Enquête intime pour peau lisse
Alors qu'il écartait un à un les
orteils de Sonia, effleurant doucement la pulpe de chacun d'eux,
avant de les sucer goulument. Bakar se demandait jusqu'où
pourrait-il aller pour résoudre une énigme. Pourquoi cette soif
insurmontable de savoir vite le possédait ?
N'aurait–il pas pu attendre,
l'interroger plus conventionnellement, demain, dans son
bureau ?
Non, la clef était là, sous ses doigts
et il n'aurait de cesse de la caresser, de la scruter millimètre
par millimètre jusqu'à ce qu'elle parle.
Tout avait commencé dans l'après–midi.
Quand une belle femme de quarante ans fit irruption dans le
commissariat, voulant être entendue en urgence.
Bakar absorbé par une affaire de
meurtre en série, ne pouvait la recevoir et envoya un inspecteur
prendre sa déposition. Des cris fusèrent bientôt dans le
couloir.
— C'est un scandale ! Le
préfet est un ami vous aurez de mes nouvelles !
Bakar agacé, dénia sortir de son
bureau et se trouva devant une ravissante femme, cheveux courts,
peau matte, nez refait, lèvres aussi. Elle était toute de blanc
vêtue avec un chemisier à manches longues et pantalon moulant se
resserrant aux chevilles sur un pied serti de chaussures noires à
talons fins et hauts. Les formes qu'épousait cette première et fine
couche de tissus, ne laissèrent pas le commissaire insensible. Les
seins comme les fesses faisaient saillie, et ce corps
magnifiquement modelé semblait entièrement couvert d'une sorte de
résille sombre qui apparaissait en transparence sous les habits
blancs. Un discret et gracieux tatouage épousait le coup de pied et
allait s'insinuer sous le pantalon comme un appel à le suivre plus
haut.
— Que se passe–t–il ?
La femme, apercevant la silhouette
juvénile de Bakar, monta d'un ton de voix.
— Je veux parler au
commissaire ! Pas à un inspecteur incompétent, ni à un jeune
stagiaire
Bakar, toujours amusé par ces
quiproquos relatifs à son age, s'empressa de préciser qu'il était
le commissaire en personne.
À ces mots, la pulpeuse plaignante,
croyant en une plaisanterie caressa la joue de Bakar.
— Un commissaire presque en
culottes courtes ! Comme c'est amusant !
Bakar prit la main de la femme et la
baisa.
— Commissaire Bakar ! Pour
vous servir madame ! Veuillez entrer dans mon bureau je vous
en prie !
Et, joignant le geste à la parole, il
mima une révérence et tendit le bras vers la porte de son
bureau.
Tout le personnel du poste de police
retint un fou rire. Alors que la bourgeoise sexy se précipitait à
l'intérieur.
C'est bien là que tout a commencé,
quand le commissaire a observé ce visage refait, quand la femme a
annoncé qu'on lui avait volé son portefeuille avec tous ses
papiers, et surtout une photo d'elle avant .Cet avant fut
prononcé avec un certain mystère et une certaine gêne.
— Avant quoi madame ?
— Et bien avant,mes
interventions…
— Ah! Je comprends mieux !
Une photo de votre visage avant la rhinoplastie et…
— C'est cela ! Oui entre
autres… Murmura-t-elle agacée
Tout a commencé quand elle a commencé
à plaisanter sur son age, et celui de Bakar. Quand elle a dit
qu'elle était née à Renne. Quand elle a croisé les jambes et qu'un
pied cambré et tatoué vint dépasser du bureau, que le regard de
Bakar croisa celui de Madame Sonia Duval épouse du richissime
Pierre Henry Duval depuis peu. Tout a vraiment commencé, quand elle
l'invita à souper.
— Mon mari sera ravi de faire la
connaissance du plus jeune commissaire d'Europe et peut–être du
monde !
Ce qui devait être une récréation dans
une après–midi studieuse où Bakar fit défiler des heures les photos
du cadavre mutilé, dernière victime du tueur en série, dit "des
tatoueurs" , devint le prologue d'une enquête d'un genre très
spécial.
À vingt heures très précises le jeune
Bakar sonna à la porte des Duval. C'est monsieur, chauve,
rondouillard, mais un regard vif derrière ses lunettes qui reçut le
commissaire. Vif ou inquiet, Bakar ne sut analyser ce regard .
Madame n'avait pas changé de toilette, n'avait pas changé de
sourire. Un sourire indéboulonnable, figé, entre son dernier baisé
authentique et sensuel et son dernier lifting. La main qu'elle
tendit et qui se referma sur celle du jeune flic, avait une douceur
infinie, le temps qu'elle mit à lâcher prise parut tout aussi
infini. Bakar avait le sentiment de se vautrer dans une nasse
sensuelle, que le repas, qui suivit, ne fit que confirmer. Sonia
alliait le charme désuet et discret d'une maitresse de maison avec
la sensualité féline débridée d'une femme qui cherchait à plaire
autant à son compagnon qu'à son hôte.
Mr Duval ,au fil du repas , passa de quelques caresses discrètes sur les fesses de sa femme, à une main appuyée entre ses cuisses, de quelques compliments sur la saveur des mets, à des regards extatiques sur le décolleté de madame. A la fin du repas et quelques verres de vin en trop, Mr Duval posa ses mains sous les seins de sa femme, soupesant, et faisant balloter les deux trésors relookés par quelques chirurgiens esthétiques. C'est Duval lui–même qui saisit la main de Bakar pour la poser sur un sein de son épouse. Sonia se prêta au jeu avec une moue de désapprobation, que son visage figé laissait osciller entre l'extase et plus encore. Mais pas un geste pour enlever la main du commissaire qui déjà se glissait sous la chemise, avec le regard approbateur de son mari.
Bakar parut surpris par ce qu'il
découvrait à la palpation. Elle n'avait pas de soutient gorge, ni
autre tissu sous sa chemise. Alors, que voyait–il en transparence
sous le chemisier ?
Duval s'appliqua à déboutonner
lentement la chemise de madame, laissant apparaître une poitrine
magnifique entièrement tatouée. La résille que Bakar imaginait,
était en fait un lacis de fines arabesques ou de dessins
merveilleusement agencé sur les volumes de son corps. La chemise
tomba, découvrant un buste sans un millimètre de peau vierge
d'encre. Duval ivre malaxait, suçait les tétons de sa femme sous le
regard de Bakar. Bakar matait la scène sous le regard de madame qui
le conviait à se joindre au festin.
Mais le commissaire restait
impassible, mais pas de marbre quand l'indexe de Sonia passa de sa
bouche aux lèvres du flic. Ce qui embrasait le cerveau de Bakar,
allait au–delà du spectacle de ce couple adepte de triolisme qui
pensait avoir pris Bakar dans la toile du désir, ce qui n'était pas
totalement faux.
Le flic était aussi homme, mais l'idée
de partager le lit avec ce porc de Duval freinait son plaisir. À
moins que son désir de percer une énigme soit plus fort.
Alors que Sonia s'agenouillait pour
pratiquer une fellation à son époux. Duval le pantalon baissé
jusqu'au genou, et le sexe en berne s'effondra et se mit à ronfler
bruyamment.
Mme Duval, la poitrine triomphante, se
leva aussitôt, tira Bakar de sa chaise, l'entraina dans la chambre
où un lit a barreau en fer forgé stylisé et torsadé les
attendait.
— Il a pris un stilnox pour se
désinhiber, mais avec le vin, c'est plutôt le sommeil qu'il a
libéré !
Là, le commissaire continua
l'effeuillage et fit glisser lentement le pantalon qui révéla un
bassin et de longues jambes tout aussi tatouées jusqu'aux
chevilles. Sur le dos des pieds, se dessinaient deux arabesques
terminales en forme de virgules.
À genou aux pieds du lit, Bakar
entreprit l'exploration méthodique de ce corps orné de dessin
fabuleux, d'arabesques ondulantes et peut–être de secrets
insondables.
À chaque caresse qui peu à peu
remontaient le long des jambes, puis des cuisses suivant le tracé
du dessin, Sonia gémissait de plaisir, son corps reptile ondulait,
mais aussi frissonnait. Nue, elle se laissait aller au regard de
son très jeune amant de vingt ans son cadet, et cette différence
d'âge la comblait encore plus. Plaire à un grand ado, n'était–ce
pas la finalité de ce corps sculpté, sans age et intemporel. Aussi
quand Bakar mit les menottes aux poignets de Sonia pour les fixer
aux barreaux du lit, cette nouvelle soumission, cette nouvelle
exposition au regard de son jeune amant fit monter d'un cran son
excitation.
— Vingt ans et déjà tordu !
Tu promets mon garçon ! dit–elle pour le défier encore
plus.
Le commissaire lui posa bientôt un
foulard sur les yeux, ses mains reprirent leur chemin le long des
cuisses, toujours plus haut, toujours plus pressantes. Ce que Sonia
ne vit pas, c'est que Bakar caressait avec ses lèvres et une main,
l'autre tenait une loupe et scrutait centimètre par centimètre la
peau de son amante. Il lisait sa vie sur son épiderme comme dans un
livre.
Quand il s'attardait plus longtemps
sur un point de son anatomie, elle se tordait de plaisir, il est
vrai que le point qui paraissait attiré particulièrement le
commissaire se situait sur le pubis ou plus exactement à sa base, à
quelques centimètres d'un bouton rose tendu et indemne de tatouage.
La loupe glissait sur le mont de vénus soigneusement rasé, alors
qu'un doigt de l'autre main dansait sur le bout de chair
voluptueux, arrachant des murmures puis des cris d'extase.
Le ventre était un paysage, un coucher
de soleil ou l'astre d'or était centré sur le nombril. Pour
explorer le dos, Bakar fit pivoter le bassin en repoussant une
jambe en ciseau le plus haut possible, les hanches et l'arrière des
cuisses, ainsi offertes, permettaient une exploration plus facile à
la loupe fureteuse. Les fesses étaient couvertes d'un entrelacs de
mains, donc chaque doigt allait mourir près de l'anus. Les lombes
étaient dominés par une arabesque géante et symétrique dont
quelques tentacules assaillaient l'arête dorsale.
L'exploration de Bakar était
accompagnée de gémissement d'aise.
Quand Sonia perçu le flash d'un
appareil photo, elle faillit défaillir de bonheur, dans un orgasme
où se mêlaient. Halètement, et quelques mots murmurés.
— Tu es vraiment tordu mon Bakar
chéri, mais j'aime ouiiii! Prends–moi en photo !
Le jeune amant assouvissait le
fantasme de Sonia, donner son corps en pâture aux regards, des
regards, ensemble, nombreux, ceux de son mari comme ceux des amants
de passage, ceux des amis de son mari ,parfois même des maitresses
de son mari. Tout était bon pour jouir d'être vue. Elle avoua que
chaque séance de tatouages s'achevait par un orgasme. Quand Bakar
eu terminé l'exploration des seins, merveilleusement décorés par
des bouches pulpeuses qui s'entrouvraient pour laisser jaillir les
tétons tendus en permanence. Il s'enfonça doucement gainé de latex
dans le sexe fontaine de Sonia et jouit rapidement. Sonia dormait
déjà.
Le commissaire se rhabilla
méthodiquement, prenant soin de ne rien laisser de son passage. Il
détacha doucement Sonia, de ses menottes, la couvrit du drap et
posa un tendre baiser sur ses lèvres molles de sommeil.
Duval dormait toujours dans le salon,
Bakar en profita pour fouiller minutieusement la maison. Puis il
sortit son téléphone portable.
— Allo ?Carrière ?
Bonjour, c'est Bakar, j'ai besoin de vous voir au
commissariat.
Le lieutenant était dans le pâté, mais
savait que le commissaire n'appelait jamais pour rien en pleine
nuit.
— Envoyez un fourgon
discrètement au 59 rue enclos Rey , qu'on surveille et attende
les ordres»
Carrière mit un moment avant de
réaliser que l'adresse en question était celle de Duval, le
richissime ami du préfet.
Le lieutenant trouva le commissaire
dans son bureau.
— Je vous dérange en pleine nuit,
aussi j'en viendrais très vite aux faits.
Hier matin, alors que nous examinions
le dossier de la cinquième victime du serial tueur de tatoueurs,
Yohan Virlix. J'ai été intrigué par cette photo de femme nue d'une
vingtaine d'années.
Tout d'abord parce que l'essentiel des
photos que nous avions chez les précédentes victimes était des
cliché de tatouages, d'hommes et de femmes, alors que sur celle–ci,
le modèle présentait une peau vierge. Ensuite parmi les nombreux
clichés retrouvés chez les autres tatoueurs victimes, certaines
photos m'ont intrigué. Regardez celle–ci, trouvé chez Franck
Lazzaro, première victime, on voit bien un buste de femme nue déjà
copieusement tatoué, en haut du thorax, on reconnaît une licorne au
galop, le sommet de l'épaule reste vierge, les seins aussi.
Regardez à présent cette photo retrouvée chez Isidore Villalonga,
deuxième victime, toujours dans sa boutique de tatoueur. On y voit
le même dessin au sommet du thorax, complété sur l'épaule par un
papillon multicolore qui semble fuir devant la licorne. Quelques
arabesques ornent à présent un sein, comme une liane qui épouse ses
formes . La pose est différente, mais la forme des seins, et la
continuité du dessin nous suggèrent qu'il s'agit du même modèle
féminin.
Dans les ateliers de Paul Buvard et
Stéphane Lessaim respectivement troisième et quatrième victimes, on
retrouve parmi les centaines de photos modèles de leur atelier de
réputation nationale, un même buste avec les mêmes dessins qui
s'affinent et se complètent témoignant toujours du passage de la
même cliente. Cela à des milliers de kilomètres, et plusieurs
années de différence, car les seins prennent une forme de plus en
plus oblongue. Regardez à présent, cette jambe et ce petit tatouage
unique sur le dos du pied retrouvé dans l'atelier d’Yohan Virlix
dernière victime assassinée dans notre ville et pourtant résidant à
Renne.
Bakar tendit sa loupe au
lieutenant.
— Regardez sur le premier cliché
de la femme nue sans tatouage, précisément observez son pied
Carrière fronçant les sourcils put
remarquer la tache noire à peine visible du tatouage sur le dos du
pied de la très jeune femme.
Regardez cet autre cliché de jambe,
trouvé chez Séphane Lessaim, quatrième victime. On retrouve le même
motif sur le dos du pied bien sûr complété de centaine d'autres
dessins qui recouvrent la jambe en entier.
— Qu'est – ce que cela vous
inspire lieutenant ?
Carrière fit une moue
dubitative.
— Allons lieutenant !
Premièrement, une même femme a été cliente des cinq tatoueurs en
des lieux et époques différentes. Deuxièmement, la dernière victime
est paradoxalement son premier tatoueur car elle possède des photos
d'elle entièrement nue, vierge de toute encre ou presque.
Le lieutenant ne paraissait guère
enthousiasmé par les découvertes de son patron. D'autant plus,
qu'il aurait pu les lui révéler au matin à la reprise du travail,
pas en pleine nuit.
Bakar poursuivit
— Troisièmement, la femme tatouée
est venue nous rendre visite hier après midi !»
Carrière faillit recracher le café
qu'il s'apprêtait à boire pour rester éveillé.
— Eh! Oui ! lieutenant, la
pulpeuse madame Duval à qui on avait volé les papiers et surtout sa
photo de jeunesse, avec les seins blancs et le nez
d'origine ! Madame Duval avait un seul tatouage visible
sur le dos du pied. N'avez–vous pas remarqué cela, Carrière, ces
jambes longues et magnifiques campées sur des pieds qui exposaient
ces tatouages.
Carrière n'avait vu qu'une emmerdeuse
de plus.
— Mais alors, ce serait elle, la
criminelle ?
— Je ne le pense pas lieutenant.
Reprenons le mode opératoire, du tueur psychopathe. Il lie les
membres de ses victimes, leur découpe un morceau de peau jamais au
même endroit, scarifie le dos d'une arabesque géante,puis les
égorge. Les victimes ne sont pas droguées, mais assommées et rouées
de coups. Une femme seule et sophistiquée comme Sonia ne prendrait
pas le risque de se casser un ongle à cette besogne.
— Elle a donc un
complice ! —
— Non plus, elle ne serait pas
venue au commissariat nous braver pour ce dernier meurtre alors
qu'elle ne l'avait jamais fait pour les précédents. Non !Il
faut bien lire le rapport d'autopsie du dernier meurtre, celui
d’Yohan Virlix.
Lui seul, des cinq victimes, est tué
d'un coup de révolver, puis égorgé, puis un lambeau de peau est
découpé sur le ventre comme sur Stéphane Lessaim, le quatrième. Pas
de coup, pas de violence,le lambeau de peau découpé et le cou
tranché sont réalisés post mortem. Pas d'arabesque dans le dos.
Tout se passe comme si ce cinquième meurtre était une version light
des précédents et surtout du quatrième. Bref tout conduit à penser
que ce cinquième meurtre n'est pas l'œuvre du serial killer.
Le lieutenant s'était assis, pendu aux
lèvres du commissaire, comme un spectateur, d'une intrique vieille
de vingt ans qui se dénouait sous les neurones de Bakar. Il restait
hypnotisé par le timbre aigu de sa voix d'ado, ses gestes de
rappeur, et la fumée odorante qui sortait à présent de sa pipe
.
— Car, voyez–vous lieutenant, le
serial killer était Yohan Virlix.
L'inspecteur sortit à nouveau de sa
torpeur, devant cette affirmation subite.
— Voyez–vous, Carrière, la
scarification dans le dos des victimes, est exactement la
reproduction, en plus grand, du tatouage au dos des pieds de Sonia,
dont on sait qu'elle est l'œuvre de son premier tatoueur :
Yohan Virlix.
— Cela ne nous donne pas le nom
de son assassin
— Oui, en effet, mais je dois
vous avouer que j'ai été invité par le couple Duval, hier soir.
J'ai profité d'un moment de flottement pour fouiller la
maison
Carrière restait dubitatif.
— Un flottement
patron ?
— Heu, oui, un flottement, ce
serait trop long à vous expliquer et hors sujet ! J'ai
découvert le portefeuille de Sonia, soit disant volé sans la photo
de ses vingts ans ,des lettres d’Yohan Virlix qui exerçaient un
chantage sur le pauvre Duval, le menaçant de photos compromettantes
de sa femme et de lui en pleins ébats avec plusieurs amants. Duval
semblait adepte du triolisme. Sur les lettres, des détails
troublants sur le mode opératoire des meurtres, en particulier du
plus récent. Duval a dû réussir à rencontrer Yohan chez lui,
l'assassiner avec son arme, puis maquiller le crime avec la mise en
scène du dernier crime de Yohan Virlix, et surtout récupérer les
photos compromettantes. Le plus étonnant, est que Franck ne
désirait , qu'une seule chose en échange : une photo de Sonia.
Celle où elle pose à vingt ans, nue et vierge de tatouage,telle
qu'il avait connu avant de composer son œuvre dont il voulait être
le seul et unique artisan, mais qu'il du partager, contre son gré,
avec d'autres amants tatoueur de Sonia. Cette photo était
précisément celle du portefeuille, soi–disant volé, mais en fait
subtilisé par son mari, pour l'échange, qui a du mal tourner .
Duval a récupéré à la hâte les photos compromettantes, en oubliant,
celle de Sonia méconnaissable à vingts ans avant les plasties
esthétique du nez et des lèvres.
Carrière restait en admiration devant
son jeune commissaire.
— Tout cela ne nous donne pas les
motivations de Yohan.
Bakar tira une bouffée de sa pipe en
regardant le plafond.
— On peut imaginer qu'il était
amoureux de Sonia depuis ses débuts à Renne. Puis, elle l'a quitté
pour d'autres tatoueurs qui ont complété l'oeuvre qu'il avait
commencé sur son corps. Il les a donc éliminés un à un sauvagement
par vengeance.
— Le lambeau de peau découpé a
vif sur chaque victime restera le mystère patron!
Bakar tira une dernière bouffée de sa
pipe.
— Pour vous et pour tous
probablement
Carrière compris que le patron n'avait
pas tout dit. Il le suivit en salle d'autopsie ou se trouvait
encore le corps de Yohan. Bakar s'empara fébrilement d'un rasoir,
s'appliqua à raser le pubis du cadavre. Là, en arc de cercle, juste
à la naissance de la verge était tatoué: Sonia .
Le commissaire releva la tête pour
balancer son regard dans le vide, dans une rêverie, où sa main, il
y a quelques heures, écartait doucement la peau glabre du pubis de
Sonia, pour découvrir, sous la loupe, inscrit en arc de cercle au
dessus de son clitoris saillant et humide : Yohan.
La même loupe devait lui révéler,
tatoué sur l'épaule droite un autre prénom : Paul. C'est bien
sur l'épaule de Paul Buvard qu'un lambeau de peau fut arraché. La
loupe, sous les gémissements de Sonia, permit encore de découvrir
sur l'épaule gauche le prénom Isidore. C'est bien sur l'épaule
gauche d'Isidore Villalonga qu'il manquait un lambeau . L'épiderme
qui manquait à Franck Lazzaro était au dessus du nombril.
C'est bien au–dessus du nombril soleil de Sonia que s'étalaient les
lettres du prénom de Lazzaro.
Carrière le sortit de sa
rêverie.
— Qu'est–ce que cela
signifie,patron ?
— Je ne sais pas
lieutenant.
L'inspecteur ne le crut pas un
instant. Mais Bakar avait décidé que la peau de Sonia ne regardait
personne, pas même un juge. Bakar ne parlerait pas de ses
tatouages, il n'aurait pas supporté l'œil lubrique d'un flic sur le
corps de Sonia, un œil non consenti et non désiré. Seul un amant mu
par le désir, pouvait apprécier ce chef d'œuvre,seules les
ondulations voluptueuses du corps de Sonia, donnaient leur
plénitude aux dessins .
Le juge mit Duval en garde à vue,
Sonia fut entendue comme simple témoin. Ni Sonia, ni Pierre Henry
ne révélèrent la soirée avec le commissaire.
Duval en prit pour deux ans, un bon
avocat et de bons soutiens ne furent pas étrangers à ce verdict
clément. Il est vrai qu'il y avait d'autres prénoms tatoués sur le
corps de Mme Duval, ceux probablement de tous ses amants ou
amantes. Bakar put y lire un certain Fredleborgne, probable
pseudonyme d'un amour anonyme, Benoit, Jacque, François, des
prénoms presque tous banaux, sauf un couple! Et cela ne s'invente
pas : Nicolas et Carla.