’obtiendrais un meilleur poste en tant qu’ouvrier d’entretien.
— Tu n’es pas Chevalier Jedi, dit Streen. Tu n’es qu’apprenti.
Luke fit une pile des déchets végétaux dans une clairière à l’extérieur de la pyramide principale, alors que R2 s’activait, tractant un traîneau chargé à plein d’autres débris de la forêt. Au milieu de la zone dégagée, Luke se servit de son allumeur pour mettre le feu au monticule de feuillage mort. La grosse pile de brandons lui rappela le bûcher funéraire de son père sur Endor, la manière dont il avait enflammé l’effrayant uniforme noir.
Pendant des mois, il s’était maintenu occupé avec les basses besognes que lui réclamait l’installation de son académie Jedi – les problèmes plus vastes le troublant trop. Luke Skywalker ne savait pas comment se formait un Chevalier Jedi ; il ne disposait pas de connaissances suffisantes sur les guerriers des temps passés, ce qu’ils avaient étudié, qui ils avaient été. Obi-Wan Kenobi et Yoda avaient débuté sa formation, mais elle s’était trouvée tragiquement abrégée. Il devait maintenant découvrir sa propre voie, mais également trouver d’autres étudiants.
Il disposait d’un Holocron Jedi, pris par Leia à l’Empereur ressuscité l’année précédente, et de la bibliothèque du Chu’unthor, le vaisseau Jedi détruit découvert dans les terres sauvages de Dathomir. Cela devrait suffire. Luke s’était juré de travailler aussi dur que possible, d’acquérir de nouvelles connaissances à chaque fois qu’il le pourrait afin de parfaire sa propre formation.
Les Chevaliers Jedi renaîtraient, mais la lutte serait longue et difficile.
Tionne allait de bar de spatioport en station marchande et en avant-poste pommé, vivant de son intelligence et de son adresse. Elle obtenait du travail dans des cantinas où elle utilisait l’instrument de musique à corde pris à sa grand-mère sur Rindao. Elle pouvait chanter des ballades Jedi et transmettre sa passion du théâtre et de l’histoire – les contes folkloriques narrant la manière dont Gav et Jori Daragon avaient provoqué la Guerre de l’Hyperespace, ou les premiers temps de la formation de Vodo Siosk-Baas, ou comment le Jedi Twi’lek Tott Doneeta s’était retrouvé horriblement brûlé en luttant seul contre un orage de chaleur pour défendre une petite ville à flanc de falaise sur Ryloth.
Elle gagnait peu de crédits, mais abondance de nourriture et de logement, ce qui lui permettait de poursuivre sa quête. En traînant dans ces d’établissements violents, elle cherchait surtout à poser des questions, amener les marchands et les contrebandiers à lui fournir des indices sur l’histoire perdue des Jedi.
À chaque fois qu’elle en avait terminé avec son répertoire de ballades Jedi, Tionne demandait si des membres de son assistance connaissaient d’autres histoires. Souvent cela encourageait simplement certains clients masculins ivres à essayer de l’attirer dans leurs quartiers privés sur leur vaisseau, mais Tionne était capable de sentir quand ils disaient la vérité, et quand signaler aux videurs des bars de les éloigner d’elle.
Une nuit, après son spectacle dans un restaurant tout-espèces près de l’un des nombreux spatioports d’Ord Mantell, elle reçut un message de la part d’un alien aux allures de rongeur du nom de Fonterrat, un récupérateur qui traversait une mauvaise passe. En temps normal Tionne aurait été soupçonneuse : des créatures de toutes espèces avaient essayé de tirer profit d’elle. Cependant elle perçut que ce Fonterrat souhaitait simplement faire affaire, et alors qu’elle s’asseyait face à lui, elle nota qu’il mangeait le plat le moins cher du menu et ne lui offrit pas de lui payer un verre.
— Ces informations sur les anciens Chevaliers Jedi, dit Fonterrat d’une voix grinçante. (Il possédait de grandes oreilles et un visage pointu, des yeux rapprochés comme des perles noires sous l’arête velue de son front). Combien valent-elles ?
Tionne le considéra calmement, sa peau pâle rougissant légèrement.
— Je ne sais pas. J’ai quelques crédits, mais pas assez pour vous rendre riche. (D’un geste de ses mains délicates et pâles, elle montra le restaurant minable). Travaillerais-je ici si j’avais autant d’argent ?
Fonterrat se tordit les mains, ses doigts habiles jouant avec une serviette de table. Il renifla.
— Je suis un récupérateur, dit-il. Je dois gagner de l’argent avec les choses que je trouve. Un jour, je tomberai sur quelque chose qui me rendra riche et célèbre… mais en ce moment j’essaye juste de m’en sortir.
Tionne percevait sa sincérité, voyait qu’il ne cherchait pas à l’escroquer.
— Dites-moi ce que vous avez trouvé, dit-elle. Je serai honnête. Je vous payerai ce que je peux.
— Une antique cité de l’espace, dit-il. La Station Exis. Elle est à l’abandon depuis des siècles.
— La Station Exis ! Tionne se pencha en avant, écarquillant ses yeux nacrés, prise d’un intérêt soudain. Ce fut le site de l’une des plus grandes assemblées Jedi de l’histoire ! Nomi Sunrider a convoqué elle-même tous les Chevaliers Jedi dix ans après la Grande Guerre des Sith.
Fonterrat ne sembla pas intéressé par les détails.
— Alors, est-ce que ça vaut quelque chose pour vous ? Je pourrais vous donner sa localisation. Vous pourriez fouiller l’épave vous-même à la recherche d’artéfacts. Gardez cependant à l’esprit qu’elle a depuis longtemps été vidée. Endommagée par les éruptions solaires.
— Oui, je payerai. Elle passa en revu ses comptes, déterminant combien elle pourrait lui donner tout en conservant de quoi acheter assez de carburant pour emmener le Lore Seeker jusqu’à la Station Exis. Le montant qu’elle obtint fut fâcheusement bas.
— Mais il serait peut-être préférable que vous n’alliez pas là-bas, dit Fonterrat, plissant son nez.
Elle se redressa, alarmée.
— Vous me donnez l’emplacement, puis vous me dites de ne pas y aller ? Pourquoi ?
— Parce que la Station Exis est très proche d’une étoile instable, dit-il. Teedio. Elle est entrée en phase d’activité, avec des éruptions toujours plus violentes. Depuis des siècles l’attraction des vents solaires a amené la cité de plus en plus près des éruptions. Les niveaux de radiations à bord sont devenus mortels depuis quelques temps déjà. Vous risquerez votre vie en y allant. Toute la Station Exis va plonger dans le soleil d’ici peu.
— Peu importe, dit-elle. J’y vais quand même.
Elle sortit son bloc de crédit et y entra une somme.
— C’est tout ce que j’ai, dit-elle. Donnez-moi l’emplacement.
Fonterrat la regarda avec consternation, mais ne il semblait pas y avoir d’autre choix.
— Très bien, j’ai besoin de ces crédits, même de si peu. (Il lui donna un morceau de papier avec des coordonnées de navigation.) Bonne chance. Je pensais que ces informations valaient plus que ça. Il se leva, secouant la tête.
— Attendez, l’interpella Tionne. Si vous vous rendez auprès du gouvernement de la Nouvelle République et que vous fournissez cette information à Luke Skywalker, il pourrait également être intéressé. Il vous payera bien plus que je ne le peux. Il essaye de fonder un nouvel ordre de Chevaliers Jedi.
— La Nouvelle République ! glapit Fonterrat. Je suis un contrebandier. Je suis sous le coup d’un millier de mandats d’arrêt dans différents systèmes. Je ne tiens pas à me rapprocher trop près de la justice.
Tionne croisa ses bras minces sur sa poitrine.
— Vous êtes récupérateur et contrebandier – vous devez bien entretenir quelques relations utilisables pour lui faire parvenir cette information. Croyez-moi, Luke Skywalker veillera à ce que vous soyez payé. De ce que j’ai entendu de ses exploits, c’est un homme de parole.
Fonterrat gémit, mais elle voyait déjà ses petits yeux foncés s’agiter dans tous les sens, passant en revue les manières dont il pourrait user de sa connaissance des contrebandiers pour envoyer subrepticement le message à Skywalker.
Il s’en alla. Tionne rassembla rapidement ses affaires et se hâta de rejoindre son vaisseau. Si Fonterrat avait vu juste, et que les tempêtes dues aux éruptions solaires empiraient un peu plus chaque jour, elle ne disposait que de peu de temps pour rechercher la Station Exis.
Le feu de broussailles avait terminé de brûler, ne laissant qu’une large bande de cendre devant le Grand Temple. Une aire d’atterrissage parfaite, et le Faucon Millenium se posa accompagné d’un sifflement de répulseurs et d’un nuage de charbon de bois broyé.
Luke se hâta de sortir de l’antique pyramide, Streen et Gantoris à ses côtés. Han solo sortit la rampe d’accès de son cargo léger modifié, et Chewbacca hurla bruyamment en descendant jusqu’à la zone d’atterrissage noircie. Han fit un pas dans les cendres et y donna un violent coup de botte.
— Content de te revoir, Han ! le salua Luke. Nous avons besoin de bras supplémentaires pour notre travail ici.
Chewie gémit et baissa les yeux sur ses bras velus. Han rit et secoua la tête, en tirant sur sa veste sombre.
— Pas moi, mon pote. Je vous apporte juste quelques provisions. Ta sœur veut que je m’assure que tu obtiennes l’équipement dont tu as besoin. (Han regarda autour de lui et renifla l’air chargé d’une odeur de brûlé.) C’est comme une excursion en terre sauvage.
Luke haussa les épaules.
— Un Chevalier Jedi sait s’adapter.
R2 roula jusqu’à lui et siffla.
Tout en riant, Han abattit sa main sur l’épaule de Luke.
— Bien sûr, gamin. Mais si tu essayes de convaincre de nouvelles recrues de s’installer ici, tu devrais dérouler le rouge-tapis, et non les avertir des souffrances qu’elles devront endurer.
— J’en trouverai de nouvelles, d’une manière ou d’une autre.
Han pinça ses lèvres.
— Tu sais, tu devrais tester ce môme, Kyp Durron, celui que j’ai sauvé des mines d’épice de Kessel. Il est tellement doué que je suis persuadé qu’il utilise la Force d’une façon ou d’une autre, mais il ne sait pas ce qu’il fait.
Luke rit.
— Bien sûr, Han. Je l’examinerai dès que tu voudras l’amener ici. J’ai besoin de nouveaux candidats. En fait, je dois également retourner sur Dathomir afin de parler à Teneniel Djo et certaines des autres sorcières y usant de la Force. Quelqu’un pourrait être disposé à venir ici – avec ou sans tapis-rouge.
Han ouvrit les soutes du Faucon. Accompagné de Chewie, Luke, Gantoris et Streen, ils s’activèrent pour décharger de nouveaux groupes électrogènes, des systèmes de circulation d’air, et des unités de préparation de nourriture.
— Leia n’est pas au courant de ça, mais je les ai programmés pour produire de bonnes saucisses Corelliennes bien grasses, dit Han, en ouvrant une caisse pour montrer le panneau de commande de l’unité de préparation de nourriture. Mais si vous préférerez quelque chose de plus fade, vous pouvez programmer plein d’autres plats en utilisant les matières premières provenant des jungles locales.
Luke sourit calmement.
— Nous nous en sortirons, Han.
L’ancien contrebandier passa une main sur son front pour en éliminer la transpiration.
— Tu ne transpires plus maintenant, gamin ?
— Pas à moins d’y être obligé.
Quand ils eurent terminé le déchargement et l’installation, Chewie revint au Faucon pour tester les systèmes d’allumage, tandis que R2 téléchargeait un résumé de tous les rapports HoloNet en attente depuis leur arrivée ici.
— Le devoir m’appelle, dit Han, je dois retourner sur Coruscant.
Mais au lieu de regagner son vaisseau, Han Solo s’accroupit aux côtés de Luke au deuxième étage de la pyramide Massassi. Il trouva une position relativement confortable sur l’un des blocs de pierre recouvert de mousse et passa ses bottes de part et d’autre, frappant de ses talons la pierre polie par le temps.
— J’ai reçu un curieux message d’un autre contrebandier, dit-il. Un récupérateur du nom de Fonterrat. Un escroc à la petite semaine qui se fait discret car il s’imagine plus d’ennuis qu’il n’en a réellement. Cependant, il a envoyé un message disant que tu pourrais être intéressé par certaines informations qu’il détient. Une antique cité spatiale nommée Exis. Il a parlé d’une grande assemblée Jedi ou de quelque chose du genre ayant eu lieu là-bas.
— Une convocation, intervint Luke. Oui. La Station Exis. J’en ai entendu parler, mais je ne sais pas grand chose à son sujet.
Et bien, il m’a fourni les coordonnées, et m’a averti que la station elle-même était en danger. Il a entendu dire que tu étais un homme juste et il espère que tu le payeras pour ces informations. (Han haussa les sourcils.) Moi, je pense que c’est de l’escroquerie.
Luke secoua la tête.
— Non, elle existe, si les coordonnées sont correctes. Paie-le ce que ça vaut. Sers-toi sur mes comptes.
Han sembla s’alarmer.
— Luke, tu ne peux pas te contenter de faire confiance aux gens comme ça. Il y a beaucoup d’escrocs…
— Paie-le, l’interrompit Luke. S’il s’agit réellement de la Station Exis, je dois y allez. Peut-être que cela me sera utile dans ma quête.
— Si tu le dis, gamin, dit Han, sceptique. Chewie se manifesta sur le comlink et hurla que le Faucon était prêt au départ. Han sauta du bloc moussu et descendit les escaliers effrités en direction du vaisseau.
— Si tu as besoin de quoi que ce soit, appelle.
— Je le ferai, Han.
Luke observa la forme discoïde du Faucon Millénium décoller de l’aire d’atterrissage brûlée, puis disparaître dans le ciel. Après un moment de concentration, il se hâta de rejoindre ses quartiers nouvellement établis à l’intérieur de la pyramide humide. Là, parmi ses affaires personnelles, il conservait le cube blanc nacré et luisant de l’Holocron Jedi, un artéfact empli des connaissances inexploitées des anciens Chevaliers.
Il sortit l’antique objet et le tint devant lui, caressant ses faces. Par le passé, il avait appartenu à l’Empereur Palpatine, mais Luke l’avait récupéré après avoir sauvé Leia.
Lors de sa confrontation finale avec l’Empereur ressuscité, il s’était presque perdu dans le côté obscur. Mais cette terrible épreuve l’avait finalement plongé dans une telle angoisse, un tel enfer psychique, qu’elle l’avait apaisé, lui avait appris à s’élever au-delà du simple Chevalier Jedi au point où certains l’appelaient Maître.
Mais Luke se percevait toujours si petit, si insuffisamment entraîné. Même ici, seul dans les antiques temples Massassi, il se sentait intimidé par la tâche qu’il s’était lui-même dévolu, faire renaître les Chevaliers Jedi. Qui était-il pour se permettre une telle chose ? Il lui faudrait une vie entière juste pour commencer à apprendre comment former les autres, mais il savait que cela devait être fait.
Jeune pilote rebelle, il s’était rendu dans ces temples vides. Il n’était alors qu’à peine affecté par Obi-Wan Kenobi, juste au commencement de son chemin à travers la Force. Il en savait peu, ignorait tout de la manière dont la Force affectait toute chose. Le jeune fermier qu’il était n’avait alors rien perçu… mais maintenant avec plus d’années de pratique, plus d’entraînement, et plus de douleur, il trouvait les ruines antiques des Massassi quelque peu oppressantes, mystérieuses. Elles semblaient détenir des secrets, une sombre présence profondément enterrée au cœur des pierres. Une froideur qu’il ne pouvait expliquer.
Mais il ne pouvait se résoudre à partir. Yavin 4 stimulerait la renaissance des Jedi.
Luke baissa la tête vers l’Holocron, toucha une de ses faces, et appela le gardien holographique. L’image de Bodo Baas, un minuscule alien, surgit devant lui, frêle, miroitante.
— Montrez-moi la Station Exis, dit Luke. Dites-moi ce que je dois savoir.
L’Holocron devint plus lumineux et l’image d’une cité géante dans l’espace emplit l’air devant lui. Luke posa un regard admiratif sur la grande métropole abandonnée, ses tourelles tentaculaires et ses modules, ses ports spatiaux, ses dômes, ses baies de déchargement.
Et il sut qu’il devait s’y rendre.
Quand Tionne découvrit la Station Exis, sa vue lui coupa le souffle.
Elle abaissa les voiles solaires du Lore Seeker et se rapprocha de la cité spatiale tentaculaire, survolant et observant les fortifications métalliques en contrebas. Autrefois métropole et spatioport grouillant d’activité, la station servait de lieu de rencontre pour les marchands, les diplomates et les Chevaliers Jedi.
Alors que le soleil du système Teedio devenait instable, la Station Exis tira profit de ce qui aurait pu être perçu comme désastreux : des mineurs d’ions et des écumeurs d’éruptions solaires opérèrent dans une cité en plein essor économique tout le temps où Teedio procura facilement des ressources énergétiques que d’ambitieuses têtes-brûlées de l’Ancienne République pouvaient exploiter. Mais quand les conditions se firent trop dangereuses, la ville entière fut abandonnée – laissée vide et errante dans l’espace pendant des siècles.
Mais Tionne espérait qu’elle ne soit pas entièrement vide.
Pendant quelle tournait au-dessus du pôle nord du moyeu central aplati, elle étudia les nombreux autres bras et modules qui s’étendaient comme les rayons d’une roue. De tailles et de formes variées, les modules avaient été ajoutés après coup, alors que la station se développait asymétriquement. La structure tenait du superbe chaos, tailles, formes et matériaux, tous déployés en une parure scintillante.
Mais la Station Exis se tenait inclinée sur son axe, déséquilibrée par le martellement de siècles d’éruptions brûlantes. Les variations de température avaient peu à peu fait leur œuvre sur la station.
Le soleil lui-même ressemblait à un œil rouge furieux, sa surface agitée de remous et de bouillonnements. Les éruptions s’échappaient comme des raz-de-marée, proéminences jaillissant en geysers de plasma. Les tâches solaires apparaissaient telles des plaies ouvertes à la surface de l’étoile. Le rayonnement lourd de Teedio baignait la Station Exis, traversant ses boucliers, boursouflant les plaques de sa coque. Manifestement, l’endroit ne résisterait guère longtemps.
Elle allait avoir du pain sur la planche.
Au cours de l’évacuation d’Ossus, les Jedi avaient reçu assez de prémonitions sur l’onde de choc de la supernova pour éloigner quelques-uns des plus importants artéfacts, les textes historiques les plus précieux. Ils furent mis à l’abri à bord de la Station pour créer une bibliothèque provisoire, un lieu où ils seraient en sécurité. C’était également d’ici que Nomi Sunrider avait lancé sa légendaire convocation, où les Jedi survivants de la Guerre des Sith avaient débattu du remodelage de la République.
Tionne ne pouvait ignorer le potentiel d’un tel endroit. Elle devait le voir, mettre pied à bord et parcourir les couloirs de l’ancienne et précieuse bibliothèque Jedi – avant que les éruptions solaires n’engloutissent la cité de l’espace et ne l’anéantissent pour toujours.
Depuis le Lore Seeker, elle transmit un signal, espérant que les systèmes automatisés de la station n’aient pas été court-circuités par les radiations ou les effets du temps. Elle fut heureuse de recevoir un signal d’identification archaïque capable d’actionner l’un des docks principaux actuellement du côté sombre de la cité en rotation.
Tionne plia certaines de ses voiles solaires afin de les protéger des dommages potentiels des vents violents du soleil voisin. Elle laissa dériver son vaisseau dans l’ombre de la station. Les portes de la baie d’amarrage s’ouvrirent automatiquement en grinçant, comme heureuse d’accueillir l’un de leurs premiers visiteurs depuis des milliers d’années.
Naturellement, réalisa Tionne, Fonterrat le récupérateur s’était rendu ici, mais elle espérait qu’il n’avait pas su quoi chercher. L’information correspondait à l’estimation qu’elle en avait faite, pas de bijoux ni de quelconque trésor.
Le Lore Seeker se laissa glisser à l’intérieur de la station et se posa au moment où les portes se scellaient derrière lui. Par précaution, elle avala une dose de médicaments antiradiations et s’habilla de vêtements protecteurs. Cela lui laisserait un peu plus de temps pour son exploration.
Sautant hors de son vaisseau, Tionne s’éloigna en hâte. La Station Exis ne disposait que de peu de temps.
Avec R2-D2 inséré dans son logement sur son aile-X, Luke Skywalker décolla de la lune recouverte de jungle de Yavin 4, s’élevant au-dessus des cimes des arbres et laissant derrière lui les ruines désolées du temple. Il s’éloigna de la géante gazeuse orange dans l’espace interplanétaire, se rapprochant de son point de saut hyper spatial. Il avait un endroit important à voir.
— Calcul une trajectoire vers le système Teedio, R2, dit Luke. En route pour la Station Exis.
Plus tard, alors qu’ils émergeaient, engourdis, d’un long vol à travers l’hyperespace, Luke concentra son regard vers la verrière de son cockpit comme le système stellaire se matérialisait brusquement autour de lui.
À grande vitesse, ils filèrent directement dans un fleuve du feu stellaire.
Alors même que Luke réagissait avec des réflexes de Jedi, R2 émit un couinement d’alarme métallique. Luke vira et tournoya, faisant rugir son aile-X pour s’extirper de l’éruption solaire géante qui leur coupa violemment la route comme le coup de langue d’un dragon krayt. L’onde de choc le frappa sur la droite, mais il ne se relâcha qu’une fois que l’aile-X eut décrit une hyperbole serrée l’amenant dans un endroit sûr.
Luke perçu une étrange agonie lui tordre les intestins alors qu’une nouvelle explosion naissait au cœur du soleil déréglé, et qu’une langue flamboyante de gaz ionisés jaillissait de la chromosphère.
La Force était dans toutes choses, Obi-Wan Kenobi l’avait dit, et Luke percevait la douleur, l’angoisse, de cette étoile à l’agonie prématurée.
— Ce n’est pas la meilleure façon de débuter notre visite, dit-il. (R2 acquiesça d’un cri strident.) Recalibre les instruments et nous poursuivrons un peu plus prudemment.
La Station Exis était énorme, miroitante sous effet du rayonnement solaire bouillant qui la baignait. Le port stellaire accidenté tournoyait, essayant de maintenir un semblant de sa pesanteur artificielle d’origine, même si sa trajectoire se faisait tordue et déséquilibrée. Sa précession, à la manière d’un gyroscope, suffisait à la maintenir plus ou moins près de l’enfer stellaire.
Luke l’étudia à distance, notant chaque détail.
— Trouve-nous un port d’amarrage, R2, dit-il tout en se rapprochant de la station tourmentée. Cet endroit est en grand danger.
R2 transmit un message aux antiques systèmes de la Station Exis qui lui répondirent par un avertissement.
— Ça m’est égal que la dernière baie d’amarrage fonctionnelle soit sur le point de se retrouver dans la lumière du soleil, dit Luke. Posons-nous à l’intérieur, nous nous mettrons à l’abri avant que le compartiment ne se réchauffe.
L’aile-X se lança dans une manœuvre serrée, comme si Luke combattait de nouveau les vaisseaux Impériaux. Alors qu’il approchait, il remarqua les calles automatisées réparties autour de l’anneau de la Station Exis, les réacteurs d’ajustement orbitaux et les répulseurs multidirectionnels autrefois utilisés pour stabiliser la ville spatiale. Cependant, lorsque le danger devint trop important, personne ne resta afin de maintenir Exis à distance de sécurité.
Les portes de la baie d’amarrage s’ouvrirent lentement, et Luke y glissa facilement son aile-X, impatient d’être à l’intérieur. L’implacable tâche de lumière solaire rampa comme une flamme à l’extérieur de la coque de la station, mais le Jedi parvint à poser son chasseur et à fermer les portes grinçantes du compartiment avant qu’elle ne frappe directement ce secteur du port stellaire abandonné.
Alors que les indicateurs de sécurité revenaient à leurs valeurs nominales, Luke sauta hors de l’habitacle, passant sous la verrière ouverte de l’aile-X. Comme il se retournait, usant de la Force pour faire léviter R2 hors de son socle, Luke vit un autre vaisseau plus loin à l’intérieur de la baie de chargement : une antique embarcation pourvue d’une configuration exotique employant aussi bien des propulseurs d’hyperdrive intra-système que des voiles solaires triangulaires réfléchissantes pour une navigation lente à l’intérieur du système.
Il pensa de prime abord qu’il s’agissait d’une antiquité, abandonnée avec la Station Exis. Mais il s’aperçut que le vaisseau était chaud, récemment débarqué… un autre visiteur.
— Il y a quelqu’un d’autre ici, R2.
Le petit droïde l’approuva d’un bip, cependant il ne put fournir aucune information sur le type ou le propriétaire de l’étrange bâtiment.
— Peu importe qui ils sont, espérons juste qu’ils prévoient de partir d’ici bientôt, dit Luke. Allons-y, faisons un tour rapide et voyons ce que nous pouvons récupérer avant qu’il ne soit trop tard.
R2 roula péniblement derrière lui pendant qu’il progressait dans les pièces sombres et étouffantes de la station depuis longtemps abandonnée.
Petite et mince, Tionne courrait d’un pas léger le long des corridors métalliques. Elle descendit rapidement les couloirs sinueux, filant sous la lumière clignotante des panneaux lumineux au fonctionnement erratique. Une partie de l’électronique avait été arrachée, récupérée par des individus tels que Fonterrat. Elle se baissa vivement afin d’éviter une plaque qui pendait du plafond et esquiva la carcasse d’un vieux modèle de droïde ouvrier disloqué.
L’air était aigre, vieux, poussiéreux. Le silence s’accrochait comme un linceul, uniquement interrompu par des bruits sourds et des gémissements lointains alors que la station tremblait des attaques furieuses de Teedio. En fond sonore, un sifflement pareil à de l’électricité statique crépitait à la surface de certaines plaques extérieures de la coque, bombardées par la pluie de particules de haute énergie de l’orage solaire.
Elle poursuivit son exploration. Un grand nombre de salles se trouvaient bloquées par des systèmes de sécurité gelés ou de l’amoncellement de débris. Certains des modules d’habitation verrouillés par absence d’air respirable s’étaient retrouvés éjectés au loin dans le vide, ne laissant que des portes scellées donnant sur l’espace et les connecteurs d’où ils avaient été arrachés. Tionne savait que les modules avaient été ajoutés un à un au cours de la phase de croissance de la station ; elle supposait que certains des plus précieux pouvaient avoir été volés d’un bloc à l’épave de la Station Exis.
Les couloirs semblaient la mener vers une zone centrale. Elle suivait ses sensations, captant les détails de ses yeux enthousiastes. Finalement, elle émergea sur une aire de promenade et s’arrêta net, étonnée, alors que ses derniers pas résonnaient encore dans la salle close.
Le plafond en forme de dôme brillait grâce aux fenêtres de transparacier taillées en triangle et en diamant, illuminant de couleurs éclatantes une large surface découverte. Les pulsations de lumière électrique émergeaient de l’étoile en expansion faisant apparaître des tâches sur les plaques ornementales. Des emblèmes fanés et des glyphes familiaux étaient gravés à l’eau-forte sur les murs aux côtés d’archaïques symboles. L’aire close ressemblait à une cathédrale, à un lieu de rencontre… peut-être l’emplacement d’une grande assemblée.
Tionne identifia immédiatement les niches creusées, reposoirs pour d’épaisses plaques de mémoire cristallines, un antique dispositif de stockage d’information. Malheureusement, peu de gens pouvaient encore lire les données d’une telle technologie, et c’est pourquoi les extracteurs n’avaient pas pris la peine de les prendre. Les lui laissant !
Tionne étudia les archives d’Exis avec un plaisir absolu. Elle prit les plaques les unes après les autres, étudiant les résumés gravés, les antiques discours, la philosophie des anciens Chevaliers Jedi, les dernières paroles de maîtres décédés ayant vécu plusieurs centaines d’années auparavant. Le souffle lui manqua, et ses mains se mirent à trembler. Une mine de connaissance ! Toute sa vie, elle avait recherché un trésor tel que celui-ci.
Mais maintenant la Station Exis grondait sous ses pieds, les plaques de son pont gémissant tandis que les éruptions du soleil furieux la martelaient sans cesse, finissant de la ravager. Tionne sentait les difficultés de la station à maintenir son intégrité. Elle devait prendre ces plaques cristallines, autant qu’elle pourrait porter, et se hâter de rejoindre son vaisseau. Elle resterait jusqu’au dernier moment, mais elle devait en sauver le maximum. Elle ne pourrait supporter que tout cela soit détruit.
Elle ramassa les plaques une à une, glissant les épaisses feuilles de cristal sous ses bras, regrettant de n’avoir rien apporté de plus pratique pour les porter. Sa gorge était sèche et sa respiration rapide pendant qu’elle travaillait.
Pourtant, Tionne se figea lorsque, extrayant l’une des plaques, elle découvrit à partir des inscriptions qu’elle contenait un enregistrement du véritable discours de Nomi Sunrider, prononcé lors de la grande convocation des Chevaliers Jedi.
Ces doigts s’engourdirent comme elle saisissait la plaque. Nomi Sunrider en personne ! Elle tenait entre ses mains les vraies paroles, les images ! Elle pourrait voir comment la légendaire héroïne Jedi se déplaçait, s’exprimait, bougeait. Son cœur se gonfla dans sa poitrine.
C’est alors qu’elle sentit autant qu’elle entendit quelqu’un approcher. Elle se retourna juste à temps pour découvrir un homme accompagné d’un droïde astromec. Elle identifia instantanément Luke Skywalker, le héro de la rébellion, à partir de toutes les images qu’elle avait vues. Il était enfin arrivé. Il avait finalement reçu son message par l’intermédiaire de Fonterrat !
— Qui êtes-vous ? Que faîtes-vous ici ? dit Luke. Ne savez-vous pas que c’est dangereux ? Cette station se désintègre.
Cependant, avant qu’elle ne puisse lui répondre, une explosion retentit à travers l’habitacle, raisonnant contre la coque comme un gong. L’onde de choc ébranla la structure, déséquilibrant Tionne. Les plaques de données s’étalèrent tout autour d’elle. L’un des cristaux se brisa, mais les autres demeurèrent intacts. Le droïde astromec couina comme il glissait sur les plaques du pont. Tionne admira Skywalker lorsqu’elle vit comment il était parvenu à conserver son équilibre, usant de ses facultés Jedi de rester sur ses pieds.
« R2, trouve un terminal de données ! cria-t-il. Connecte-toi et découvre de quoi il s’agissait et quels sont les dommages. (Il se hâta de rejoindre Tionne et s’inclina.) Vous allez bien ? Que faîtes-vous ici ? »
Elle rampa sur le sol essayant de récupérer les plaques de données qu’elle avait tenu dans ses bras.
— Je m’appelle Tionne. Je vous ai envoyé un message pour que vous veniez ici. Je pensais que… (Elle haleta, essayant de reprendre son souffle tout en serrant les plaques de données contre sa poitrine.) Je pensais que, puisque vous formez des Jedi, vous voudriez venir ici et découvrir leur histoire.
— Mais c’est toute la station qui se désintègre, intervint Luke. Nous ferions mieux de nous en aller dès que possible.
— Alors aidez-moi à porter certaines de ces plaques. Tionne lui en donna quelques unes de sa pile, puis en repris d’autres dans les archives. Elle regarda tristement la plaque de données brisée sur le sol, puis tint les autres plus fermement. Au moins elle avait sauvé le discours de Nomi Sunrider.
Contre le mûr de la station, R2 se plaignit d’un sifflement tandis qu’il essayait d’adapter ses circuits à l’électronique archaïque de la Station Exis. Au-dessus d’eux, le plafond vibra, comme s’il parvenait à peine à résister aux éruptions ardentes. Luke se rapprocha du petit droïde et lut l’affichage.
— Je suppose que c’était votre vaisseau dans la baie d’amarrage, dit-il par-dessus son épaule.
— Oui, répondit Tionne. Le Lore Seeker.
— Et bien, il n’ira nulle part pour le moment, pas plus que mon aile-X. L’un des moteurs de stabilisation s’est enflammé suite à la tempête de feu, et l’explosion a arraché les circuits de la porte. Nos vaisseaux sont piégés, et comme cette section est maintenant exposée au rayonnement solaire, nous ne pouvons même pas nous y rendre pour commencer les réparations. Nous devons attendre que la Station Exis pivote et que la baie d’amarrage regagne l’ombre.
Tionne se calma comme l’adrénaline de la peur décuplait ses sens, rendant les couleurs plus intenses, le métal chatoyant. Elle écouta les gémissements de l’une des plaques de la coque.
— Si la station survit aussi longtemps, compléta-t-elle.
Luke commença à dire quelque chose, puis le plafond émit un grincement étrange. Il leva la tête, clignant des yeux. Dans un craquement bref, un des panneaux triangulaires de transparacier coloré se détacha des moulures après avoir résisté des milliers d’années.
La décompression qui suivit l’explosion fit éclater les tympans de Tionne. Ses cheveux argentés s’agitèrent sur sa tête tandis que l’air hors d’âge de la de station s’échappait en hurlant à travers le petit orifice.
— Vite, s’exclama Luke, en saisissant son bras, faisant accidentellement tomber plusieurs plaques de données. Nous devons nous confiner derrière une cloison blindée.
R2 bipa et pivota sur ses roues. Luke fit signe à Tionne de le suivre, empruntant le chemin par lequel il était venu, un couloir qu’elle n’avait pas exploré. Il prit immédiatement les choses en main bien qu’il ne sembla pas connaître avec exactitude sa destination. Alors que l’air s’échappait en rugissant derrière elle, elle courut à sa suite, berçant les précieuses plaques de cristal tout en espérant pouvoir revenir s’emparer d’une poignée supplémentaire, mais le changement soudain des contraintes qui s’exerçaient sur la coque de la Station Exis avait entraîné la torsion puis l’éclatement d’une autre fenêtre de transparacier. Bientôt, la salle entière serait inhabitable, exposée à l’espace.
Elle s’élança à la suite du Maître Jedi, ses pieds fins glissant sur les plaques du pont. Ils empruntèrent un passage sur le côté où le couloir s’incurvait le long de la bibliothèque Jedi principale et du musée en direction des modules d’habitation. Luke s’arrêta net devant une porte étanche à double système de verrouillage portant plusieurs marques brillantes. Tionne pensa reconnaître les écritures, un langage de l’Ancienne République, un archaïque texte Jedi.
R2 s’arrêta à l’intersection avec un couloir et gazouilla comme il dépliait son connecteur pour accéder à un autre panneau de contrôle mural.
Luke Skywalker ignora le droïde et courut jusqu’aux doubles portes.
— Si le mécanisme fonctionne toujours, dit-il, nous pourrons nous confiner ici, peu importe où cela mène.
Ses doigts se déplacèrent rapidement sur les touches comme s’il savait instinctivement la manière dont fonctionnait l’antique machine.
Tionne, cependant, ressentit brusquement un grand froid l’envahir alors qu’elle travaillait à traduire les anciennes écritures. Laissant tomber son chargement d’artéfacts, elle se jeta en avant, hurlant, « Non ! » au moment où Luke parvenait à ouvrir les portes étanches.
Telles des griffes, des vapeurs jaunes verdâtres sous pression jaillirent par l’ouverture de la porte. Luke recula en titubant, toussant, incapable de respirer.
Tionne le poussa à l’écart et se précipita vers le panneau de commande, martelant les touches. Elle n’avait aucune idée de la manière dont fonctionnait le système, mais il lui fallait refermer la porte. Le gaz empoisonné continuait de s’échapper. Elle retint sa respiration, mais ses yeux la brulaient, brouillant sa vision. Des larmes brillaient dans ses iris nacrés, mais Tionne luttait toujours avec le système. Enfin, avec un crissement d’engrenages mal lubrifiés, la porte se referma en claquant.
Luke recula en chancelant contre le mur et s’effondra, toussant, essayant de reprendre son souffle après son inhalation de vapeurs toxiques.
R2 couina de triomphe, bipant et clignotant. À l’intersection du couloir une autre cloison étanche descendit du plafond, préservant la zone de la décompression par l’autre côté. Tionne et Luke se trouvaient maintenant à l’abri des fenêtres brisées de la bibliothèque, et les systèmes de recyclage d’air de la station drainèrent rapidement le gaz toxique que le Jedi avait laissé pénétrer dans les couloirs par inadvertance.
Luke utilisa tout ce qui lui restait de force pour reprendre sa respiration. Il regarda vers là où R2 attendait en s’agitant victorieusement.
— Merci, R2. Tu as pensé plus vite que nous.
Tionne regarda Luke avec colère.
— Il s’agissait de l’un des modules d’habitation pour les êtres respirant du chlore ! Il contenait du gaz toxique sous pression. Si nous nous y étions réfugiés, nous serions tous les deux morts en un instant, dit-elle, en secouant la tête. Vous êtes un Maître Jedi – ne pouvez-vous donc pas lire les écritures de l’Ancienne République ?
Penaud, Luke secoua la tête.
— Je n’ai pas encore fini d’étudier. (Il respira profondément et se contrôla pour s’empêcher de tousser à nouveau.) En fait, je n’ai pas encore trouvé de professeur capable de me l’apprendre.
À cet instant, Tionne entendit des alarmes gronder et gémir. Des lumières ambrées clignotèrent autour des doubles portes étanches et dans une explosion, le module d’habitation chargé de chlore fut libéré de ses attaches et projeté loin de la Station Exis, éjecté par une procédure d’urgence.
— Il semblerait que j’ai fait plus que refermer la porte, dit-elle. J’ai désengagé le module entier de la station. (Tionne cligna des yeux, étonnée.) Il devait se tenir prêt à être libéré. Je suis juste intervenue sur l’étape finale.
Le vaste module d’habitation fut projeté au loin, s’éloignant de l’anneau central directement vers le soleil bouillonnant – et sa fin. Tionne sentait la station tanguer, perdre son équilibre et commencer à tournoyer, s’éloignant de Teedio et de ses éruptions.
— Je pense que vous avez bien fait, dit Luke en se levant, les yeux brillants. De la physique de base. Lorsque vous avez fait s’éjecter le grand module, il a exercé une poussée sur la station, nous propulsant dans la direction opposée. Vous nous avez donné un peu de temps.
— Pas beaucoup, répondit Tionne. Elle tenait les plaques chargées d’histoire serrées contre elle, se demandant si elle s’en sortirait vivante afin de les regarder, voir le discours complet de Nomi Sunrider, et contribuer à la connaissance de la Nouvelle République de sa plus précieuse histoire.
Luke Skywalker se leva, une lueur curieuse dans le regard.
— Ce que vous avez fait m’a donné une idée, dit-il. Allons jusqu’au centre de contrôle du moyeu. La Station Exis fonctionne peut-être encore suffisamment pour ce que nous allons devoir faire.
Le centre de contrôle du moyeu de la Station Exis était sombre et moisi, tous les panneaux lumineux avaient été désactivés lors de sa mise en sommeil et de son évacuation. Mais Luke trouva les systèmes automatiques permettant de faire coulisser les épais panneaux roulants qui protégeaient les baies vitrées ceignant la station de contrôle. Les lourds volets coulissèrent péniblement dans les rails corrodés pour révéler au travers de filtres l’éblouissante lumière de la couronne de Teedio.
R2 roula péniblement vers la station principale et laissa échapper un sifflement triste comme il inspectait les vieux ordinateurs. Après vérification, Luke découvrit que la plupart d’entre eux avaient été désactivés, ou leurs circuits tellement altérés par les radiations errantes que leurs banques de données sensibles étaient soit dépassées soit incohérentes.
— Occupe-toi des commandes et fait ce que tu peux, R2, dit-il, tout en examinant les panneaux. Tionne, j’aurais besoin que vous m’aidiez à traduire certains de ces symboles. (Il lui sourit.) Je ne voudrais pas commettre une autre erreur stupide.
— Ce serait un bon début, répondit la femme aux cheveux d’argent, braquant sur lui ses inquiétants yeux mercures. Elle paraissait avoir un problème avec lui en tant que personne. De prime abord, elle avait semblé éprouver de l’admiration, un Jedi dont elle avait tant entendu parler. Maintenant elle paraissait quelque peu déçue de devoir également l’accepter en tant que simple humain.
— Une fois que nous connaîtrons la signification des commandes, nous devrons les refaire fonctionner.
Luke se tint à ses côtés alors qu’elle analysait les étiquettes effacées et les mots gravés sur le panneau de contrôle. Il testa les programmes et vérifia les mécanismes. Il espérait quelques-unes des fusées de stabilisation encore capables de toussoter et de les propulser suffisamment pour sortir la Station Exis de la zone dangereuse de la tempête de feu… au moins jusqu’à ce que la baie d’amarrage revienne dans l’ombre, où Luke pourrait s’occuper des portes bloquées afin de libérer son aile-X et le vaisseau à voile solaire de Tionne.
Tionne parvint à faire apparaître un diagramme représentant la station et sa position. Elle identifia les modules d’habitation attachés aux extrémités des rayons d’extension. Le module d’arrimage dans lequel se trouvaient leurs deux vaisseaux avait dépassé la zone où le flux solaire était le plus intense, mais il faudrait encore un long moment avant qu’il n’atteigne la sécurité relative de l’ombre.
Maintenant l’un des plus vastes modules d’habitation alien grillait sous la chaleur. Si Luke interprétait correctement les dires de l’ordinateur, le compartiment devait être rempli d’eau pour satisfaire les créatures marines.
Le Jedi leva les yeux en sentant une nouvelle fois une torsion dans sa poitrine, une émanation soudaine et violente provenant du soleil. Il leva les yeux pour découvrir la géante rouge boursoufflée concentrer, régurgiter et expulser une énorme proéminence dans l’espace telle une lance de feu. Le plasma dense fusa vers eux formant la plus énorme vague qu’ils aient vue.
Tionne la vit également.
— Nous ne pourrons pas survivre à cela. La Station Exis va être incinérée.
Luke retourna à l’analyse des commandes inertes, essayant frénétiquement de refaire fonctionner les fusées de la station. La plupart d’entre elles demeuraient éteintes, mais il en réactiva trois du côté exposé au soleil qui lui permirent d’exercer une nouvelle poussée sur l’épave abandonnée. La Station Exis oscilla, poursuivant la lente dérive initiée lors de l’éjection par Tionne du module chargé de gaz chloré. Cependant, cette faible poussée ne leur permit pas d’atteindre la vélocité nécessaire et l’explosion mortelle de feu solaire fondait sur eux à une vitesse incroyable.
— Ces fusées sont les seules qui fonctionnent, dit-il. Je vais les pousser à fond. Peut-être nous donneront-elles la poussée nécessaire pour nous éloigner suffisamment et survivre. (Il déglutit péniblement.) Mais vous feriez mieux de vous accrocher.
Il pressa les boutons, attendant la poussée. Mais les indicateurs de contrôle virèrent au rouge quand deux moteurs lâchèrent. Puis, une explosion ébranla la station.
— Deux nouveaux modules de carburant viennent juste d’exploser.
Le regard de Tionne glissa des écrans de contrôles vers lui. Il s’attendait à découvrir davantage de peur dans ses yeux, mais son visage se révéla dur.
« Nous allons mourir dans l’espace, et il n’y a rien que nous puissions y faire. »
— Je n’abandonnerai pas, dit Luke. Nous devons simplement comprendre comment fonctionne cet endroit.
Il revint aux commandes et appela les diagrammes représentant le module d’habitation rempli d’eau. Il se trouvait à présent sous les rayons les plus durs du soleil, le revêtement de sa coque devait avoir viré au rouge cerise maintenant. Les alarmes de stabilité se mirent à clignoter. Le panneau de diagnostic et l’intégrité de la station ne tiendraient pas une fois que le plus gros de la tempête de feu les aurait atteints.
R2, trouve les portes de déchargement d’urgence du module aquatique ! cria-t-il.
— Pour quoi faire ? Demanda Tionne.
— Nous n’avons pas le temps ! dit Luke.
Le petit droïde bipait déjà, analysant les commandes, pressant les ordinateurs peu fiables afin de récupérer la moindre information. Enfin, les codes apparurent, et Luke frappa du poing le bouton d’urgence, ouvrant vers l’espace les doubles portes extérieures de chargement, exposant l’énorme volume d’océan aux éruptions ardentes.
Des milliers de tonnes d’eau de mer s’évaporèrent encore et encore dans la chaleur incandescente et le vide mortel. Luke s’agrippa à l’un des fauteuils non loin de lui comme la station tout entière vibra puis commença à s’éloigner de plus en plus vite.
— Nous avons atteint une vitesse suffisante ! dit Tionne.
— Espérons simplement qu’il y aura assez d’eau, répondit Luke.
La Station Exis accéléra et continua d’avancer. L’incroyable éruption solaire fondait sur eux, mais elle sembla perdre du terrain comme ils s’éloignaient d’elle. La cité abandonnée gémit et frissonna, parvenant à peine à maintenir son intégrité.
Luke continua de frapper les commandes et parvint finalement à refaire fonctionner l’un des moteurs de stabilisation. La petite fusée ajouta sa puissance au grondement faiblissant de l’océan qui s’évaporait en s’échappant.
— Ce module devait sans aucun doute receler un grand nombre d’artéfacts intacts, dit Tionne avec lassitude et tristesse.
— Au moins nous sommes intacts maintenant, fit Luke.
La langue serpentine de magma solaire atteignit son apogée et commença à s’enrouler en direction du soleil, attirée par la gravité de Teedio et son champ magnétique, s’éloignant d’eux.
— La Station Exis devrait être à l’abri maintenant, dit Tionne, pour au moins quelques centaines d’années encore.
Luke lui sourit.
— Cela vous laisse beaucoup de temps pour revenir et examiner tout ce qu’il vous plaira.
Une fois de retour dans l’ombre, la baie d’amarrage refroidit suffisamment rapidement pour que Luke, Tionne et R2 puissent sans risque y revenir. Le pas léger, Tionne se hâta de regagner le Lore Seeker afin de s’assurer qu’aucun de ses anciens et délicats systèmes n’avaient été endommagés.
Pendant que R2 arrivait pour lancer le diagnostic de l’aile-X à l’aide de ses propres systèmes d’analyses, Luke inspecta les commandes automatiques contrôlant l’ouverture de l’énorme porte de la baie d’amarrage. L’explosion responsable de l’éclatement des stabilisateurs avait également fait sauter les câbles de connections. Avec une expression sinistre au visage, il sortit son sabre laser et l’activa. La lame d’énergie jaune grésilla dans la pièce close.
— Nous allons devoir le faire manuellement, dit Luke comme il sectionnait les câbles d’alimentation de l’ordinateur. Le mécanisme étincela puis s’éteignit. Maintenant il sera plus simple de déclencher l’ouverture des portes scellées.
Incapable de s’en empêcher, Tionne se tourna pour fixer, émerveillée, la lame Jedi. Ses yeux nacrés s’écarquillèrent, et sa fine bouche béa d’étonnement.
Quand il vit sa fascination, Luke leva son sabre laser en signe de salut.
— Vous ne m’avez jamais donné la raison de votre présence ici, Tionne, dit-il. Pourquoi m’avez-vous envoyé ce message disant que je devais venir ici ?
— Parce que vous êtes un Jedi, dit-elle. Je sais que vous avez l’intension de former d’autres Chevaliers, et j’ai senti que vous deviez connaître tout le savoir stocké ici, sur la station. Elle leva les plaques de données qu’elle avait sauvées.
— Je ne peux qu’être d’accord, dit Luke. Mes connaissances de l’histoire Jedi reste très superficielles.
Tionne inséra l’une des plaques de données dans le lecteur hors d’âge.
— Regardez ça, par exemple. Si vous avez l’intention de former de nouveaux Chevaliers Jedi, vous devez connaître leur histoire, ce que les autres Jedi ont fait.
La petite image holographique vacillante d’une jeune femme d’allure volontaire émergea du lecteur en scintillant. Elle était mince, habillée d’antiques vêtements et ses cheveux étaient coiffés en arrière, une coiffure pratique mais peu élégante. Son visage aurait pu être doux et beau, mais les tragédies semblaient l’avoir endurcie, marquant davantage ses traits.
— Ensemble nous avons subit un grand désastre, il est maintenant temps de panser nos plaies, dit-elle.
— C’est Nomi Sunrider, chuchota Tionne. L’un des plus importants de tous les Chevaliers Jedi. C’est un discourt qu’elle a prononcé ici, sur la Station Exis, lors de la convocation Jedi.
Luke écouta religieusement comme Nomi poursuivait.
— La guerre a envahit toute la galaxie, mais maintenant elle est terminée. Nous ne pourrons jamais oublier les morts, mais nous ne devons pas non plus négliger le futur. Nous devons avoir foi en la Force. Aussi longtemps qu’il y aura des Chevaliers Jedi, l’espoir survivra.
Nomi continua, mais Luke sentit son esprit s’évader.
— Ces mots ont plusieurs milliers d’années, dit-il, mais ils sont toujours pertinents aujourd’hui.
— Les faits historiques gardent toujours leur pertinence, dit Tionne. (Elle déglutit difficilement et leva les yeux vers lui.) Je crois que vous possédez un Holocron tout autant rempli d’histoires.
Luke acquiesça.
— C’est vrai. Mais ça n’explique pas votre intérêt.
— J’ai toujours été fascinée par les Jedi, dit-elle en haussant les épaules, mal à l’aise. Leurs histoires, leurs légendes, je les ai collectionnées toute ma vie. C’était presque compulsif. Je connais un grand nombre de chansons, de ballades, autant d’histoires que j’ai pu en rassembler, bien que l’Empire ait détruit beaucoup d’enregistrements.
Luke la regarda avec intérêt.
— Pensez-vous pouvoir en partager certaines ? Voudriez-vous bien venir sur Yavin 4 pendant que j’y installe mon Académie Jedi ? Vous pourriez peut-être me dire là où je me trompe, m’indiquer les chemins que j’ai à connaître. Sans quoi, je devrai passer des années à rassembler un savoir identique à celui que vous avez déjà trouvé.
Tionne se redressa, rayonnante de joie. Puis elle se calma et se tint droite, le menton bien haut.
— J’en serai honorée, Maître Luke Skywalker.
— Et qui sait, dit Luke, vous pourriez vous même posséder un certain potentiel Jedi.
— Je n’en espère pas tant, dit Tionne. (Elle parla à voix très basse, un murmure à peine articulé.) Mais vous ne trouverez jamais d’étudiant plus dévoué.
Quand ils entendirent les vaisseaux approcher, Gantoris et Streen sortirent du temple ombragé, levant les yeux vers le soleil brumeux du midi. Ils virent non seulement les formes argentées de l’aile-X de Luke Skywalker mais également celles d’un autre étrange vaisseau.
La sphère orange de Yavin dominait l’horizon, chatoiement d’oranges pastels tel l’œil d’un géant pétri de cataracte. Les vaisseaux en approche passèrent devant la planète. Streen s’émerveilla de la silhouette de l’autre vaisseau, un ancien modèle pourvu d’une large voile triangulaire.
— Pour le vent, dit-il. Le vent solaire.
Gantoris lui jeta un regard oblique.
— Maître Skywalker a probablement trouvé un autre étudiant.
Ils allèrent à la rencontre des deux vaisseaux comme ils se posaient sur l’aire d’atterrissage calcinée devant le temple. Luke ouvrit la verrière de son aile-X et en sortit, posant son regard sur le vaisseau de Tionne. La femme mince aux cheveux argentés descendit avec grâce les barreaux métalliques de l’échelle d’embarquement et leva des yeux stupéfaits vers les ziggourats aux pierres usées. Puis elle regarda Streen et Gantoris.
— Voici Tionne, dit Luke. Elle a déjà étudié plus de traditions et d’histoires Jedi que tous ceux que j’ai rencontré, j’ai donc pensé qu’il serait bon qu’elle vienne sur Yavin 4.
— Va-t-elle également s’entraîner avec nous ? demanda Streen.
Luke eut un sourire énigmatique puis jeta un bref regard à Tionne.
— Oui, je le pense. Je l’ai testé lors du voyage jusqu’à Yavin. Elle possède une affinité avec la Force, et elle pourrait se révéler d’une grande aide pour mon propre enseignement.
Tionne sourit, le souffle rendu court par l’excitation.
— Bientôt, Maître Skywalker, j’espère qu’il y aura de nombreux autres nouveaux Chevaliers Jedi qui construiront de nouvelles histoires que nous pourrons raconter.
Et ensemble, ils marchèrent dans l’ombre fraîche du Grand Temple.