Postface
Chaque guerre apporte son lot d'enseignements. Si ce n'était pas le cas, on aurait combattu en vain et les morts auraient donné leur vie pour rien.
Les enseignements de la guerre du Golfe sont au nombre de deux et ils sont parfaitement clairs, à condition que les grandes puissances veuillent bien les prendre en compte.
Le premier est que c'est de la folie, de la part des trente pays les plus industrialisés, qui disposent de quatre-vingt-dix pour cent des technologies d'armements et des moyens de les fabriquer, de vendre ce genre de produits à des nations agressives et dangereuses dirigées par des fous, pour de simples considérations financières.
Pendant dix ans, on a autorisé l'Irak à s'armer de manière extrêmement menaçante. C'est là le résultat de l'aveuglement politique, de l'aveuglement bureaucratique et des pressions exercées par les industriels. En fin de compte, la destruction partielle de cet arsenal a coûté beaucoup plus cher que sa vente.
Un nouvel événement de ce genre pourrait facilement être évité en établissant un registre centralisé de toutes les ventes consenties à certains régimes. Les pénalités en cas de non-déclaration de ces opérations devraient être draconiennes. Des experts compétents se rendraient très vite compte, en ayant accès à la nature et à la quantité de matériels commandés ou livrés, que des armes de destruction massive sont en cours de développement.
Faute de quoi, on assistera à la prolifération d'armes de haute technologie et les années de la guerre froide nous apparaîtront a posteriori comme une ère de paix et de tranquillité.
La deuxième leçon concerne la collecte du renseignement. Avec la fin de la guerre froide, beaucoup ont cru que cette activité pouvait être réduite sans risque. La réalité montre qu'il n'en est rien, bien au contraire.
Au cours des années soixante-dix et quatre-vingt, des progrès considérables ont été accomplis dans le domaine du renseignement électronique. Ces progrès furent si impressionnants que les gouvernements des Etats du monde libre ont fini par croire que les équipements automatiques se chargeraient de tout, comme le leur juraient les ingénieurs qui fabriquaient ces systèmes hors de prix. En conséquence, le rôle de l’" opérateur " humain a été sérieusement revu à la baisse dans ce domaine.
Au cours de la guerre du Golfe, toute la panoplie des merveilles technologiques occidentales a été mise en œuvre et, en partie parce que cet ensemble représentait des dépenses considérables, on supposa qu'il était infaillible.
II ne l'était pas. Grâce à un mélange d'astuce, d'imagination, de ruse et de travail acharné, l'arsenal irakien et ses outils de production avaient déjà été camouflés ou si bien cachés qu'aucun appareil n'était capable de les détecter.
Les pilotes ont effectué leurs missions avec beaucoup de courage et de compétence, mais ils ont trop souvent été mis en échec par les trucs de leurs adversaires qui réalisaient des copies inertes ou avaient mis au point des méthodes de camouflage.
Le fait est que les armes bactériologiques, chimiques ou nucléaires n'ont pas été utilisées. Mais, comme pour l'issue de la bataille de Waterloo, on n'est pas passé très loin du pire.
Ce qui est maintenant évident après cette guerre, c'est que, pour remplir certaines missions à certains endroits, personne n'a encore trouvé de substitut au plus vieux système de collecte du renseignement qui existe sur cette terre : le globe oculaire de l'homme, modèle d'origine.