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Depuis plusieurs jours, les gouvernements des pays membres de l’OTAN cherchaient à savoir qui avait lancé l’attaque sur Jérusalem, car personne ne l’avait encore revendiquée. Pire encore, les journalistes lançaient des hypothèses à tort et à travers, sans vérifier leurs sources. Ces accusations non fondées enflammaient évidemment les pays visés qui, à leur tour, pointaient leurs voisins. Au lieu de travailler ensemble à découvrir le véritable coupable, ils envenimaient énormément la situation.

Comme la plupart des agences de protection internationale, l’ANGE menait sa propre enquête sur cet événement troublant. Utilisant toutes les ressources de ses experts, Mithri Zachariah tentait d’établir la trajectoire exacte des missiles à partir du moment où ils avaient été détectés sur les radars. Les premiers résultats l’ayant laissée perplexe, elle avait tout de suite exigé une nouvelle analyse par d’autres savants. Ils lui avaient finalement fourni la même explication : les projectiles meurtriers étaient tout simplement tombés du ciel !

Mithri avait donc convoqué tous les directeurs continentaux à une conférence par vidéophone, afin d’écouter leurs hypothèses, aussi farfelues soient-elles. De prime abord, ils semblaient d’accord pour dire que les bombes avaient sans doute été larguées d’un avion. Le problème, c’était qu’aucun radar n’avait enregistré la présence d’un aéronef à des kilomètres à la ronde. Le directeur de l’Asie avait alors mentionné la possibilité d’une attaque extraterrestre. « Mais pourquoi sur Jérusalem et pas ailleurs ? » s’était demandé la grande dame de l’Agence. Les missiles avaient éclaté dans les airs sans faire de dommages. Était-ce uniquement un avertissement de la part d’une puissance galactique ?

Mithri écouta les derniers commentaires des directeurs et annonça qu’elle les prendrait en considération avant d’adopter une position finale. Elle arpenta ensuite son bureau de la base de Genève, située sous le bâtiment des Nations Unies, envisageant tous les scénarios. Un visage apparut alors à son esprit et elle retourna aussitôt s’asseoir à sa table de travail.

— Ordinateur, mettez-moi en rapport avec Cédric Orléans, je vous prie.

— IL EST TROIS HEURES DU MATIN AU QUEBEC, MADAME ZACHARIAH.

— Je suis sûre qu’il n’est pas couché.

— TRES BIEN, MADAME.

Mithri n’eut pas à attendre longtemps.

— LA COMMUNICATION AVEC LA BASE DE MONTREAL EST MAINTENANT ETABLIE. VOUS POUVEZ PARLER.

— Bonsoir, Mithri, ou devrais-je dire bonjour ?

— Dis-moi ce qui te retient à la base, Cédric.

— La même chose que vous, je crois.

— Es-tu arrivé à t’expliquer l’origine de cette agression contre Jérusalem ?

— M’appelez-vous à cette heure uniquement pour savoir ce que j’en pense ?

— C’est une folle idée que je viens d’avoir, en effet.

— Pourquoi sollicitez-vous mon opinion alors que je n’ai accès, en tant que directeur régional, à aucun des rapports scientifiques qui se trouvent probablement devant vous ?

— Parce que tu n’as pas besoin de tous ces papiers pour voir clair dans une situation. Tu ne penses pas comme mes autres directeurs.

« Évidemment, puisque je ne suis pas humain comme eux », s’amusa silencieusement Cédric.

— Les reptiliens pourraient-ils être responsables de ce bombardement ? poursuivit Mithri.

— Si on considère qu’au moins la moitié de la population qui reste sur Terre est d’origine reptilienne, alors oui, c’est une forte probabilité.

— Un de nos directeurs croit que l’attaque pourrait aussi être de nature extraterrestre.

— Ce serait facile à établir en examinant les débris des projectiles.

— Malheureusement, nous n’en avons retrouvé aucun. Ou bien ils ont été pulvérisés à haute altitude, ou bien ils ont tous été ramassés par des chercheurs de trésors. Tous nos informateurs sont à leur recherche depuis des jours.

— Nous ne possédons pas la technologie requise pour microniser des bombes de cette façon, à ce que je sache.

— Nos instruments n’ont détecté la présence d’aucun appareil volant dans la région avant, pendant ou après l’agression.

— Avez-vous analysé les données du satellite ?

— Il n’y avait rien non plus dans l’espace.

— Peut-être les missiles se sont-ils autodétruits, songea tout haut Cédric. La nation qui les a lancés aura eu des remords et appuyé sur le bouton panique avant de déclencher une autre guerre mondiale.

— Sans preuve concrète, toutes les hypothèses sont possibles en ce moment, même celle du miracle. Il demeure toutefois important que nous découvrions le coupable pour calmer cette tempête internationale dont nous n’avons nul besoin.

— Vous êtes-vous adressé à Vincent McLeod ? s’enquit Cédric. Lorsqu’il travaillait pour moi, il arrivait à percer tous les mystères.

— Kevin Lucas y a pensé, lui aussi, sauf que Vincent consacre tous ses efforts à l’étude de la Bible et ne fait plus d’informatique.

— Il ne vous reste donc plus qu’à attendre que la base de Jérusalem découvre des fragments de ces bombes.

— Comme tu le sais peut-être déjà, le nouveau président de l’Union eurasiatique fait arrêter tous ceux qui sont soupçonnés d’espionnage. Nous avons suffisamment perdu d’agents lors du Ravissement. Nous ne pouvons pas nous permettre d’exposer à ce danger les quelques bons atouts que nous possédons au Moyen-Orient.

— Adielle est suffisamment habile pour ne pas se faire prendre.

Mithri se mit à triturer la petite breloque sphérique qui pendait à la chaînette qu’elle portait au cou, en se rappelant que Cédric et Adielle s’était connus à Alert Bay, jadis.

— Tu as accès toi aussi à de l’information privilégiée, poursuivit-elle. Informe-toi auprès de tes sources reptiliennes. Je veux savoir ce qui s’est passé là-bas.

— Est-ce un ordre ?

— Oui, Cédric. Aussi surprenant que cela puisse paraître, c’en est un. Surtout, ne tarde pas à l’exécuter, sinon nous aurons bientôt une catastrophe mondiale sur les bras.

— Je ferai ce que je pourrai.

— Je sais que je peux compter sur toi. Joins-moi dès que tu sauras quelque chose.

— Je n’y manquerai pas.

— Communication terminée.

Le visage de Mithri disparut sur l’écran mural du bureau de Cédric et fut tout de suite remplacé par le logo de l’ANGE.

— Comment vais-je m’y prendre pour me procurer ces informations sans attirer l’attention des Dracos ? se demanda à voix haute le directeur découragé.

— PUIS-JE VOUS FAIRE UNE SUGGESTION, MONSIEUR ORLEANS ?

La voix de Cassiopée fit sursauter l’Anantas, car cette dernière ne s’était pas encore manifestée depuis le début de la soirée.

— Oui, bien sûr, soupira Cédric, car il savait qu’il n’arriverait pas à la faire taire de toute façon.

— LE MIEUX SERAIT D’UTILISER LES SERVICES D’UN INFORMATEUR PARMI LES REPTILIENS.

— Madame Zachariah veut obtenir ce rapport au cours des prochains jours, pas l’année prochaine. Et contrairement à ce que vous semblez croire, il est très difficile de trouver quelqu’un prêt à trahir ses semblables, même pour une forte somme d’argent.

— IL POURRAIT AUSSI S’AGIR D’UNE PERSONNE INSATISFAITE DE SON SORT DANS CETTE COMMUNAUTE ET QUI N’EPROUVERAIT AUCUN REMORDS A VOUS RENSEIGNER.

— Ce genre d’individus ne passe malheureusement pas d’annonce dans les journaux.

— VINCENT MCLEOD PRETEND QUE LES REPTILIENS ONT DES CANAUX PARTICULIERS POUR ECHANGER DES MESSAGES. UN TEXTE AJOUTE A SA BASE DE DONNEES A TORONTO DECLARE MEME QUE LEUR LANGUE PASSE COMPLETEMENT INAPERÇUE DANS LE TUMULTE QUOTIDIEN DES GRANDES VILLES.

Cédric avait déjà utilisé ce mode de communication à la base de Montréal, peu de temps avant sa destruction. Même s’il avait tenté toute sa vie d’oublier qu’il n’était pas humain, il ne pouvait plus renier sa véritable nature. Perfidia l’avait forcé à se métamorphoser une première fois, mais le reste, il le faisait instinctivement.

— VOUS N’AVEZ QU’A FAIRE CIRCULER EN VILLE LA RUMEUR QUE VOUS AVEZ BESOIN D’UN INFORMATEUR.

— Aussi bien me suicider tout de suite, dans ce cas, car tous les reptiliens découvriront qui je suis et où se trouve ma base.

— J’ALLAIS JUSTEMENT VOUS CONSEILLER DE REVETIR UNE FAUSSE IDENTITE ET D’UTILISER L’ADRESSE D’UN RESTAURANT OU D’UN BAR.

Il n’était pas facile de mentir pour un homme qui avait toujours mis l’honnêteté et la probité au sommet de sa liste de valeurs.

— j’y réfléchirai.

Cédric se leva en bâillant.

— JE COMPRENDS. LES HUMAINS ONT DU MAL A ORGANISER LEURS PENSEES LORSQUE LEUR CORPS A BESOIN DE REPOS.

« Même mon ordinateur oublie que je suis en réalité un Anantas », se dit Cédric. Les portes du bureau glissèrent devant lui. Il ne restait que Sigtryg dans la salle des Renseignements stratégiques. Pascalina le remplacerait au matin. Jadis, il ne se produisait jamais grand-chose la nuit sur le territoire du directeur, mais depuis la disparition des meilleurs éléments de la société, les rapaces étaient tout aussi actifs après le coucher du soleil que durant le jour. Cédric n’importuna pas le technicien concentré sur son travail. Il traversa la vaste salle aussi silencieusement qu’un fantôme et poursuivit sa route jusqu’à la section médicale.

Le docteur Lawson était rentrée chez elle depuis déjà quelques heures. Son patient reposait dans un état satisfaisant, dans une chambre chaude et aseptisée, branché à une multitude d’appareils de contrôle. Jordan Martell, mieux connu sous son pseudonyme de Damalis, avait subi de toute urgence de nombreuses opérations chirurgicales, destinées à le maintenir en vie. À présent que son état était stable, Athénaïs Lawson avait commencé à réparer les parties de son squelette qui avaient été endommagées lors de l’explosion de la grotte de Perfidia.

Presque entièrement recouvert de plâtre immaculé, Damalis dormait paisiblement grâce au soluté analgésique qui coulait au goutte à goutte dans ses veines. Tous les soirs, avant de retourner à son appartement, Cédric s’arrêtait à l’infirmerie pour le voir. Les progrès du mercenaire américain étonnaient beaucoup sa chirurgienne, qui ignorait que les reptiliens ne se laissaient pas facilement abattre.

Les cheveux du Spartiate, qui avaient été rasés à son arrivée à la base, recommençaient à pousser. Ils n’étaient plus noirs comme avant, mais aussi blonds que ceux de Thierry Morin. Damalis était le deuxième Naga que Cédric rencontrait. Ces hybrides nés d’un croisement de Dracos et de Pléiadiennes ne cessaient d’émerveiller le directeur montréalais. Ils possédaient un courage et une détermination qu’il leur enviait beaucoup. Une fois qu’un Naga connaissait sa cible, rien ni personne ne l’empêchait de l’abattre. Toutefois, Cédric ne pouvait pas se comparer à eux, car il ignorait encore beaucoup de choses au sujet de sa propre race. Il regrettait souvent que Thierry Morin ait si rapidement quitté le pays, car il avait été sa principale source d’informations sur le sujet.

Sans se presser, Cédric se rendit à l’ascenseur, qui le déposa dans son immeuble à logements, de l’autre côté de la rue. Il procéda à son rituel hygiénique du soir et s’allongea sur son lit en regardant les étoiles par la large fenêtre qui bordait sa chambre. Elles étaient bien plus faciles à observer depuis l’imposition du couvre-feu. Les autorités exigeaient non seulement de la population qu’elle reste chez elle lorsque l’obscurité commençait à envahir la ville, mais elles lui demandaient aussi d’utiliser le moins d’électricité possible. Une fois les lampadaires de rue éteints, la voûte céleste devenait magique.

Cédric se remit à penser à la requête de Mithri. Il aurait vraiment apprécié qu’elle ne lui impose pas la tâche supplémentaire de dénicher un informateur. Il en avait déjà plein les bras avec les rassemblements des disciples de Cael Madden à Montréal. Ceux qui désiraient être sauvés avant la fin du monde arrivaient par milliers de tous les coins du pays et même d’ailleurs, pour la plupart en voiture, en autobus ou en train. Les voyages en avion étaient quant à eux hors de prix. Ces pauvres gens devenaient très rapidement des proies faciles pour les malfaiteurs. Si ces derniers s’étaient contentés de leur voler leurs portefeuilles ou leurs voitures, les forces de l’ordre auraient eu moins de fil à retordre. Les canailles enlevaient également des dizaines de personnes en ville toutes les semaines. Puisque les corps des victimes n’étaient jamais retrouvés, les illuminés croyaient au miracle. Mais Cédric savait bien qu’ils avaient servi de repas à une bande de Dracos ou qu’ils avaient été offerts en sacrifice à un prince.

Le directeur montréalais analysait la situation depuis quelque temps, se demandant ce que l’ANGE pouvait faire pour réduire le nombre de rapts et porter un solide coup à ses ennemis jurés. Mithri avait récemment retiré des règlements de l’Agence la directive de non-intervention de ses agents. Ils devaient maintenant être armés en tout temps et ils avaient le droit de procéder à des arrestations, au besoin. Toutefois, les nouvelles recrues de Cédric étaient inexpérimentées. Seul Aodhan possédait suffisamment de jugement sur le terrain pour y être d’une réelle utilité, mais l’Amérindien ne pouvait à lui seul patrouiller toute la ville. « Mes jeunes ont besoin d’apprendre à se débrouiller à l’extérieur de la base. Cependant, s’ils se font tuer, Alert Bay ne m’en enverra pas d’autres de sitôt », pensa le directeur, déprimé.

Cédric n’était pas encore fixé non plus quant à la sincérité de Cael Madden. Cet homme était-il réellement ce sauveur que tout le monde attendait ? Affronterait-il éventuellement l’Antéchrist à Jérusalem comme le prétendait la Bible ? Cédric avait écouté tous les discours de Madden sur Internet. Cet homme paraissait aussi innocent que Cindy Bloom qui, d’ailleurs, ne le lâchait plus d’une semelle. Ils faisaient un beau couple, tout le monde en convenait. Ce qui étonnait par contre le directeur, c’était la béatitude qui s’affichait sur le visage de son ancienne agente lorsque le prophète ouvrait la bouche pour parler à ses disciples. « Les Dracos hypnotisent eux aussi leurs proies », se rappela-t-il.

L’Anantas s’endormit finalement au milieu de ses tracas, pour se réveiller à peine quelques heures plus tard, tout aussi tourmenté qu’à son coucher. Il fila sous la douche, s’habilla et retourna à la base, où Pascalina venait de remplacer Sigtryg.

— Bonjour, monsieur Orléans, lança joyeusement la technicienne.

— Bon matin, Pascalina. Quelque chose à signaler ?

— Sur la scène mondiale, c’est toujours la même cacophonie au sujet des missiles. La Russie accuse maintenant la Chine, qui accuse la Corée et ainsi de suite.

— Et par chez nous ?

— Un jeune couple a disparu quelques minutes avant le couvre-feu, tandis qu’il marchait sur le Mont-Royal. Des témoins auraient vu plusieurs individus vêtus de pulls à capuchon s’emparer d’eux et les emmener vers une camionnette. La police a tout de suite été appelée, mais il était déjà trop tard.

— Transmettez-moi ces détails sur mon système personnel, je vous prie.

— Tout de suite.

Le directeur se réfugia dans son bureau, où l’attendait une tasse de café fumante. Cédric releva les yeux sur la sphère métallique qui pendait du plafond, au bout de son unique bras mécanique.

— Depuis quand les ordinateurs préparent-ils du café ?

— CELA NE FAIT PAS PARTIE DE MA PROGRAMMATION POUR L’INSTANT. LA SEULE CHOSE QUE JE PUISSE FAIRE, C’EST VOUS DIRE S’IL EST OU NON EMPOISONNE. MONSIEUR LOUP BLANC M’A DEMANDE S’IL POUVAIT LE DEPOSER SUR VOTRE TABLE DE TRAVAIL. ETANT DONNE VOTRE IRREPRESSIBLE BESOIN DE CAFEINE A VOTRE REVEIL, JE LUI AI ACCORDE CETTE PERMISSION.

— Merci de me laisser satisfaire ce vice, Cassiopée.

Cédric prit place sur la chaise capitonnée et savoura sa première gorgée les yeux fermés. Puis il sortit de la poche intérieure de son veston une petite fiole remplie de poudre. Il en saupoudra un peu dans la tasse et remit la bouteille à sa place.

— POURQUOI VERSEZ-VOUS DE L’OR DANS TOUT CE QUE VOUS BUVEZ ?

— Cela me permet de conserver plus longtemps mon apparence, humaine. D’ailleurs, cette information devrait faire partie de la base de données de l’agent McLeod.

— VERIFICATION EN COURS.

Le directeur se cala dans le dossier du fauteuil pour savourer la boisson chaude.

— ELLE APPARAIT EN EFFET DANS CERTAINS ARTICLES.

— Donc, les ordinateurs ne savent pas tout instantanément.

— NOTRE MEMOIRE CONTIENT ESSENTIELLEMENT CE QUE NOTRE PROGRAMMEUR Y A INSTALLE, MAIS NOTRE CAPACITE A ALLER CHERCHER TOUTE INFORMATION DONT NOUS AVONS BESOIN EST NETTEMENT SUPERIEURE A CELLE DES HUMAINS.

— Et à celle des reptiliens ?

— JE NE POSSEDE PAS SUFFISAMMENT D’ENTREES A CE SUJET. JE SAIS SEULEMENT QUE LES PLUS INTELLIGENTS D’ENTRE EUX SONT LES DRACOS, LES ANANTAS ET LES NAGAS.

— Parfois…

— MONSIEUR LOUP BLANC DEMANDE A VOUS VOIR.

— Faites-le entrer.

Depuis son arrivée à Montréal, Aodhan avait progressivement abandonné ses complets d’homme d’affaires pour une tenue plus décontractée. Il portait toujours des pantalons propres et des souliers de qualité, mais il préférait désormais se vêtir de pulls ras du cou. Cédric ne lui avait pas fait de reproche sur son allure plus rebelle. Il s’attardait davantage aux accomplissements de ses agents plutôt qu’à leur apparence. Mais il aurait sans doute mal réagi si l’un d’eux s’était présenté à la base avec un tee-shirt arborant une tête de squelette et un jeans troué…

— Est-ce que je vous dérange ? demanda l’Amérindien.

— Non. Je reprendrai plus tard ma conversation avec Cassiopée sur le quotient intellectuel des reptiliens.

Aodhan haussa les sourcils.

— Merci pour le café, poursuivit Cédric. J’espère que ce n’était pas un geste destiné à m’amadouer avant de m’annoncer une terrible nouvelle.

— Si telle avait été mon intention, j’aurais apporté une pomme. C’est Mélissa qui a préparé le café ce matin, et il sentait particulièrement bon, alors j’ai pensé que tu voudrais y goûter.

L’agent prit place devant son patron.

— En parlant de nos jeunes matamores, je dois te signaler qu’ils en ont assez de faire de la recherche aux Laboratoires.

— J’ai eu la même réflexion hier soir, avoua Cédric.

— Tu te décides donc enfin à leur confier une mission sur le terrain ?

— Seulement si tu la supervises.

— Je n’ai jamais fait cela, mais je crois que je pourrais y arriver.

— Ils sont trois et ils sont loin d’avoir ta discipline.

— Je n’ai pas toujours été l’homme docile que tu connais aujourd’hui. Nous faisons tous des erreurs stupides à nos débuts.

« Pas les reptiliens, sinon ils sont rapidement éliminés », ne put s’empêcher de songer Cédric. Son père l’avait d’ailleurs élevé d’une main de fer, sans aucun gant de velours, lui répétant sans cesse qu’il serait tué par les Dracos s’il n’apprenait pas à obéir sans rechigner et à accomplir toutes ses tâches avec la plus grande efficacité. Le pauvre homme avait-il su avant sa mort que son fils unique n’était pas né pour être un esclave Neterou comme lui ? Ou l’avait-il maté à un tout jeune âge parce qu’il craignait justement de le voir un jour développer toute sa puissance d’Anantas ?

— Cédric ? appela Aodhan, inquiet.

Le directeur sortit brusquement de sa rêverie.

— Sur quelle planète étais-tu rendu ?

— Sur la nôtre, malheureusement, soupira Cédric.

— Ai-je sans le vouloir réveillé de vieux souvenirs ?

— Ce n’est pas important. Emmène nos trois amateurs de science-fiction avec toi et donne-leur la leçon de terrain qu’ils n’ont pas eu le temps de recevoir en Colombie-Britannique.

— Quel sera notre objectif ?

— Dépister parmi les disciples de Cael Madden les fausses brebis et les rapaces. Apprends à nos agents à ouvrir l’œil et à utiliser leur intuition d’espion.

— Madden ? Je croyais que tu ne t’intéressais pas à sa prédication. Aurais-tu changé d’idée à son sujet ?

— Mes convictions personnelles n’ont rien à voir là-dedans.

— Mais tu veux que nous assurions en quelque sorte sa protection en épurant son entourage.

— Si cet exercice sert aussi à cela, alors tant mieux.

— Aux dernières nouvelles, deux cent mille personnes sont arrivées à Montréal au cours des derniers jours en espérant qu’il leur parle. Il me faudrait tout un bataillon pour être vraiment efficace.

— Eh bien, nous n’en avons pas.

— Dans ce cas, je ferai ce que je pourrai.

Cédric ne s’attendait pas à moins de la part de son agent.

— J’ai une dernière question avant de te laisser travailler en paix, dit l’Amérindien en se levant. Que comptes-tu faire de Damalis ?

— Tout dépendra de son état lorsque le docteur Lawson en aura fini avec lui. Il est vigoureux et il se bat pour rester en vie, mais rien ne prouve qu’il pourra de nouveau avoir une vie normale.

— Si jamais il se remettait complètement de ses blessures, pourrions-nous le garder dans nos rangs ?

— Il existe une procédure obligatoire pour se joindre à l’ANGE, Aodhan. Tu le sais, pourtant.

— j’ai aussi appris à Alert Bay qu’il y avait eu des exceptions, au cours de notre histoire.

— Vous lisez trop.

— Quand pourrai-je commencer ma nouvelle mission ? demanda l’Amérindien pour changer de sujet.

— Tout de suite, si tu veux. D’autres personnes ont été enlevées hier soir. Si jamais tu apprenais quelque chose au cours de tes rondes avec les jeunes…

— Compris.

Aodhan salua son patron et quitta le bureau. Cédric demeura enfoncé dans son fauteuil, à savourer tranquillement les premiers instants de sa journée.

— PUIS-JE AUSSI PARTICIPER A CETTE ENQUETE ? demanda alors Cassiopée.

— De quelle façon ?

— EN ANALYSANT TOUTES LES INFORMATIONS RAPPORTEES DANS LES MEDIAS.

— Pascalina fait déjà ce travail.

— A-T-ELLE RETROUVE CES GENS QUI ONT DISPARU ?

— Est-ce une critique ?

— CE N’EST QU’UNE CONSTATATION.

— Bon, d’accord. Je ne m’oppose pas à cette enquête virtuelle, à condition qu’elle s’inscrive dans les limites de la légalité. Les ordinateurs les connaissent, n’est-ce pas ?

— VINCENT MCLEOD LES A EN EFFET INTEGREES DANS MA MEMOIRE. JE LES RESPECTERAI COMME UN VERITABLE AGENT.

Cédric réprima un sourire. Il n’allait certainement pas lui raconter qu’il n’avait jamais été capable d’inculquer cette importante notion à Yannick et à Océane…

 

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