Les personnages du drame
Hermione était la fille de Ménélas et d’Hélène. Elle avait cinq ans lorsque sa mère fut enlevée par Pâris et que son père s’embarqua pour la guerre de Troie. Elle resta alors seule, avec ses gouvernantes et ses serviteurs, dans le palais de Ménélas à Sparte. De temps à autre, des voyageurs de qualité, de passage à Sparte, allaient rendre une visite de courtoisie à Hermione. Elle avait quatorze ans lorsque Pyrrhus, le fils du divin Achille, lui fit une visite de ce genre. Pyrrhus, qui venait d’apprendre la mort de son père, était alors en route pour Troie, où il avait été appelé par les autres rois grecs. Jeune, beau, auréolé d’une flamboyante chevelure rousse et de la gloire de son père, il fit sur Hermione une profonde impression. Lorsqu’il quitta Sparte deux jours plus tard, il laissait derrière lui une Hermione éperdument amoureuse. Lui-même, qui rêvait alors d’exploits guerriers, n’avait prêté à la jeune fille qu’une attention distraite.
En arrivant à Troie, Pyrrhus fut accueilli par les rois grecs avec tous les honneurs dus à sa filiation. Ménélas, en particulier, qui était reconnaissant à Pyrrhus de venir se joindre au combat, lui proposa de lui donner sa fille Hermione en mariage lorsque la guerre serait terminée, avec une dot royale et la perspective d’hériter un jour du trône de Sparte. Pyrrhus accepta cette offre, plus d’ailleurs pour la dot que pour la fiancée. Quelques mois plus tard, Troie était prise. Pyrrhus, qui s’était illustré par sa bravoure et sa brutalité, reçut pour sa part de butin Andromaque, la veuve d’Hector. Il ne tarda pas à s’éprendre de sa prisonnière, avec une passion d’autant plus violente qu’elle n’était pas partagée. Andromaque, il est vrai, ne pouvait éprouver beaucoup de sympathie pour Pyrrhus : n’était-il pas le fils du meurtrier d’Hector, et n’avait-il pas lui-même sauvagement exécuté le petit Astyanax, fils d’Hector et d’Andromaque ? Aussi, les sentiments d’Andromaque pour Pyrrhus, tout en fluctuant quelque peu d’un jour à l’autre, n’oscillaient guère qu’entre l’indifférence et l’aversion. Irrité par la résistance passive que lui offrait sa captive, Pyrrhus ne pensa bientôt plus à rien d’autre qu’à conquérir à tout prix son amour.
C’est pourquoi, quelques mois plus tard, lorsque Pyrrhus, de retour dans son royaume après un voyage sans incident notable, reçut de Ménélas un message lui proposant de fixer une date pour le mariage convenu avec Hermione, il répondit d’une manière dilatoire : il était, disait-il, fort occupé par les affaires internes de son royaume, et ne manquerait pas de reprendre contact avec Ménélas aussitôt que les circonstances le lui permettraient. Ce qui l’occupait en réalité, est-il besoin de le dire, c’était Andromaque, toujours réfractaire à son amour et toujours amoureuse de son défunt mari, Hector.
Ménélas fut un peu déçu par la réponse de Pyrrhus, mais Hermione le fut beaucoup plus. Son amour pour le fils d’Achille n’avait fait en effet que croître depuis la visite que lui avait faite le jeune prince quelques mois auparavant. Son père, Ménélas, l’apaisa cependant en lui assurant que ce n’était que partie remise, et que le mariage convenu aurait bien lieu.
Sur ces entrefaites, le neveu de Ménélas, Oreste, qui venait d’être acquitté par le tribunal de l’Aréopage, se présenta un beau jour au palais de son oncle. Jugeant qu’il était encore un peu prématuré pour lui de retourner à Mycènes, où l’agitation provoquée par le meurtre de Clytemnestre n’était pas encore calmée, il venait demander à Ménélas de lui accorder pendant quelques mois l’hospitalité.
— Tu es ici chez toi, lui répondit Ménélas, et Oreste s’installa au palais.
Quelques jours plus tard, il était tombé amoureux de sa cousine Hermione ; celle-ci, tout à son propre amour pour Pyrrhus, ne s’en aperçut même pas.
À partir de ces données, il devient possible et même, si l’on veut comprendre la suite des événements, il devient absolument nécessaire d’analyser avec précision les relations amoureuses existant entre les quatre éléments de l’ensemble E.